Mieux vaut viser l'autonomie protéique, ou vendre des cultures pour acheter du tourteau ? Avec la hausse des prix des céréales, les arbitrages entre alimentation du bétail et culture de vente tendent à se modifier, et dans certains cas, l'autonomie n'est plus la voie la plus rentable.
« Économiquement, la conjoncture 2022 est favorable aux cultures et notamment au blé. Dans ce contexte, autonomie en protéines ne rime pas toujours avec rentabilité, il faut calculer et être vigilant à bien mesurer les conséquences des changements engagés. Reste ensuite à voir, à court et moyen terme, comment le contexte évoluera », estime Fabien Bregeault à l’occasion de la semaine de l’expertise proposée par Littoral Normand.
Moins de blé et plus de pâturage : une option moins avantageuse qu'avant
Pour 25 % des éleveurs normands pâturant, le pâturage apporte moins de 375 kg de MS/VL/an, soit l'équivalent du tiers de la ration des vaches laitières durant deux mois et demi. Si l'on double la quantité d'herbe ingérée au pâturage sur ces exploitations, une économie en concentré azoté de l'ordre de 90 kg/VL/an pourrait être observée. Sur un troupeau de 80 laitières, cela représente une économie annuelle de 7 t, mais entraine la mise en herbe d'environ 3 ha de cultures. Alors, est-ce rentable de mettre en prairie des parcelles compte tenu des prix actuels des céréales ? Tout dépend du potentiel des terres, des cultures que l'on remplace et des niveaux de prix : « sur une base de blé à 85 quintaux valorisé à 300 €/t, pour le cas présent, l’option reste rentable, mais moins avantageuse que durant les campagnes précédentes », explique Fabien Bregeault, référent technico-économique.
Pour ce cas précis, implanter 3 ha de prairies au détriment de 1,5 ha de maïs et de 1,5 ha de blé donne un bilan positif à hauteur de 1 000 € sur la campagne 2022. Avec les niveaux de prix des céréales enregistrés sur la campagne précédente, la même opération présentait un bilan positif de 2 500 € en faveur du pâturage. Difficile donc de trouver un équilibre entre production de fourrages et cultures de vente. Si certaines cultures permettent de faire diminuer le coût de la ration mieux vaut s'assurer qu'elles restent rentables à l'échelle de l'exploitation.
Ça n'est pas parce que le coût au 1 000 l baisse que la stratégie est rentable à l'échelle de l'exploitation
Une seconde simulation orientée autour de la luzerne montre que l'autonomie protéique n'est pas toujours gage de rentabilité économique, qui plus est dans le contexte actuel. L'ajout de luzerne à la ration permet certes d'effectuer l'économie de 11,5 TMB de concentré, ainsi que de diminuer les besoins en ensilage de dérobée et ensilage de maïs, mais sans pour autant atteindre l'équilibre. « Si l'on s'arrête au calcul de la ration, on s'aperçoit que l'on gagne 10 € les 1 000 litres. A l'échelle de l'exploitation avec du blé à 300 €/t, ça n'apparaît plus si avantageux » concède Amandine Houssaye, conseillère d'exploitation à Littoral Normand. Les pertes générées par la mise en luzerne de parcelles de blé ne sont pas compensées par les économies réalisées sur les achats de tourteau, et ce même avec les aides Pac légumineuses. Si l'on effectue cette même simulation, tous paramètres égaux à l'exception du prix du blé, cette fois à 200 €/t, on se rend compte que l'implantation de luzerne aurait été rentable, et généré un gain de 1 700 €.
Ensiler des dérobées pour ne pas faire concurrence aux cultures
Pour améliorer l'autonomie protéique de l'exploitation sans avoir de répercussions sur les cultures de ventes, l'ensilage de dérobées semble être une bonne option. Pour une même exploitation avec 80 VL, l'implantation de 8,6 ha de dérobées fauchées en 2 coupes avec un rendement à hauteur de 5 t MS/ha permet d'économiser l'équivalent de 15 t de concentré. Au niveau de prix de 2022, l'opération s'avère rentable avec un bénéfice à hauteur de 2 300 €. Cette pratique trouve cependant ses limites quant aux interrogations sur le rendement de la culture suivante, et pose des questions d’organisation du travail et des rotations.
Compte tenu du contexte, « il faut faire les calculs. On ne peut pas se comparer avec le voisin, il faut vérifier à l’échelle de l’exploitation en fonction de ses sols et de ses attentes pour choisir la voie la plus rentable », conclut Amandine Houssaye.
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