80 ans du fermage : ce que ce statut a changé pour les agriculteurs

Deux agriculteurs devant un tracteur avec des papiers
Le statut du fermage a nettement contribué à la modernisation de l'agriculture. (©Budimir Jevtic, Adobe Stock)

Le statut du fermage a fêté ses 80 ans le 17 octobre. Jeunes Agriculteurs en a fait le thème de sa semaine du foncier 2025, lancée quelques jours plus tôt. L’occasion de revenir sur l’histoire de sa mise en place, son fonctionnement et les avantages pour les bailleurs comme les preneurs, les jeunes installés notamment.

« Après la Seconde Guerre mondiale et les pénuries qui s’en sont suivies, l’agriculture a besoin d’être modernisée. Il faut repenser l’accès aux terres agricoles en créant un statut du fermage et du métayage protecteur pour les agriculteurs », retrace Jeunes Agriculteurs sur les réseaux sociaux. Notamment pour pouvoir investir et développer des projets d’avenir. François Tanguy-Pringent, appelé au ministère de l’agriculture par le Général de Gaulle en septembre 1944, se donne pour mission de le réformer. Issu d’une famille de paysans finistérienne, il a fait ses armes dans le syndicalisme agricole.

La révision du statut du fermage, promulguée un an plus tard par l’ordonnance du 17 octobre 1945 puis complétée par la loi du 13 avril 1946, est « l’une des réformes phares de la libération », met en avant le syndicat. Elle apporte en effet pas mal d’évolutions pour les fermiers. Elle octroie au fermage « un caractère d’ordre public, impératif, qu’on ne peut pas contourner » et instaure « un encadrement strict des loyers dans chaque département ». La durée du bail est fixée à neuf ans minimum. Ce dernier se renouvelle automatiquement, jusqu’à la retraite, et peut se transmettre à un conjoint ou descendant. Les cas de reprise par le propriétaire sont limités. Si le bien loué est mis en vente, un droit de préemption est accordé au locataire. Un tribunal spécifique est mis en place pour les contentieux.

Le bail rural, véritable pilier

Auparavant, les relations entre bailleurs et preneurs dépendaient du Code civil et la loi applicable était celle de la liberté contractuelle. La réglementation était sommaire et il n’y avait pas de cadre juridique de référence. Ainsi, les contrats de location différaient selon les régions et situations, et pouvaient facilement ne pas être respectés par l’une ou l’autre des parties. Les baux, essentiellement oraux, étaient d’une durée d’un an et le fermier n’avait presque aucun droit : « il pouvait être congédié à tout moment et avoir à payer des loyers abusifs ; le propriétaire décidait de tout ou presque jusqu’aux cultures et à l’organisation de l’exploitation. » Changer de ferme chaque année était alors assez fréquent.

Avant, le fermier pouvait être congédié à tout moment.

C’est pourquoi JA a fait du statut du fermage la thématique de sa semaine du foncier 2025, qui a débuté le 13 octobre. D’autant que ce dernier a fêté ses 80 ans le 17 octobre, et qu’il régit la moitié de la SAU française (52 % en fermage, 20 % en faire-valoir direct et 28 % en locations associées ; chiffres de 2020). L’occasion de rappeler son fonctionnement et les éléments clés qui le composent. Le bail rural tout d’abord, le contrat par lequel le propriétaire met à disposition des terres ou bâtiments à un agriculteur qui les exploite en contrepartie d’un loyer appelé fermage, encadré par la loi et qui varie entre un prix minimum et maximum fixé par un barème départemental, et revu chaque année selon l’indice national du fermage.

Des droits et des devoirs pour les locataires comme les propriétaires

Le bail rural est payable en espèces ou en nature pour les cultures pérennes. Outre la durée de neuf ans, la plus commune, il existe des baux à long terme : de 18 ans, 25 ans ou de carrière. Les baux verbaux ne sont pas interdits mais il est préférable qu’ils soient écrits pour limiter les contentieux, et enregistrés. Il est d’ailleurs obligatoire de réaliser un état des lieux d’entrée et de sortie pour attester des améliorations et dégradations ayant eu lieu, et calculer les éventuelles indemnités de fin de contrat. « Il est possible de mettre fin à un bail en cours, à l’initiative du locataire ou du propriétaire, à travers une résiliation amiable ou une résiliation judiciaire », précise le syndicat.

Bailleurs (chefs d’exploitation seuls, ensemble des associés, sociétés d’exploitation) et preneurs (propriétaires terriens, sociétés) ont des droits et des obligations. Les premiers peuvent vendre leurs terres quand ils le souhaitent, résilier les baux impayés ou pour « faute du locataire, départ en retraite ou reprise pour eux-mêmes, leur conjoint ou descendants ». Ils doivent mettre le bien loué à disposition, en « garantir la jouissance paisible du preneur », assurer les travaux importants qui s’imposent ou à défaut « indemniser le locataire ».

« Un gage de sécurité » notamment pour s’installer

Les seconds peuvent choisir leurs cultures mais doivent avoir l’accord du propriétaire si elles sont pérennes. De même que « s’ils veulent céder le bail à leur conjoint ou enfants, ou réaliser des constructions ». Bien sûr, ils doivent s’acquitter du loyer en fin de mois ou d’année pour les baux de longue durée, veiller au bon entretien du bien en location et prévenir leur bailleur d’éventuels dégâts. Tout ceci est expliqué dans la plaquette pédagogique « Le statut du fermage, un outil économique pour mon installation », réalisée par Jeunes Agriculteurs avec la section nationale des propriétaires ruraux (SNPR) et la section nationale des fermiers et métayers (SNFM).

« Jeunes Agriculteurs défend le statut du fermage depuis sa création, souligne le syndicat, car il protège les droits des exploitants agricoles vis-à-vis de leurs propriétaires, et inversement, et permet aux futurs et jeunes installés d’accéder plus facilement à la terre, puis d’investir dans l’outil de production. » C’est un gage de « sécurité et stabilité pour l’exploitation, mais aussi un fondement essentiel du modèle d’agriculture familiale et un maillon phare du renouvellement des générations agricoles », insiste-t-il. Néanmoins, pour qu’il redevienne plus attractif, JA appelle à le réviser à nouveau à travers un véritable « pacte foncier entre l’État, les propriétaires et les fermiers ».

Tout ce qu’il faut savoir sur le fermage, résumé en vidéo :

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