Discorde. Les partisans du « produire plus » saisissent ce contexte pour tenter de desserrer les contraintes environnementales quand les chantres de la décroissance crient au scandale.
L’impact de la guerre en Ukraine a immédiatement affolé les filières agricoles. La panique sur les marchés et les discours alarmistes ont alimenté cette crainte. « L’agriculture est le secteur le plus touché par la crise ukrainienne », annonçait, dès le début du conflit, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire. Si la hausse du coût de l’énergie affecte tous les secteurs de notre économie, celle des matières premières agricoles touche durement les élevages, surtout le porc et la volaille. Certes, l’UE n’a pas à redouter de pénuries alimentaires, mais ce n’est pas le cas d’autres pays proches, notamment en Afrique du Nord.
Alors, au fil des jours et dans un contexte de campagne présidentielle, s’est construite une joute idéologique, parfois caricaturale, autour du modèle agricole français et européen, avec les mêmes acteurs qui s’étaient affrontés au moment de la construction de la future Pac. D’un côté, les tenants d’un productivisme soucieux de nourrir le monde et de maîtriser l’inflation des prix. De l’autre, les partisans de la transition agroécologique et de la démondialisation.
Le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, a donné le ton : « Les agriculteurs européens doivent produire plus. » Présidant le Conseil des ministres de l’UE, il a pressé la Commission d’évaluer la stratégie du Green Deal au regard de la souveraineté agricole de l’Europe. Il a aussi demandé à pouvoir déroger en urgence à l’obligation de jachère afin de cultiver des protéines destinées à l’élevage. Une prise de position très politique dans laquelle se sont engouffrés certains syndicats. Pour la FNSEA, la stratégie du Green Deal doit être remise en question et notamment l’obligation des 4 % de surfaces non productives prévue dans la future Pac. Même son de cloche à la Coordination rurale qui en rajoute avec la suppression des ZNT riverains. Le syndicat majoritaire profite du contexte pour demander aussi « de lever les verrous réglementaires » à la production de biogaz par la méthanisation « dans une logique d’indépendance énergétique ». En fait, la guerre en Ukraine et ses conséquences économiques seraient l’opportunité de demander un desserrement des contraintes environnementales. Dans ce camp, le mot d’ordre qui domine est bien souveraineté alimentaire d’abord, réchauffement climatique ensuite.
Prétexte à « financer un monde agricole en faillite »
En France et dans l’UE, ces positions ont déclenché une levée de boucliers des ONG et syndicats environnementalistes. Le porte-parole de la Confédération paysanne, Nicolas Girod, allant jusqu’à qualifier d’indécent cette utilisation du conflit ukrainien pour « financer un modèle agricole en faillite ». Ces mouvements, qui défendent tous une agriculture paysanne fustigent l’élevage industriel, « importateur de tourteaux, de phytos, d’engrais », ainsi que le « produire plus pour nourrir le monde ». Pour la Conf’, remettre en culture les jachères n’aurait aucun sens étant donné la faiblesse des surfaces. « Il faut reprendre le contrôle du prix des céréales en arrêtant la spéculation, interdire les cultures à destination de la méthanisation et des agrocarburants et accompagner financièrement les éleveurs. »
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