
Avec une ration mixte pâturage + maïs-ensilage, la tentation est de sécuriser l'alimen-tation en privilégiant le fourrage conservé. Des règles simples contournent ce risque.
RARES SONT DÉSORMAIS LES ÉLEVEURS qui ferment leur silo de maïs au printemps. N'aimant pas les variations de niveau de lait dans le tank liées au début et fin de paddock, jugeant la pousse de l'herbe aléatoire, la majorité préfère sécuriser l'alimentation de leurs vaches par la distribution d'ensilage de maïs pendant toute la saison de pâturage. Une stratégie qui n'a d'ailleurs rien d'incohérent puisque l'herbe pâturée et le maïs-ensilage sont deux fourrages complémentaires, la première riche en azote et le second en énergie. Le risque est que l'herbe pâturée devienne accessoire. Il est courant d'observer le matin, après la traite, des vaches couchées dans une herbe abondante. « Le fourrage distribué doit être la variable d'ajustement à la disponibilité plus ou moins importante de l'herbe, et non l'inverse, rappelle Benoît Rouillé, de l'Institut de l'élevage. L'herbe pâturée fournit et continuera de fournir de l'énergie et de l'azote pas chers. Même si l'on apporte du maïs-ensilage, l'objectif principal au printemps et en été reste la valorisation du pâturage. »
En d'autres termes, le pâturage commande, les vaches s'adaptent. Cette formule un peu à l'emporte-pièce repose notamment sur des essais de l'Inra de Saint-Gilles (Ille-et-Vilaine) en 2008 *. En fonction du temps d'accès au pâturage, de l'herbe disponible et de la quantité de maïs-ensilage distribuée en complément, ils montrent que les vaches sont capables d'adapter leur comportement pour maximiser l'ingestion totale. Dans l'un des essais en conditions extrêmes, c'est-à-dire en février et mars sur une surface pâturable fortement limitante, les laitières prolongent leur premier repas de 50 à 80 minutes par rapport à celles qui bénéficient d'une surface pâturable plus généreuse.
ORGANISER PÂTURAGE ET DISTRIBUTION DU MAÏS
Évidemment, il ne s'agit pas de forcer les vaches à pâturer en les plaçant dans des conditions extrêmes, seulement les motiver à pâturer. Pour cela, il suffit, après la traite du matin, de proscrire leur alimentation à l'auge et de les envoyer dans la parcelle le ventre vide. La rosée n'aura pas d'effet sur l'ingestion ni ne générera de problèmes métaboliques. « Cette règle s'applique une fois achevée la transition alimentaire de quinze jours à trois semaines effectuée au moment de la mise à l'herbe », précise Benoît Rouillé. Certes, si les accès aux paddocks ne permettent pas aux laitières de s'y rendre directement après la traite, elles devront attendre, devant une table alimentation vide, que la traite soit finie pour être relâchées. Le post-trempage des trayons protégera d'éventuelles contaminations bactériennes, celles qui seront tentées de se coucher. « Pour limiter ce temps d'attente, l'éleveur peut mettre en route le lavage de la machine à traire, puis accompagner son troupeau au champ et revenir nettoyer les quais », suggère-t-il. Le complément maïs sera apporté autour de la traite du soir. « S'il ne souhaite pas décaler l'heure de la traite, il peut avancer celle du retour des vaches à la stabulation. Elles finiront leur repas d'ensilage après la traite. »
RÉSISTER, EN FIN DE PADDOCK, AUX VACHES QUI « GUEULENT »
En fin de parcelle, la disponibilité en herbe baisse... et les vaches expriment leur mécontentement. La tentation est de céder en leur donnant plus de maïs-ensilage. « Si la hauteur d'herbe visée en sortie de parcelle (5 à 6 cm pour une hauteur à l'entrée de 10 à 12 cm en pleine pousse) n'est pas atteinte, il faut tenir bon. Augmenter la part de maïs prolongera la présence des animaux dans le paddock pour atteindre cette hauteur. C'est un cercle vicieux. Il est plus facile de résister en mettant le pâturage au coeur de sa stratégie. » L'alternative peut être de réduire le plat de maïs en début de paddock pour laisser une petite marge d'augmentation. De même, pour gérer plus facilement cette phase, mieux vaut des parcelles pour un pâturage jour et nuit de 3 à 4 jours à raison de 1 are/VL/j. L'agrandissement du troupeau sans celui de la surface pâturable peut certes remettre en cause ce repère. « Même si cela se traduit par plus d'ensilage de maïs par vache en cohérence avec la correction azotée (tableau ci-contre), cela n'empêche pas de travailler à une valorisation maximale de l'herbe pour limiter les gaspillages », rétorque le nutritionniste. De même, le souhait de produire plus au printemps et en été pour réaliser le prêt de quota annoncé n'est pas contradictoire avec le pâturage. Si l'éleveur choisit d'augmenter le lait par vache, il apportera, là aussi, 1 à 2 kg de maïs de plus le soir avec la correction azotée adéquate.
GÉRER L'AVANCEMENT DU SILO DE MAÏS
Un avancement du front d'attaque trop lent favorise son échauffement. De quoi inciter les producteurs à privilégier le maïs plutôt que le pâturage pour limiter ce risque. Pour éviter ce piège, l'idéal est de constituer un silo plus petit dédié à la saison de pâturage. Sinon, l'ajout d'un conservateur à la récolte peut contenir le phénomène de chauffe. « Ou alors accepter qu'on ait un peu de perte de maïs. »
SOUTENIR LES VACHES EN DÉBUT DE LACTATION
Cela concerne surtout les primipares qui vêlent au printemps. « En ration semi-complète, on peut ajouter 1 à 2 kg de concentré énergétique mais cela comporte un risque, avertit-il. Les primipares atteignent leur niveau maximal d'ingestion de 15 à 16 semaines, contre 12 semaines pour les multipares. La part de concentrés dans leur ration sera donc plus élevée, avec d'éventuels troubles métaboliques à la clé. » Il conseille plutôt d'être patient en respectant leur rythme... et faire confiance à l'herbe.
CLAIRE HUE
* www.eleveur-laitier.fr Rubrique « archives » n° 177 de février 2010
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