
En votant un projet de loi réprimant la négation du génocide arménien, l’Assemblée nationale a attisé les foudres du pouvoir turc. Les éleveurs de bovins viande, qui ont bénéficié, ces dernières semaines, d’une reprise des exportations vers la Turquie, pourraient être les premières victimes économiques de cet incident. Les JA et la Coordination rurale, notamment, s’en inquiètent.
![]() Depuis plusieurs mois, la Turquie constitue une destination non négligeable pour les animaux français vifs. (© Terre-net Média) |
Outre l’incident diplomatique que provoque l’adoption de ce projet de loi, la France n’est pas à l’abri de conséquenceséconomiques. Le 16 décembre 2011, avant le vote à l’Assemblée nationale, le premier ministre turc avait écrit à Nicolas Sarkozy pour le mettre en garde contre les « graves conséquences » qui pourraient découler de l'adoption de ce texte.
Les sanctions économiques que pourrait prendre la Turquie pourraient concerner en premier lieu les éleveurs français de bovins viande.
La Turquie, un marché prometteur d’animaux vifs
Les conséquences d’éventuelles restrictions à l’importation de viande française par la Turquie pourraient être importantes. En 2010, la Turquie, qui s’approvisionnait jusqu’alors auprès des pays d’Amérique du Sud, a ouvert son marché à la viande bovine et aux animaux vifs français. L’ouverture de ce nouveau marché a permis d’augmenter les exportations totales de bovins vifs de 10 % entre septembre 2010 et septembre 2011.
« Les expéditions d’animaux finis vers la Turquie ont ainsi atteint 9.200 têtes en septembre 2011 selon les douanes françaises, repris par FranceAgriMer. Elles se seraient poursuivies en octobre avec 16.200 têtes selon les douanes turques. »
Les syndicats inquiets
Face à la menace d’une fermeture partielle ou totale du nouveau marché turc, les éleveurs français se disent d’ores-et-déjà inquiets. « Les producteurs de viande bovine en France ont connu depuis plus de dix ans une crise profonde et dévastatrice, rappelle JA. Dans son communiqué, le syndicat indique que le vote de ce projet de loi « préoccupe les producteurs ».
En relation avec les importateurs turcs, la Fnb qui regroupe les éleveurs, se veut pour sa part « prudente ». « Pour l'instant il n'y a pas de répercussion sur l'export d'animaux. Mais on hésite à mettre en route des camions vers l'exportation » indique Guy Hermouet, premier vice-président de la FNB, dans une dépêche Afp.
Même son de cloche à la Coordination rurale. « Les producteurs de viande bovine craignent de se retrouver à nouveau dans la tourmente économique, souligne le syndicat dans un communiqué. Ce conflit, en l’état actuel de la position française, risque d’évoluer très rapidement en guerre économique au grand désavantage de la France. Les premières mesures de rétorsion adoptées par les Turcs pourraient porter sur les importations de bovins français. »
« Alors que la CR a soutenu ces derniers mois le Ministre de l’agriculture dans sa démarche de développement des exportations de viande bovine vers la Turquie, elle déplore cette situation politique qui dépasse totalement les agriculteurs tout en leur causant de graves préjudices. »
La CR « fait appel au sens des responsabilités des sénateurs et du Président de la République pour que soit évitée une crise majeure avec la Turquie, crise dont les producteurs de viande bovine français seraient les premières victimes innocentes ».
Export : le Sniv-Sncp dénonce l’arrêt du dispositif d’assurance-crédit Alors que seule la Coordination rurale a réagi aux tensions diplomatiques franco-turques en manifestant son inquiétude, le Sniv-Sncp fait part, dans un communiqué, d’un autre « coup porté aux exportations » de viande bovine. Selon le syndicat, les ministères de l’Economie et de l’Agriculture ont décidé de mettre fin au dispositif d’assurance-crédit export « Cap » (Complément d’assurance-crédit) à compter du 1er janvier 2012. Ce dispositif de soutien aux entreprises permet, depuis octobre 2009, la mise à disposition d’une ligne de crédit pour toutes les entreprises exportatrices. Ces dernières peuvent s’en servir pour couvrir le risque de défaillance des clients étrangers, dont les Etats acheteurs de viande bovine française comme la Grèce et la Turquie. En 2009, la ligne de crédit était de 1 Mds€ pour l’ensemble de l’industrie française, le coût de cette mesure pour l’Etat était, lui, de 50 M€. « La situation de l’assurance crédit-export reste très difficile sur de nombreux pays tout particulièrement en Europe, notamment en Grèce et en Turquie, selon le Sniv-Sncp qui demande au Gouvernement le maintien du dispositif pour 2012. Le fin de cette mesure risque de porter un coup d’arrêt aux exportations de viandes françaises, tant le dispositif d’encadrement des exportations est indispensable sur ces destinations. » |
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