En Australie, l’élevage bovin perd du terrain

En Australie, l’élevage bovin perd du terrain

L’essor de la production de bovins viande dans le monde est de plus en plus compromis pour des raisons climatiques et économiques. En Australie, dans le Queensland, les bovins viande sont la dernière production envisageable avant la désertification. Un article extrait de Terre-net Magazine n°22.


Feux de forêt dans le bush australien.Allumés sur des paddocks de 5.000 ha, les feux dirigés brûlent l’herbe lignifiée que le bétail n’a
pas consommée pour qu’ensuite une nouvelle flore, bonne à pâturer, repousse.(© Adrien Massit)
En Australie
Carte de l'Australie.
(© Terre-net Média)

Col Seiler, son fils Tom et son neveu Jeff à Proston (Queensland)

Nourrir 2.000 bovins en climat semi-aride

Destination l’Europe

Le marché européen est, pour l’Australie, une niche que peu d’éleveurs exploitent. Pourtant, il est porteur avec des prix de vente supérieurs de 15 % à ceux pratiqués sur l’île-contient. Col, Tim et Jeff ont exporté en 2012, comme chaque année, 700 carcasses de jeunes bovins de 16 mois (800 $AU l’unité soit 660 €) et de vaches de réforme (750 $AU l’unité soit 620 €), acheminées par bateau.

Les éleveurs privilégient l’Europe par rapport au Japon car ils ne sont pas pénalisés par la parité $AU/yen, qui rend la viande australienne chère. Mais, vendre en Europe empêche le recours aux hormones de croissance et oblige les producteurs à se soumettre à des règles de traçabilité strictes, du paddock où naît le jeune bovin à l’assiette.

Environ 90 mm de pluie en hiver. Ce chiffre suffit pour comprendre le défi que Col Seiler, son fils Tom et son neveu Jeff, de la Killara Cattle Company (Proston, Queensland), relèvent pour élever leurs 2.000 bovins (1.000 vaches baguées et leur suite de jeunes bovins) destinés à l’exportation vers l’Europe. L’été austral est marqué par des tempêtes tropicales, dévastatrices pour la végétation. Alors pour nourrir leur troupeau sur des paddocks peu fertiles, boisés d’eucalyptus, la solution miraculeuse est le Leucaena Leucocephala, appelé communément faux mimosa.

Cet arbre, originaire du Mexique, se développe très bien sous le climat du Queensland. Pâturé, il constitue une alimentation de grande qualité durant l’été (saisons inversées par rapport à l’hémisphère nord) avec des feuilles riches en protéines (24 à 32 % de matière sèche). Les 900 ha de faux mimosa fournissent suffisamment de fourrage pour nourrir jusqu’à deux vaches par hectare. Le gain de poids quotidien des jeunes bovins atteint même 1,7 kg. Depuis deux ans, le climat est plus propice à l’élevage. Auparavant, durant les années 2000, les épisodes de sécheresse à répétition limitaient la quantité de fourrage disponible.

Des forêts d’eucalyptus en pâture

Elevage de bovins en Australie.
Les animaux se nourrissent de "faux mimosa". Cet arbre, originaire du
Mexique, constitue un aliment de qualité dans des paddocks peu fertiles.
(© Adrien Massit)
L'hiver, les animaux parcourent librement la forêt d’eucalyptus. Mais, l’herbe qui pousse entre les arbres n’est pas suffisante pour nourrir les animaux, qui reçoivent des compléments alimentaires. Une fois planté (220 $AU/ha soit 180 €/ha), le Leucaena Leucocephala ne requiert pour produire du fourrage ni fertilisation, ni désherbage. Les parcelles de plus de 20 ans sont détruites et retournent à l’état sauvage. Elles sont remplacées par des paddocks nouvellement implantés.

Le faux mimosa nécessite, comme seul entretien, l’élagage des branches les plus hautes. Ainsi, les feuilles des arbres sont accessibles aux bovins. Et surtout, cela évite que les branches les plus élevées produisent des graines appréciées des oiseaux, qu’ils dispersent là où ces arbustes ne sont pas désirés. Au final, pour Col, Tom et Jeff, les achats de compléments alimentaires durant l’hiver (graines de coton, mélasse et urée), pour combler le déficit fourrager, représentent les charges d’élevage les plus importantes. L’avantage des graines de coton : elles ne sont pas très chères, se conservent bien et présentent des qualités nutritionnelles intéressantes (23 % de protéines, 25 % de fibres).

Feux de forêt contrôlés

Stagiaire incendiaire ?

Brûler 5.000 hectares de forêt est une expérience inoubliable pour un jeune stagiaire français en Australie. Une expérience qu’il pouvait difficilement imaginer vivre. Témoignage : « L’opération a été conduite en équipe, toujours en "contact radio". Autour de la zone à brûler, nous avons vérifié que les routes étaient en bon état, sans arbres au sol, pour éviter que le feu se propage à l’extérieur. Puis, une torche à la main, nous avons allumé le feu en s’assurant qu’il ne sorte pas de l’aire délimitée au préalable. Ceci dit, ces feux contrôlés se transforment parfois en gigantesques incendies, qui détruisent des centaines d’hectares. »

Pour régénérer les sous-bois, les trois éleveurs ont recours aux feux de forêt contrôlés. Une technique qu’utilisent couramment les éleveurs dans cette partie du bush australien. Col, Tom et Jeff la pratiquent tous les trois ans sur chaque paddock. Allumés sur des paddocks de 5.000 ha, ces feux dirigés brûlent l’herbe lignifiée que le bétail n’a pas consommée pour qu’ensuite une nouvelle flore, bonne à pâturer, repousse. Les forêts ainsi "nettoyées" sont protégées des incendies dévastateurs, durs à maîtriser dans de si vastes étendues boisées.

 

Toutefois, les éleveurs font semblant d’ignorer que l’agriculture sur brûlis accélère l’érosion des sols. Peut-être parce qu’ils ne sont pas propriétaires des 25.000 ha de forêt mis à leur disposition par l’Etat, qui ne peuvent de toute façon pas avoir d’autre usage qu’être pâturés par le bétail.

Attaques de tiques

Eleveur australien de bovins.
Les 2.000 bovins de l’exploitation sont destinés
à l’exportation vers l’Europe. (© Adrien Massit)
Outre les compléments alimentaires, les deux autres principaux postes de charges de l’exploitation sont le diesel utilisé pour se déplacer sur la ferme en moto ou en quad et les attaques de tiques sur les bovins. Ce parasite, difficile à éradiquer, peut transmettre plusieurs maladies, dont la "tick fever" (fièvre de tique), qui affectent fortement le bien-être des animaux et réduisent leurs performances de production.

La majorité des fermes du Queensland sont confrontées à ce problème. Aussi, le gouvernement australien a mis en place des normes sévères concernant le transfert de bétail entre élevages de cet Etat. Ces mesures coûtent environ 10 M$AU, rien que pour les contrôles. En 2005, les exploitations de la région ont perdu pour 70.000 $AU d’animaux et les paddocks infectés ont été mis en quarantaine pendant un an.

 

Cet article est extrait de Terre-net Magazine n°22

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