
Successeur d’Olivier Besancenot, Philippe Poutou, le candidat du Npa à l’élection présidentielle 2012, répond aux questions posées par les agriculteurs sur les forums de Terre-net Média. A travers ses réponses, le candidat communiste dévoile sa vision de l’agriculture française.
Les questions ci-dessous auxquelles Philippe Poutou a répondu sont extraites des forums de terre-net.fr, élevage-net.fr et viti-net.fr.
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![]() Pour Philippe Poutou, candidat du Nouveau parti anticapitaliste à l'élection présidentielle 2012, les travailleurs, qu'ils soient ouvriers d'usine ou agriculteurs, doivent s'unir pour un même combat: lutter contre "les gros capitalistes et la concentration des richesses", même dans le secteur agricole. (© Terre-net Média) |
La France doit-elle sacrifier son excédent commercial de près de 12 milliards d'euros pour rendre son agriculture plus écolo-compatible ? |
Philippe Poutou: C'est une question, qui dans sa forme, ressemble étrangement à : « le nucléaire ou la bougie ? ». En gros, on est sérieux, ou on s'amuse...On brasse 12 milliards, ou on repeint la France en vert... La contradiction insurmontable qui apparaît en filigrane dans la question, mérite d'être nuancée. |
Plusieurs formes d'agriculture peuvent-elles coexister avec des secteurs orientés à l'export et vers l'agro-industrie et, d'autres orientés sur les circuits de proximité ? Ou bien sont-ils incompatibles ? |
Philippe Poutou: L'agriculture duale est la réalité d'aujourd'hui. Mais un système entend prédominer, c'est celui de l'agriculture industrielle. La tendance lourde est la concentration de l'outil de travail, et du soutien financier, entre les mains d'exploitants de moins en moins nombreux. Il faut infléchir cette dérive ruineuse au plan humain, financier, écologique. |
La PAC fête ses 50 ans. Son bilan est-il positif ? |
Philippe Poutou: Comment pourrait-il l'être ? En Europe, une ferme cesse son activité toutes les 3 minutes, toutes les 20 minutes en France. Des millions de paysans européens ont quitté le métier, d'autres millions sont dans la mire. La moitié des paysans français sont sous-smicards, et pour bon nombre d'entre eux, vivent en dessous du seuil de pauvreté. L'agriculture productiviste, enfant choyé des institutions, s'est installée solidement, attirant à elle, les flux de l'argent public. Intensification maximum en certains endroits, déprise agricole, désertification, pauvreté en d'autres. L'environnement est très sérieusement malmené par les pratiques de l'agro-business. Les marchés sont secoués par des crises à répétition, notamment de surproduction, et sanitaires. Volatilité ou baisse des prix insoutenables, spéculations sur les denrées, prix ne couvrant pas les coûts de production et les revenus, primes injustement réparties, autant de raisons d'invoquer une faillite de l'outil Pac. |
La réforme de la PAC, telle qu'elle se profile, se traduirait par de fortes baisses des aides à l'élevage alors que les revenus des producteurs sont les plus faibles. Comment comptez-vous y remédier ? |
Philippe Poutou: D'abord, il convient de rappeler que le métier d'éleveur est très prenant, et ne serait-ce qu'à ce titre, il mériterait d'être mieux considéré. Autrement dit, une politique de garantie des prix de vente devrait lui être appliquée, pour soutenir le revenu. Comment imaginer qu'après le désinvestissement des institutions et de leur soutien, le revenu des éleveurs ne soit pas amené à chuter plus encore ? |
L'euro est-il l'ennemi d'une PAC forte, régulée permettant des prix rémunérateurs pour les agriculteurs ? |
Philippe Poutou: L'euro, tout comme le franc auparavant, a bon dos. Il n'est que l'outil que la bourgeoisie européenne a mis en place pour matérialiser les échanges de richesses. Pauvre en euro ou en franc, qu'est ce que ça change ? Sa valeur change-t-elle à ce point nos vies? |
Le retour au franc et à la souveraineté monétaire sont-ils la solution aux problèmes des agriculteurs et à la faiblesse de leurs revenus ? |
Philippe Poutou: Nous ne faisons pas de fétichisme de la monnaie. Le franc nous importe donc peu, voire pas du tout ! Ceci dit, il est intéressant de comparer avec l'euro, ce que touchent d'aides européennes, dans des conditions de production égales, des producteurs polonais et français, par exemple... Là, nous pouvons constater l'inégalité de traitement. Y aurait-il des agriculteurs de seconde zone en Europe ? |
Êtes-vous favorable à la réaffirmation d'un prix minimum pour les principaux produits agricoles ? |
Philippe Poutou: Absolument, les producteurs n'ont pas à être les victimes des faiblesses et effondrements de cours, rôle souvent partagé d'ailleurs, avec les consommateurs. Leur revenu doit être protégé des aléas des marchés. L'idéal serait que ces prix soient négociés sous l'autorité de l'Etat, avec les professionnels de la filière, et les producteurs. |
Êtes-vous favorable à la suppression des quotas laitiers, d'une part, des droits de plantation de vigne, d'autre part, et plus généralement aux dispositifs européens de régulation de l'offre ? |
Philippe Poutou: Nous sommes partisans d'une maîtrise de la production en Europe. Appelez ça quotas si vous voulez. Nous pensons donc, qu'il est important de répartir les volumes de production, de garantir des prix rémunérateurs qui ont un lien direct avec les coûts de production. Nous nous opposons au marché, imprévisible, qui déstabilise les populations, les travailleurs, qui n'offre aucune perspective fiable à plus ou moins long terme, et qui n'a pour seul but que de continuer à enrichir les plus riches... |
Êtes-vous favorable à une représentation de tous les syndicats dans toutes les organisations professionnelles ? |
Philippe Poutou: La démocratie, cela ne se saucissonne pas. Tous les syndicats peuvent prétendre légitimement à siéger dans les organisations professionnelles. |
Au regard de la faiblesse des retraites agricoles, envisagez-vous une refonte du régime social agricole. Êtes-vous pour une convergence vers le régime général ? |
Philippe Poutou: Chaque année, des transferts financiers ont lieu entre le régime général et le régime social agricole déficitaire. Le mutualisme qui a connu par le passé une époque faste, avec des contributeurs nombreux, rencontre aujourd'hui des difficultés. Ce sera pire encore, si rien n'est entrepris. La solution c'est la fusion. |
Êtes-vous favorable à une TVA sociale pour financer l'ensemble de cette protection sociale du secteur agricole ? |
Philippe Poutou: Ce que vous appelez TVA sociale est en réalité une TVA anti-sociale. En l'attente d'une fusion des différents régimes, c'est la solidarité qui doit jouer. Et ceci sur la base de l'impôt sur le revenu, qui est plus justement réparti, qu'une TVA appliquée à tous, sans discernement. |
Souhaitez-vous le plafonnement des exploitations les plus importantes et la redistribution des surfaces vers les plus petites, pour favoriser l'emploi ? |
Philippe Poutou: Tout à fait. Il s'agit de distribuer l'outil de travail le plus justement possible, au plus grand nombre. Chacun connait dans ses environs, un exploitant accapareur qu'aucune commission départementale n'arrête. Les dents longues, il a faim de terre. Son agrandissement, ferme après ferme, par tous les moyens, est la cause de l'impossibilité d'installation pour d'autres. Il draine l'aide publique, trouvant là le concours financier de la collectivité pour poursuivre sa conquête d'hectares. Les volumes aussi sont à arrêter à des fins de redistribution... |
Souhaitez-vous limiter le prix des terres agricoles pour favoriser l'installation ? |
Philippe Poutou: Oui. Pas seulement pour l'installation, mais aussi pour consolider une exploitation. La vente de terres devrait faire l'objet d'un marché administré, avec évaluation, et application des prix encadrés, sans aucun dessous de table, cela va de soi! |
La reprise des exploitations agricoles va être un déni pour l'agriculture au cours de la prochaine décennie. Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre pour encourager les jeunes à s'installer en agriculture ? |
Philippe Poutou: Nous pensons que l'Etat, au travers d'une commission paritaire, devrait se porter acquéreur de fermes se libérant, afin de les rétrocéder, à des jeunes notamment, sous forme de baux de carrière. L'exploitant rentre dans les lieux, paie son loyer, n'a donc pas de foncier à acheter. Il s'évite de grever son revenu par des annuités de remboursements trop élevées. En fin de carrière, s'il a amélioré l'exploitation, il est indemnisé, s'il l'a dégradé, il est soumis au paiement d'un défraiement. |
Les règles environnementales sont sources de distorsion de concurrence. Souhaitez-vous mettre un terme à la surenchère française en la matière par rapport à ses voisins européens ? Ou, au contraire, souhaitez-vous défendre une harmonisation par le haut des règles sociales et environnementales en Europe ? |
Philippe Poutou: Le problème n'est pas que nous en fassions trop , mais que les autres n'en fassent pas assez ! Effectivement, ailleurs, avec un niveau d'exigence en la matière, moindre, cela représente une distorsion de concurrence. La réponse est donc contenue dans la question. Oui, nous sommes pour une harmonisation par le haut des règles sociales et environnementales européennes. |
Les agriculteurs irrigants se plaignent des contraintes environnementales et des démarches administratives qui limitent leurs possibilités d'usage de l'eau. Êtes-vous prêt à assouplir la loi sur l'eau ? |
Philippe Poutou: Il y a des limites à tout. Les rivières n'ont pas un débit constant et de nature à satisfaire les appétits de chacun. L'eau des rivières et des nappes est un bien vital qui se partage avec les autres usagers. L'irrigation massive ne fait pas partie de son cycle naturel, perturbe les équilibres écologiques. Nous pensons que plutô que d'envoyer tout le monde pomper dans la ressource, sauf nécessité, il serait préférable de semer des variétés plus rustiques, moins productives, ce handicap étant pallié par des aides. Ces aides financières seraient pleinement justifiées, au titre de la solidarité nationale avec les zones agricoles difficiles, et au maintien de l'activité agricole. |
Faut-il soutenir la production d'énergie par les agriculteurs, via la valorisation de la biomasse (méthanisation) ou de l'énergie solaire (photovoltaïque) ? Comment ? |
Philippe Poutou: Tout ce qui peut être créé sur la ferme, et qui est susceptible de générer une valeur ajoutée, doit être mis en œuvre. De surcroît, pour sortir du nucléaire, énergie ruineuse et dangereuse, nous devrons nous appuyer sur des projets d'envergure (éolien off-shore et terrestre, géothermie, hydraulique, cogénération, etc...) et sur d'autres, à plus petite échelle. Il est dommage que les engagements de l'Etat sur l'achat, et les aides à l'installation aient été revus à la baisse, rendant moins attractive la démarche. Entre monter une unité de méthanisation dans la cour, poser des panneaux solaires sur un bâtiment, ou stocker dans le jardin, 2 ou 3 m3 de déchets fortement radioactifs pour 100 000 ans... Il n'y a pas photo ! |
Dans le cadre de la politique énergétique, êtes-vous favorable au développement des bio-carburants ? Souhaitez-vous maintenir les objectifs français en la matière ? |
Philippe Poutou: Nous sommes opposés au développement des agrocarburants. D'ailleurs nous préférons les appeler ainsi, plutôt que biocarburants, terme d'autant plus ambigu, que ces carburants, loin d'être bio, sont plutôt issus de la plus industrielle des agricultures... Le bilan énergétique de ces carburants est nul, voire pire. C'est l'exemple même de la fausse bonne solution verte. Surtout si nous considérons les surfaces retirées de l'alimentation, pour faire rouler nos bagnoles. Une partie de l'offre alimentaire est détournée vers un autre secteur, renchérissant les prix des denrées. A l'exemple du maïs mexicain et nord américain, utilisé en "essence", et qui a provoqué la hausse du coût de la tortilla et les émeutes qui s'en suivirent. |
Êtes-vous favorable au développement des cultures OGM en Europe et à leur introduction en France ? |
Philippe Poutou: Les multinationales de l'agrobusiness (semences, pesticides,...) veulent nous imposer notre alimentation par le biais des semences qu'elles brevètent et commercialisent. Elles entendent mettre au pas les agriculteurs du monde entier, les empêcher de resemer leur production. Ces firmes capitalistes détruisent la souveraineté alimentaire des pays les plus pauvres, en faisant courir d'énormes risques aux écosystèmes. |
Approuvez-vous l'adoption de la loi sur les certificats d'obtention végétale qui autorisera, notamment, les semenciers à demander une participation financière des agriculteurs pour la recherche végétale ? |
Philippe Poutou: Parce que, quand les gros semenciers font des bénéfices, ils nous en redistribuent ? Le gag ! C'est pourtant nous qui devrions leur demander quelque chose pour le travail de sélection, sur lequel ils s'appuient, accompli par des générations et des générations de paysans, depuis le néolithique, jusqu'aujourd'hui ! |
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