Les ovins sous le joug des vaches laitières

Les ovins sous le joug des vaches laitières

La filière ovine néo-zélandaise doit aujourd’hui faire de la place non seulement à la filière laitière, mais aussi à la forêt. Depuis 1984, date d’arrêt des aides publiques, elle ne cesse de subir les assauts de la filière laitière qui a triplé en 30 ans. Mais avec les nouvelles contraintes environnementales, la tendance devrait ralentir.

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« La production ovine et bovine allaitante néo-zélandaise
est prise en tenaille entre le développement du lait et l’avancée
de la forêt, par reboisement naturel ou plantations. »
(© Terre-net Média)
Avec un territoire grand comme le Royaume-Uni et une population de 4,3 millions d’habitants seulement, la Nouvelle-Zélande est un pays où l’agriculture procure 7 % du Produit intérieur brut (Pib) et emploie plus de 8 % de la population active. 

Par comparaison en 2005, l’agriculture en France représente 2 % du Pib national et emploie environ 3,5 % de la population active d’après le site Statistiques mondiales.

Idéal pour les prairies et les ovins

La Nouvelle-Zélande est composée de deux îles représentant 27 millions d’hectares, couvertes à 29 % par de la forêt et disposant de 55 % de Sau « dont 75 % sont des prairies, en majorité permanentes », explique Anne Mottet (Geb-Institut de l’élevage).

Les conditions météorologiques sont par ailleurs particulièrement favorables au pâturage, comme l’indique le potentiel de production qui peut atteindre 13 tonnes de matières sèches valorisées par hectare dans les zones de plaines.

La Nouvelle-Zélande est de fait un pays traditionnellement producteur d’ovins, « avec un développement très rapide au 19e siècle » rappelle Anne Mottet.

 l’époque, l’exportation de laine était particulièrement développée. Avec l’arrivée des congélateurs sur les bateaux, il ne fallut guère de temps aux néo-zélandais pour se mettre à exporter également de la viande. Une position de leader qu’elle conserve d’ailleurs aujourd’hui, la Nouvelle-Zélande « étant le premier exportateur mondial de viande ovine ».

Triplement en 30 ans

L’élevage bovin n’a pas suivi la même tendance. Jusque dans les années 1980, la filière restait limitée, mais la suppression des aides publiques à l’agriculture en 1984 a incité les agriculteurs à investir la filière laitière. 

Ce qu’il faut retenir

La production ovine et bovine allaitante néo-zélandaise est prise en tenaille entre le développement du lait et l’avancée de la forêt, par reboisement naturel ou plantations.

Cependant, elle résiste tout de même; jusqu’à présent du moins, car les volumes restent stables (jusqu’en 2009, année de sécheresse), les éleveurs dynamiques, et les débouchés à l’exportation se diversifient, notamment à destination de l’Asie.

Aujourd’hui, l’expansion laitière fait désormais face aux contraintes environnementales. Les 3% de croissance annuelle envisagés par la filière apparaissent aujourd’hui irréalisables.

En outre, à l’exception du Southlands, où des terres adaptées à la production laitière peuvent encore être converties, l’expansion géographique semble avoir atteint son maximum.

Coté aval, la stratégie d’implantation et d’alliance un peu partout dans le Monde sécurise les débouchés et renforce le contrôle du marché des commodités, débouché principal pour la production néo-zélandaise.

Résultat, entre 1980 et 2008, la production de lait de la Nouvelle-Zélande a été multipliée par trois et le pays est désormais le 2e exportateur mondial, derrière l’UE, avec une production de 16,573 millions de tonnes de lait exportées à 96 %, soit 37 % des échanges mondiaux. 

« Aujourd’hui, les éleveurs allaitants traversent une crise de revenus et résistent difficilement à la poussée du lait », précisait Anne Mottet.

C’est pourquoi, l’Institut de l’élevage a souhaité affiner les évolutions de ces deux secteurs en lançant une étude. « Le premier objectif est de dresser un bilan de ces évolutions, le second de proposer un diagnostic sur l’évolution future des équilibres entre les filières », explique-t-elle. L’étude s’est donc appuyée d’une part, sur l’analyse de données statistiques du pays, d’autre part, sur une mission de terrain qui s’est déroulée en novembre 2009.

Le nombre d’élevage divisé par deux

Les productions de viandes rouges (bœuf et agneau majoritairement) et de lait de vache sont exportées à plus de 90 %. Depuis une vingtaine d’années, les équilibres territoriaux et économiques mais aussi sociaux, entre ces deux types de production sont bouleversés. « La production de viande ovine, qui était parvenue jusqu’alors à se maintenir grâce à des gains importants de productivité, est désormais en baisse depuis la suppression des aides publiques à l’agriculture », cette baisse ayant par ailleurs profité amplement à la filière laitière.

Preuve en est : le nombre d’élevage allaitants professionnels est passé de 22.000 en 1984 à 12.800 en 2008.

À l’inverse, la filière laitière connaît un développement qui semble sans limite et plus de 800.000 ha ont été convertis à cette production entre 1990 et 2010, soit une progression de surfaces de près de 60 %.

Contraintes environnementales

Mais ces profondes mutations ne se sont pas faites sans affecter le pays, notamment au niveau environnemental. Comme l’explique Anne Mottet, l’image « clean and green » défendue depuis de nombreuses années par le pays, en particulier à l’export, commence à pâtir des changements opérés ces dernières décennies, même si les éleveurs font tout pour maintenir cet atout.

Ainsi, l’augmentation de la productivité et le recours à l’irrigation se heurtent aux nouvelles contraintes environnementales : teneurs en nitrate et en phosphore, gaz à effet de serre, qualité de l’eau, réchauffement climatique, consommation d’énergie, préservation de la biodiversité…

« La filière laitière veut toutefois préserver son image et d’une façon générale, la Nouvelle Zélande est très sensible à la qualité environnementale de son territoire : c’est un pays très visité et le tourisme représente un chiffre d’affaires similaire à celui du secteur laitier. »

Conséquence parmi d’autres, les autorités publiques ont dû réglementer cet accès à l’eau pour l’irrigation, que ce soit au niveau des prélèvements dans la nappe ou sur l’ensemble des prélèvements d’eau : « ils doivent être réduits de 20 % par rapport aux prélèvements actuels ».

Objectif de réduction : - 1,3 % par an

De même, la Nouvelle-Zélande, signataire du protocole de Kyoto, s’est fixé pour objectif de réduire de 25 % ses émissions de Ges. « Au cours des 15 dernières années, la réduction du cheptel ovin n’est pas parvenue à compenser l’accroissement du cheptel laitier sur le plan des émissions de gaz à effet de serre car celles ci ont augmenté de l’ordre de 10 % entre 2006 et 1990. Dans le secteur laitier, les émissions de Ges ont quasiment doublé » note Anne Mottet.

Résultat, le nouveau gouvernement vient de décider de mettre en place un système d’échanges d’émission. À partir de 2015, les secteurs concernés devront réduire leurs émissions de 1,3 % par an et rentreront dans le marché des droits d’émission.

Ce programme va obligatoirement impacter le secteur laitier et l’obliger à mettre en œuvre des mesures d’atténuation et/ou d’achats de droits d’émission, y compris en encourageant la plantation d’arbres. « L’essor laitier se heurte donc aux régulations environnementales et pourrait être fortement ralenti dans les prochaines années », conclue Anne Mottet.

 

Pour aller plus loin

La filière laitière en Nouvelle Zélande : lire ici
Institut de l’élevage : www.inst-elevage.asso.fr.
Journée 3R : www.journees3R.fr

 

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