
Selon Pierre Begoc, directeur executif Europe de l’Est de la société Agritel, les productions laitières et hors sol de l’Ukraine en particulier, mais aussi de la Russie, évoluent de manières très différentes. Il nous explique pourquoi, selon lui, « le hors sol se développe en vue d’une production de protéines en cycle court, alors que la production laitière est sinistrée ».
![]() Pour l’instant, le manque de liquidités et de trésorerie pour investir, mais surtout l’absence de main-d’œuvre qualifiée, limitent la progression du secteur. Sans mesures concrètes prises par le gouvernement pour la production laitière, les investisseurs auront du mal à se projeter (© Terre-net Média) |
De plus, le marché est très demandeur en poudre et en beurre entre le mois d’octobre et le mois de mars et la production en hiver, très saisonnière, ne couvre pas les besoins des industriels. Le lait abonde au mois de mars avec la pousse de l’herbe et les vêlages de printemps. La collecte a lieu dans les villages deux fois par jour et les industriels profitent du pic de production pour stocker et sécher la poudre et le beurre dont ils auront besoin en hiver. « Aujourd’hui, l’Ukraine produit 11 milliards de litres de lait dont 60 % passent dans les canaux classiques de la transformation et 40 % sont auto-consommés ou vendus sur des marchés de proximité. »
Un fort besoin en investissements
Au temps du communisme, ce pays produisait 21 milliards de litres de lait par an. « Avec la chute du communisme, la production s’est effondrée du jour au lendemain. Les gens ont récupéré les vaches des fermes d’état et les ont utilisées pour leur consommation. Aujourd’hui, l’élevage souffre d’une décapitalisation, d’un manque de savoir-faire et de moyens, car l’élevage demande plus de capitaux qu’une installation en grandes cultures. » Pourtant le marché existe et les consommateurs sont présents. La crise a poussé les industriels à retailler leurs parts de marché, à restructurer, pour limiter les dégâts. « Après la crise, l’avenir de la production laitière ukrainienne passera forcément par une transformation forte, une professionnalisation du secteur, pour que les producteur se rendent compte du potentiel de rentabilité du marché du lait. » En effet, l’hiver une ferme qui livre deux tonnes de lait par jour à une entreprise privée ou un transformateur, avec une qualité égale au standard européen, peut se voir payer sa production 37 centimes d’euro le litre.
Une production hors sol performante
« Concernant la production hors sol, le constat est totalement différent. Ici la machine industrielle est bien rodée et les indicateurs sont à la hausse. » La production porcine est une production historique en Cei. La consommation de viande de porc par habitant est supérieure à celle des français et, contrairement au lait, les éleveurs possèdent le savoir-faire et connaissent la génétique.
La volaille, la protéine la moins chère sur le marché, a continué à décoller pendant la crise, et la consommation par habitant progresse. De gros groupes industriels émergent, responsables de 80 % (les cinq premiers) de l’abattage et de la commercialisation des volailles sur le marché ukrainien. Le plus grand groupe, Mironovsky Khleboprodukt Cjsc, représente à lui seul 45 % de l’offre de poulets de chair du marché.
Pierre Begoc décrit une situation assez simple. « C’est une intégration verticale totale. Ces groupes possèdent les infrastructures nécessaires pour produire les céréales consommées par les poulets qui seront abattus dans leurs usines, commercialisés sous une marque du groupe et livrés en magasin par la logistique du groupe. »
Pour le porc, les acteurs travaillent à l’échelon régional. Quelques structures importantes émergent, souvent avec des capitaux ukrainiens ou russes, mais pas forcément agricoles.
L’agriculture, nouveau fleuron de l’économie ukrainienne
« Dans cette production, et dans l’agriculture en général, les capitaux arrivent massivement, car l’agriculture a retrouvé ses lettres de noblesse pendant la crise. En effet, l’export ukrainien s’est écroulé en sidérurgie et, pour que le pays puisse rester présent sur la scène mondiale, quoi de mieux que l’agriculture et les produits agricoles ukrainiens pour rester en tête d’affiche. »
Les filières porcine et poulet de chair se restructurent aussi grâce à l’émergence des grandes surfaces. Tesco projette de s’installer, Auchan et Métro sont déjà bien implantés. Ces grandes chaînes sont exigeantes et réclament un approvisionnement constant en produits de qualité standard et homogène. « Par ailleurs, des groupes danois semblent vouloir s’implanter, principalement en abattage de porcs et, comme en Pologne, ils vont au fur et à mesure descendre vers la production et remonter vers l’aval. » Le maillon fort restera la transformation, pour injecter des capitaux dans la production et rénover les bâtiments, aider les producteurs à aller vers une G3T plus efficace et éliminer partiellement les contraintes logistiques.
Retrouvez les palmarès des concours bovins du Space 2025
Dans le Cotentin, « nous vivons avec 30 vaches et 30 hectares chacun »
270 000 vaches dans le désert algérien, est-ce vraiment possible ? Un agronome décrypte
Madison sacrée grande championne Holstein sur le ring du Space 2025
Logiciel, lactosérum, pailleuse… 4 inventions d’éleveurs primées au Space
« Pas d’agriculture sans rentabilité ! », rappelle la FNSEA
La FNSEA appelle à « une grande journée d'action » le 26 septembre
Face à une perte de compétitivité inédite, accompagner davantage les agriculteurs
Comment préparer une vache à la césarienne
Le Grand Ouest met la main à la poche pour la recapitalisation bovine