Pour les éleveurs réunis jeudi au marché du porc de Plérin, la référence au niveau national, la pression de la grande distribution sur les prix accentue la crise du secteur, liée avant tout à la flambée du coût du fourrage.
"Les cours du porc ont baissé de 10% en 2007. Les consommateurs auraient dû en voir la couleur. Où est passé la baisse?", s'interroge Jean-Marc Guillot, qui élève 120 truies à Noyal (Côtes d'Armor), peu avant l'ouverture du marché au cadran qui se tient tous les lundi et jeudi.
Cette question est redevenue d'actualité cette semaine avec la polémique lancée par une étude de l'Institut national de consommation (Inc), qui a notamment relevé une hausse de 44% pour le jambon blanc "supérieur" entre novembre et janvier. "On a entendu tout et n'importe quoi ces derniers jours y compris de la part des politiques", juge Jean-Pierre Joly, le directeur du marché au cadran pour le porc, le seul de France. Si "on peut reprocher à la grande distribution de ne pas répercuter les baisses de cours", on ne peut pas dire que le prix de la viande augmente beaucoup dans les rayons, souligne-t-il.
Le président Nicolas Sarkozy a pourtant affirmé ne pas "comprendre" que "le prix qu'on verse aux producteurs de porc diminue" tandis que "le prix du jambon explose". Dans la foulée, le gouvernement a même lancé une enquête pour une "opération coup de poing" contre les hausses de prix. "Mais ces chiffres, le gouvernement les a déjà. Car, selon les statistiques officielles, le prix du marché au cadran a baissé de 27% à 1,06 euro/kg entre août 2006 et mi-février 2008, tandis que la barquette de 1 à 3 côtes de porc restait stable et que celui du rôti de porc augmentait de 1% à 7,23 euros", détaille M. Joly.
Soupçons contre l'Etat...
Pour les éleveurs, l'origine de cette crise "sans précédent" est avant tout liée à la flambée de la nourriture du bétail qui a augmenté les coûts de revient. Au prix actuel des céréales, les éleveurs de porc doivent vendre leur bête à 1,60 euro le kilo pour commencer à gagner de l'argent. Or jeudi le cours moyen a été de 1,152 euro (en hausse de cinq centimes), soit 1,28 euro dans la poche du producteur avec les primes. Depuis l'an dernier, "je perds plus de 30 euros par porc produit. Je veux bien travailler plus, mais pas pour perdre plus", explique M. Guillot. Outre le prix des céréales, le marché du porc européen souffre d'être "autosuffisant à 107%", relève M. Guillot. "L'offre de porc va devoir baisser sur le marché européen. C'est en train de se faire. Les cours vont remonter cette année et l'année prochaine", prévoit M. Joly.
"Mais entre-temps il y aura eu de la casse chez les éleveurs". "On estime que 15.000 emplois directs sont menacés en France", affirme Carole Joliff, responsable "porcs" des Jeunes agriculteurs (Fnsea). Les éleveurs, qui ont bloqué la rocade de Rennes la semaine dernière, réclament de nouvelles aides européennes à l'exportation pour compenser les normes sanitaires environnementales auxquelles sont soumises les Européens ainsi que la force de l'euro qui les pénalise. M. Guillot ne se fait toutefois pas d'illusion. Il soupçonne l'Etat de "laisser durer la crise" dans l'espoir que la production baisse et, avec elle, la pollution des rivières par les déjections animales, qui a valu à la France plusieurs rappels à l'ordre de Bruxelles.
« J’ai opté pour un système très simple car c’est rentable »
Réformer ou garder ? 26 éleveurs dévoilent leur stratégie de renouvellement
Le vêlage 2 ans n’impacte pas la productivité de carrière des vaches laitières
« J’ai gagné presque un mois d’IVV grâce aux colliers de détection de chaleur »
270 000 vaches dans le désert algérien, est-ce vraiment possible ? Un agronome décrypte
« Pas d’agriculture sans rentabilité ! », rappelle la FNSEA
La FNSEA appelle à « une grande journée d'action » le 26 septembre
John Deere, Claas, made in France… À Innov-Agri, il pleut aussi des nouveautés
T. Bussy (FNSafer) : « Beaucoup de monde pense que la Safer, c’est opaque »
Quelles implications environnementales de la proposition de l’UE pour la Pac ?