Le vêlage à 2 ans : un gain économique de 80 € par Ugb

« En France, le vêlage à deux ans est quasiment inexistant au niveau du troupeau allaitant, il représente moins de 1% des vêlages », présente Philippe Arzul, docteur vétérinaire, spécialiste en nutrition dans le Rhône (*). Peu pratiqué, jusqu’à présent peu étudié, des recherches récentes montrent qu’il peut intéresser certaines exploitations, dont le niveau génétique et la maîtrise sanitaire et alimentaire sont suffisants. A la clé, il y un creuset de rentabilité pour l’élevage, avec en moyenne un gain de 80€ par UGB. La clé essentielle de cette conduite sera dans la maîtrise alimentaire et sanitaire car il faut atteindre des poids importants au sevrage, à l’insémination et au vêlage. Dans ce schéma, le contrôle de croissance est obligatoire. Les repères sont un minimum de 350 kg de poids au sevrage et un poids de 500 kg à l’insémination à 15 mois!  L’obtention de ces poids est nécessaire pour maintenir les mêmes taux de gestation à 24 mois.

« Les difficultés de vêlage et la mortalité des veaux ne sont pas accentués avec le vêlage 2 ans », souligne philippe Arzul (© Web-agri)

Si certaines raisons invoquées par les éleveurs pour ne pas choisir le vêlage à deux ans s’avèrent juste, telle qu’un léger écart de poids de carcasse lors de la réforme des vaches (15 kg en moins pour des réformes de 6-7 ans), les autres freins (fécondité, croissance des veaux, facilité de vêlage) semblent ne pas se justifier ni au plan technique, ni au plan économique. « Des recherches faites en Oklahoma (Etats unis) ont montré que, pour qu’une vache produise une quantité maximale de kg de veaux dans sa vie, elle doit donner un veau dès l’âge de deux ans : les génisses allaitantes qui vêlent à deux ans produisent dans toute leur vie 150 kg de veau de plus que les génisses qui ont fait leur premier veau à trois ans», présente Philippe Arzul

Une productivité supérieure pour le vêlage 2 ans

En France, la ferme de Jalogny (71) conduit des essais depuis 1999 en menant une moitié de troupeau en vêlage à 2 ans, et l’autre moitié en vêlage à 3 ans, pour un taux de renouvellement identique de 30%.

Les résultats de ces essais, qui ne sont pas encore validés, tendent à montrer que les difficultés de vêlage et la mortalité des veaux ne sont pas accentués avec le vêlage 2 ans. Les performances des veaux et leur croissance seraient globalement identiques quel que soit l‘âge au vêlage des génisses. Par ailleurs, il semblerait que la productivité soit favorable à la conduite vêlage deux ans. D'après une première approche qui reste à affiner et à valider la production de viande par Ugb semblerait meilleure pour l‘option du vêlage à deux ans. Si les performances de reproduction se détériorent sur génisses et primipares vêlage 2 ans, le taux de gestation des génisses est supérieur à 93% lorsque le poids au sevrage dépasse 340 kg et le poids à la mise à la reproduction dépasse 470 kg poids vif. “ La finalisation de ces travaux donnera lieu à une analyse d'intérêt à l'échelle du troupeau,  menée par la Chambre d’agriculture de Saône et Loire et l’Institut de l’élevage, incluant une analyse économique ”, précise Julien Renon, en charge du suivi des expérimentations menées à Jalogny. Des résultats qui sont attendus pour la fin de l’année.

un gain de 12 000 € par an 

 Philippe Arzul, consultant vétérinaire chez NBVC (Nutrition Biochimie Vétérinaires consultants) a conduit des simulations afin d’évaluer l’intérêt économique du vêlage à 2 ans, dans le cas d‘élevages dont la maîtrise sanitaire et alimentaire autorise cette conduite.
“ Pour un troupeau de 100 mères charolaises avec un taux de renouvellement de 25%, le passage de la conduite du vêlage de trois ans à deux ans autorise un gain de 12 000 € par an ”, présente Philippe Arzul (voir tableau) et un gain de 220€ par génisse élevée. Le spécialiste souligne que la condition technique pour cette réussite sera dans la maîtrise alimentaire, soutenue et équilibrée pendant toute la phase d’élevage.
Pour compenser une moindre production laitière au premier vêlage, il conviendra de complémenter les veaux issus de vêlages à deux ans avec un concentré. De la même manière, il faudra prévoir une alimentation plus soutenue chez cette primipare à la fois avant et après le premier vêlage. Le vétérinaire conseille par exemple de rajouter 1,5 kg de concentrés type 18% protéines 2 mois avant le vêlage, ainsi que les mois qui suivent le vêlage.
Si l’éleveur dispose sur son troupeau d’un bon potentiel génétique et maîtrise les courbes de croissance de ses animaux, il tire profit des avantages nombreux du vêlage à deux ans. “ Le coût de production de la génisse passe de 1259 € à 1033 €, les besoins en bâtiments et en fourrages sont réduits, l’effectif génisse est réduit d’un tiers, et la longévité des mères est augmentée. Les taux de gestation des multipares sont ensuite identiques, qu’elles aient eu leur premier vêlage à 2 ou à 3 ans. ” Philippe Arzul rappelle enfin qu'en conduite vêlage à 3 ans, la génisse ne prend pas de poids entre l’insémination et le vêlage. “ La troisième année en vêlage à trois ans peut être comparée à une année “sabbatique” pour la génisse. Quoi qu’il en soit le poids vif en sortie de troisième hiver est identique dans les deux conduites à 700 kg. ”

	Conduite vêlage 3 ans	Conduite vêlage 2 ans
Nombre UGB	150	150
Dont vaches	100	115
Dont génisses 30 mois	25	0
Dont génisses 18 mois	25	29
Dont génisses 8 mois	25	29
Nombre d’animaux mis à la reproduction	125	144
% productivité	85%	83%
Nombre de veaux sevrés par an	106	120
Valeur du veau sevré	750€	750€
Nombre de réformes/an	25	29
Valeur de la réforme	1200€	1200€
Produits total	109.500€	124.800€
		+15.300€

Achats supplémentaires 3 000 €
Concentré : + 500kg/génisse

Paramètres objectifs pour un vêlage à 24 mois

	Poids de naissance	Gmq	Poids 8 mois	Gmq	Poids 15 mois	Gmq	Poids 24 mois
	45kg	1250g	350kg	900g	IA à 500kg	850g	Vêlage à 950kg
Equilibre alimentaire au kg/MS (minima)		0,92 UFL 100 g PDI 16 % MAT  4 g P 8 g Ca		0,78 UFL 80 g PDI 12% MAT 3,5 g P  6,5 g Ca		0,78 UFL 80 g PDI 12% MAT 3,5 g P 6,5 g Ca

Recommandations NBVC, Philippe Arzul, docteur vétérinaire.