Les agriculteurs redoutent surtout la réduction des droits de douane

Bien plus que la fin des subventions agricoles à l'exportation en 2013, programmée par l'accord à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) obtenu dimanche, les dirigeants agricoles français craignent surtout dans la foulée une forte réduction des droits de douane pour les produits des pays émergents.

"L'accord conclu à Hong Kong est un mauvais coup pour l'agriculture européenne même si le pire a été évité en repoussant à 2013 la fin des subventions pour l'exportation de certains produits agricoles", affirme Henri Brichart, président de la FNPL (Fédération des producteurs de lait), résumant l'opinion des dirigeants agricoles français. Ce coup de frein aux exportations européennes "entraînera une baisse des prix agricoles à la production de 10% à 20% avant 2013", suite à la suppression des aides à l'export d'un total de 2 et 3 milliards d'euros par an pour des secteurs comme la viande bovine, le lait, le beurre, les céréales, la volaille et le porc, affirme Xavier Beulin, vice-président de la FNSEA, le principal syndicat agricole français.

"Ce sont les multinationales de l'agroalimentaire et de la distribution qui vont en profiter en empochant les profits aux dépends des consommateurs", déclare à l'AFP, depuis la prison de Hong Kong où il est retenu par les autorités chinoises depuis le week-end, Gérard Durand, un des deux porte-parole de la Confédération paysanne. Mais les organisations agricoles françaises craignent avant tout que le commissaire européen Peter Mandelson ne veuille faire ces prochains mois à Genève, loin des feux médiatiques de Hong Kong, de nouvelles concessions en faveur des pays émergents, notamment au Brésil qui veut exporter plus de viande bovine, de sucre et d'éthanol pour pouvoir acheter des Airbus et des produits de luxe européens.

"Le problème de l'accès au marché européen est dix fois plus important que les subventions à l'exportation", souligne l'économiste Frédéric Chausson, directeur de la FNPL. Bruxelles a en effet offert de réduire de 35% à 60% ses droits de douane sur les importations de produits agricoles, une proposition déjà améliorée par rapport à des baisses initialement prévues entre 20% et 50%. La délégation officielle française à Hong Kong a remis en question cette offre affirmant que celle-ci n'était plus valable faute de concessions des autres parties aux négociations.

Mais les dirigeants agricoles, même ceux proches de la majorité politique actuelle, craignent "de ne plus avoir avoir de contreparties à négocier", selon Pierre Chevalier, président de la Fédération nationale bovine (FNB). "Je suis pessimiste. Tout reste à faire dans les trois mois à venir pour éviter une nouvelle grande déception", indique M. Chevalier qui redoute qu'a l'avenir 1,3 million de tonnes de viande bovine par an soit importée à bas prix en Europe contre 400.000 à 500.000 tonnes actuellement. Pour Bernard Layre, président des Jeunes Agriculteurs, "il va bien falloir que les Etats-Unis s'y mettent aussi et davantage qu'il ne l'ont fait cette fois sur le coton. Pendant ce sommet de l'OMC, les Américains ont tout fait pour faire croire que l'Europe était le mauvais élève. Alors qu'en fait, ce sont eux!"

Enfin, pour François Lucas, le président de la Coordination rurale, "Hong Kong a été un pas de plus vers l'ultra-libéralisme, à l'opposé de ce que souhaitent les agriculteurs du monde entier". Avec une conséquence redoutée par M. Belin: "qu'il ne reste plus au milieu de la prochaine décennie que 200.000 à 300.000 exploitations agricoles en France contre près de 600.000 actuellement".

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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