La saucisse de Morteau convoitée de bas en haut

BESANCON, 11 oct 2004 (AFP) - Otage des divisions entre producteurs de la plaine et artisans des montagnes, la saucisse de Morteau attend vainement sa reconnaissance par une indication géographique protégée (IGP).

Chacun des deux camps veut croire au prochain aboutissement des négociations en cours mais la vénérable charcuterie franc-comtoise n'en est plus à une déception près.
Début 2002, le label régional qui la protégeait a expiré sans qu'aucune autre certification le remplace, faute d'accord entre les deux zones de production délimitées par le massif jurassien. Ceux "du haut", une vingtaine d'artisans, partisans de "la véritable saucisse de Morteau", avaient tenté de passer en force, à la fin des années 90, en demandant une IGP réservée aux seuls producteurs installés dans les zones de montagne situées à 600 mètres au moins. Emoi chez les fabricants franc-comtois "du bas", du Territoire de Belfort à la plaine bisontine, souvent installés depuis des générations, et qui représentent plus des deux-tiers de la production de Morteau. L'affaire était remontée jusqu'au Conseil d'Etat qui avait tranché : pas question d'une IGP réservée aux seuls cantons du Haut-Doubs, le label sera franc-comtois ou ne sera pas ; aux deux camps de s'accorder. C'est ce qu'ils tentent de faire depuis plus de quatre ans, en cherchant le consensus, point après point. Depuis plusieurs mois, les négociations achoppent sur la question, essentielle pour les connaisseurs de Morteau, du fumage de la saucisse.

Pour les champions de la tradition, point de Morteau sans fumage et point de fumage sans "tué" ou "tuyé", ces immenses cheminées de bois où la charcuterie s'imprègne d'arômes pendant 48, parfois 72h contre 24h dans les cellules de fumage ou cheminées à ventilation artificielle des industriels. "Si on ne se distingue pas des industriels du bas en protégeant la spécificité du fumage en tué véritable, on n'existera plus. Nos 1.000 tonnes annuelles sur l'ensemble de la zone montagne seront noyées dans la masse de la production", s'inquiète Noël Myotte, ardent défenseur de la morteau des montagnes. "Le goût du fumage en tué est unique, renchérit Guy Barbier, producteur à Pont de Roide (Doubs), l'air circule dans la cheminée et évite la concentration de fumée qui se produit dans les chambres fermées". "Pseudo-tradition", rétorque Daniel Boucton, directeur général de Clavière SA à Dole (Jura), l'un des principaux industriels du secteur, "spécialiste de la salaison depuis 1880". "Le fumage en 48h n'est pas plus légitime que celui en 24h si l'environnement est adapté, estime-t-il. La meilleure preuve, c'est que le consommateur est satisfait. Peu importe la méthode si l'objectif qualitatif est rempli". "Il faut dire aussi qu'une saucisse fumée 24h perd 4% de son poids contre 10% environ en 48h", glisse M. Myotte. Certains s'agacent de voir le dossier de l'IGP piétiner au nom d'un affrontement entre saucisse artisanale et saucisse industrielle. "Il faut arrêter de dire qu'on est les meilleurs, les garants de la tradition", s'impatiente Gérard Marguet, pourtant responsable du très authentique "Tuyé du Papy Gaby" à Gilley (Doubs).


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