Les éleveurs de vaches limousines entre inquiétude et désabusement

BRIVE, 19 juin (AFP) - Dans le berceau de la race limousine, les éleveurs, inquiets, dénoncent la réforme de la politique agricole commune qui, selon eux, favorise une dérégulation du marché de la viande et la désertification des campagnes, certains, désabusés, préférant abandonner leur métier.

Daniel Coudert élève 124 vaches dans son exploitation de Saint-Bonnet-près-Bort, en Corrèze. Sa position est claire : "Ni découplage partiel, ni découplage total", martèle-t-il, à propos du projet de la Commission européenne de ne plus lier les aides au niveau de la production.

Même son de cloche pour Maurice Demichel, éleveur d'une centaine de têtes au Lonzac (Corrèze). "On ne veut pas être pillé de nos aides. Ce serait la révolution dans les campagnes", lance-t-il, fustigeant au passage le commissaire européen à l'agriculture Franz Fischler qui "fait la pluie et le beau temps".

Léo Mertens, ancien responsable de la Confédération paysanne, brocarde lui un "système pervers". "Ce qui compte, c'est de remplir des papiers" et non la production, regrette cet éleveur de Saint-Mexant (Corrèze).
Le projet de réforme est difficile à accepter pour ces éleveurs car il bouleverse le système des aides allouées. Pour les éleveurs de bovins, le découplage concernerait 70% des aides directes à partir de 2005, selon les dernières propositions de la présidence grecque de l'UE et de la Commission européenne.

Daniel Coudert, qui est aussi le délégué départemental des Jeunes agriculteurs, craint que ce nouveau système d'aides, qui stabilisaient le marché de la viande, ne conduise à sa dérégulation totale et à l'arrivée massive de la concurrence.

"Avec une subvention fixe, il y aura moins de bovins dans les exploitations". Et on risque de "se faire inonder par les producteurs argentins qui sont beaucoup moins chers", explique-t-il.

Pour Maurice Demichel, le risque, c'est que les consommateurs perdent à nouveau confiance, en voyant arriver sur le marché des vaches de pays où les normes sanitaires sont moins drastiques qu'en France.
"Après la crise de la vache folle, on a bien remonté la pente, on a fait des efforts de traçabilité, on a donné des garanties. On ne veut pas que tout cela tombe à l'eau", tempête le responsable de la section bovine de la FDSEA.

Cette réforme "n'incite pas les gens à travailler. Elle va provoquer une désaffection du métier et accentuer la désertification", pense Maurice Demichel.
Le président de la chambre d'agriculture de la Corrèze et de la Fédération nationale bovine (FNB), Pierre Chevalier, abonde dans le même sens. "Les cours de la viande vont baisser, on va décourager la production et les éleveurs vont disparaître", estime-t-il, avant d'ajouter: "on va créer un désert dans le grand Massif central".

Autre source d'inquiétude, la grande complexité du régime d'aides pendant quelques années, durant lesquelles vont cohabiter deux systèmes.
"La mise en place de ces aides va être une véritable usine à gaz", pense Daniel Coudert. Et Maurice Demichel de renchérir : avec cette "paperasserie agaçante", "l'agriculteur de base en perd son latin".


Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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