François Dumont, éleveur de Charolaises dans l’Indre, n’hésite pas à qualifier l’écornage des veaux de « corvée ». Tous les éleveurs reconnaissent que l’ébourgeonnage des veaux ou l’écornage est une épreuve. « Ça les secoue », reconnaît François Dumont.
Bruno Chagnon, également éleveur de Charolaises mais dans le Cher, utilise un crayon à l’acide pour cette manipulation. « Je déteste l’écornage. Pourtant, je le fais, car j’estime que les cornes sont dangereuses pour les vaches entre elles, pour les veaux et pour l’éleveur. C’est plus compliqué aussi pour l’animal de rentrer la tête avec des cornes dans les cornadis. J’utilise l’acide mais je n’en mets que très peu, quitte à le refaire une deuxième fois », explique-t-il.
Un stress et une douleur importante lors de l'écornage
Pourtant, il est tout à fait possible de soulager la douleur de l’animal durant l’intervention et par-là même d’ôter à cette pratique une bonne part de pénibilité. Arnaud Lechevallier, éleveur en Saône-et-Loire, a déjà écorné près de 1 500 veaux. Il utilise des anti-inflammatoires et pratique une anesthésie locale.
Le trio : sédation, anesthésie et anti-inflammatoire.
Les institutions, comme l’Institut de l’élevage ou le Conseil de l’Europe, recommandent d'administrer à l’animal un sédatif, un anti-inflammatoire à action longue durée et de pratiquer une anesthésie locale. Quel que soit l’âge, lors de l’ébourgeonnage du cornillon, l’animal est soumis à la fois à un stress important, du fait de la manipulation et de la contention, et à une douleur aigüe liée à la brûlure puis à l’inflammation des tissus cautérisés qui peut persister plus de neuf heures après l’intervention. De plus, Arnaud Lechevallier ne met pas en doute que prendre en compte la douleur est aussi une manière de préserver la relation à l’homme. « Des veaux un peu vifs, à qui l’on fait mal, seront plus compliqués à gérer par la suite. Ils s’en souviennent », observe-t-il.
Des anti-inflammatoires a minima
Dans la pratique, comme le rapporte Jocelyn Amiot, vétérinaire rural en Saône-et-Loire, peu d’éleveurs gèrent la douleur avec le trio sédation, anesthésie et anti-inflammatoire. Par contre, les anti-inflammatoires sont déjà très utilisés.
« Je n’utilise que les anti-inflammatoires, pour couper un peu la douleur. Si cela peut aider les veaux, je n’en suis plus à un flacon près ! Je ne l’aurais pas fait de moi-même. C’est en discutant avec le vétérinaire que je m’y suis mis », reconnaît François Dumont. Il estime qu’un bon système de contention ainsi que la précision et la rapidité du geste aident pour beaucoup à diminuer la douleur.
Jean-Philippe Gartioux, vétérinaire dans le Cher, confirme les recommandations : « En une injection, j’administre un analgésique, un α2-agoniste et des anti-inflammatoires ». Résultat : les veaux reviennent plus vite à la tétine et sont plus vaillants ! Il raconte aussi l’histoire d’un éleveur qui a souhaité expérimenter par lui-même. Il a constitué deux lots, l’un avec administration d’un anti-inflammatoire et l’autre sans. L’éleveur a constaté que les veaux n'ayant pas reçu d’anti-inflammatoire avaient les postérieurs recouverts du produit bleu utilisé pour faciliter la cicatrisation des plaies et les autres non, preuve de l’action bénéfique du produit. C'est moins douloureux pour eux. Les veaux ayant reçu un anti-inflammatoire grattent moins leur plaie, avec de fait un risque réduit d’infection par la suite.