Non contente d’être une maladie intestinale grave, en particulier chez le bovin, la cryptosporidiose est également transmissible à l’Homme. Cette zoonose se traduit par des diarrhées sévères affaiblissant considérablement les organismes touchés, les sujets atteints étant souvent incapables de se tenir debout. Elle touche en particulier les jeunes chez qui elle provoque des diarrhées liquides jaunâtres et abondantes, sans parler de la perte de poids. Sans traitement, la cryptosporidiose peut entraîner la mort de l’animal. C’est d’ailleurs l’une des premières causes de mortalité chez les veaux de moins d’un mois pour les cheptels vaccinés ces dernières années.
Cette maladie est due à un parasite protozoaire (Cryptosporidium parvum) qui résiste à la majorité des désinfectants. Son cycle est relativement court (3 à 4 jours dans l'intestin grêle). Elle se transmet généralement via les sécrétions ou excrétions, les contacts directs voire les pâturages ou les cours d’eau. Seule une analyse de selles permet de diagnostiquer cette maladie sachant par ailleurs que la présence du parasite peut persister jusqu’à 6 mois dans l’environnement.
Aucun vaccin
Il est possible de prévenir une infestation en réduisant la densité animale ainsi qu’en appliquant des règles d’hygiène rigoureuses. Il est également envisageable de réduire les symptômes de la maladie grâce à des antibiotiques (classe des rifamycines). Mais il n’existe actuellement aucun vaccin ou traitement curatif contre l’agent pathogène.
De fait, la prophylaxie et la prévention constituent la base de la lutte contre la maladie en élevage, le socle de cette lutte étant le maintien d’une très bonne hygiène dans les élevages. Objectif ? Eviter l’ingestion d’eau ou d’aliment ayant pu être souillé par des matières fécales contenant le pathogène : colostrum de qualité pour permettre l’installation de l’immunité, nettoyage régulier des litières, paillage suffisant, litière sèche, désinfection, renouvellement de l’eau, isolement des animaux malades, vide sanitaire, alternance des produits désinfectants(1), lavage haute pression à la vapeur (des températures de plus de 65°C inactivent le parasite)…
Isoler les animaux malades
La période la plus sensible se concentre dans les heures suivant la naissance, lorsque le veau entre en contact avec un autre animal porteur, comme sa mère ou un autre animal malade. Le risque de transmission est donc augmenté lorsque les veaux sont laissés plusieurs heures avec leur mère.
Les premières diarrhées apparaîtront entre le 4e et le 10e jour. Généralement de couleur foncé-vert et glaireuse, elles présentent une odeur aigrelette et peuvent durer de 4 à 15 jours. Plus la pression sera élevée, plus les symptômes seront violents (diarrhée, déshydratation rapide). Dans ce cas, l’éleveur devra très rapidement réagir et faire appel à son vétérinaire pour réduire la multiplication du parasite, réhydrater l’animal et lui permettre d’installer sa propre immunité.
Par ailleurs, n’oubliez pas que le veau malade est également un vecteur et un amplificateur de la maladie au sein de l’élevage. Il devra donc être isolé de ses congénères afin d’éviter la transmission d’oocystes, formes de dissémination des cryptosporidies. L'éleveur devra également placer les nouveau-nés dans des locaux séparés des veaux malades, en prenant soin de porter des vêtements et des bottes distinctes pour les soins donnés aux animaux atteints.
Autre conseil préventif : regrouper les veaux par petits lots d’âge semblables (veaux de 0 à 3 semaines, veaux de 3 semaines/sevrage et veaux sevrés). Une observation fine du cheptel est nécessaire car la cryptosporidiose, comme la coccidiose, coexiste à la fois chez des veaux et/ou de jeunes bovins porteurs, excréteurs à bas bruit et non malades. « Ces derniers sont sources de contamination de sujets plus réceptifs, multiplicateurs du parasite qui, à leur tour, vont produire une contamination environnementale massive, responsable d’un foyer de coccidiose. La maladie ne touche au départ qu’une proportion réduite des animaux exposés puis se propage au sein du lot, avec une expression plus ou moins différée (en une à deux semaines) sur plusieurs autres sujets », note le Dr. Didier Guerin, du Gds de la Creuse.
Réagir dans les 48h de vie de l’animal
Généralement, la maladie s’intensifie entre janvier et mars, en première moitié et fin de période de mise-bas. En début de période, les premiers veaux touchés vont recycler le parasite, l’excréter et ainsi contaminer progressivement l’environnement (litière, murs, barrières…) qui devient source de contamination exponentielle pour les nouveau-nés.
L’usage prophylactique de la paromomycine et de l’halofuginone contre C.parvum permettent de prévenir le développement de la maladie. Mais attention : l’éleveur doit alors réagir au plus vite : une étude de l’Inra a en effet démontré que la meilleure efficacité dans le traitement préventif de la maladie était obtenue avec un traitement à base de lactate d’halofuginone, à raison de 120 µg/kg/j(2) pendant 7 jours, à condition que ce cryptosporidiostatique soit appliqué à partir des premières 48h de vie de l’animal. Précisons que cette molécule ne détruit par l’intégralité des cryptosporidies infectant l’animal, mais réduit leur multiplication, permettant ainsi à l’animal d’acquérir son immunité spécifique.
Enfin, une thèse est actuellement en préparation sur le sujet. Réalisée par Marine Dessertenne à l’Oniris, Ecole nationale vétérinaire agroalimentaire et de l'alimentation Nantes-Atlantique, elle s’intitule "Maîtrise de la cryptosporidiose chez la génisse d'élevage en conditions naturelles : évaluation de l'intérêt d'une administration d'un supplément alimentaire sur l'excrétion parasitaire et l'expression clinique".