
En consolidant le premier maillon de la chaîne, celui de l'élevage des veaux, les deux associés du Gaec de la Jonchère ont supprimé le principal handicap qui les pénalisait pour produire toute leur référence laitière.
LA RÉFÉRENCE LAITIÈRE NON ATTEINTE EST EN PASSE de devenir un mauvais souvenir pour Rémy et Étienne Champigneul, du Gaec de la Jonchère. Depuis des années, il leur manquait régulièrement 40 000 l pour atteindre leur quota, faute d'un nombre suffisant de génisses de renouvellement. « Nous nous sommes toujours refusés à acheter à l'extérieur pour ne pas introduire de problèmes sanitaires. De plus, cela aurait été difficile car nous étions fragilisés économiquement par ce manque à gagner. »
Cause de ce problème récurrent : la mortalité des veaux, de 12 à 15 % selon les années. « Il nous est arrivé de perdre neuf veaux en un mois, victimes de colibacilloses, cryptospiridioses, rotavirus... Tous avec des problèmes respiratoires liés aux conditions d'ambiance de la nursery. Ceux qui ne mouraient pas étaient malades et ne grandissaient pas. » Résultat : des génisses manquant de taille, qui devaient attendre au minimum 21 mois pour être inséminées. « Quand on rate les six premiers mois du veau, on rate la vache ! Aujourd'hui, nous en subissons toujours les conséquences. »
Rémy et Étienne prennent le problème à bras-le-corps lors de la campagne 2010-2011.
Un diagnostic d'ambiance de la nursery met en évidence un déficit de renouvellement d'air et la présence de courants d'air. La fumée qui doit s'évacuer en moins de quinze minutes persiste encore après trente minutes avec, à la clé, une température trop élevée et une forte odeur d'ammoniac.
« PAS SEULEMENT UN PROBLÈME D'AMBIANCE »
Sur cette base, la décision est prise d'aller plus loin avec Rémy Enriquet, conseiller spécialisé à Optival. Objectif : élaborer un plan d'actions visant à optimiser l'élevage des veaux.
Le spécialiste met en évidence des dysfonctionnements importants. Les veaux sont nourris au seau avec un lactoremplaceur, sans poudre de lait. Ils sont regroupés dans la nursery en deux lots : ceux de moins de 3 semaines et ceux de 3 semaines à 90 jours, âge du sevrage. Après le sevrage, ils quittent la nursery pour des box extérieurs exposés au vent et reçoivent un concentré de type VL 18 et du foin à volonté. Selon Rémy Enriquet, « cette utilisation de lait sans PLE ne permet pas la formation de caillé et provoque un transit alimentaire plus rapide, ce qui induit une moins bonne homogénéité de croissance dans les lots ». Il pointe aussi du doigt la transition brutale après le sevrage. Le stress lié au changement de locaux et d'alimentation, accentué par une carence énergétique de la ration, pénalise fortement la croissance. Les animaux présentent aussi des dartres et un poil terne.
Face aux problèmes d'ambiance, pas question pour Rémy de se lancer dans la construction d'une nouvelle nursery. Question de coûts, mais aussi de principes. « On peut faire du bon dans du vieux avec des aménagements intelligents. » Témoins : les résultats probants obtenus avec la mise en place d'un extracteur d'air piloté par une sonde thermique (2 000 € HT) et l'installation de clapets sur les deux bouches d'extraction pour éviter les courants d'air.
« UNE TRANSITION POST-SEVRAGE EN DOUCEUR »
L'alimentation lactée est aussi revue avec l'utilisation de poudre de lait écrémé. Pour maîtriser la concentration et l'homogénéité du produit ainsi que des quantités consommées, l'investissement dans un Dal à deux postes (9 000 € HT) est consenti. « Nous avons été surpris au-delà de nos espérances. Nous avons aussi gagné en allégement et en souplesse de travail. Nous gagnons une demi-heure tous les matins. Aujourd'hui, c'est surtout un travail de surveillance de l'automate et des veaux. Nous vérifions leur état deux fois par jour. Nous traversons une seule période délicate lorsqu'à 8 jours, ils sont confrontés au Dal. Il faut les accompagner pendant deux jours pour les faire entrer dans la niche de distribution. »
La gestion des lots est aussi revue. Le sevrage est avancé à 70 jours et les veaux maintenus dans la nursery dans un troisième lot de 70 à 100 jours. Ainsi le stress est moindre lors du changement de bâtiment car les animaux sont déjà adaptés à leur nouveau régime.
Une nouvelle ration plus riche en énergie est calée pour un GMQ de 800 à 900 g et un vêlage à 2 ans. C'est la fin du VL 18 associé au foin, il est remplacé par un menu à base d'ensilage de maïs (6,9 kg), d'ensilage d'herbe préfané (3,4 kg), de paille (0,5 kg), de foin (1,5 kg), de soja 48 (0,7 kg) et de 70 g de minéraux 14-14. Cette ration complète, préparée dans la continuité de celle des VL, prolonge le travail de vingt minutes par jour. Autre levier actionné à la suite de l'audit sanitaire du GDS : l'immunité des veaux. Un travail est engagé sur les taries afin d'améliorer la qualité du colostrum par la distribution d'un minéral spécifique enrichi en sélénium et en vitamine E. Dorénavant, elles sont toutes vaccinées contre le rotavirus.
Tous ces investissements commencent à payer. La mortalité (hors mort-nés) qui était de 8 % en 2009-2010 est passée à 4,3 % en 2012-2013. « Nous sommes sur le point d'atteindre l'objectif de 850 g de GMQ fixé par Carole Deprugney, notre conseillère. Depuis 2011, date des premiers enre-gistrements, le GMQ a évolué de 695 à 759 g », explique Rémy.
« Ces résultats ont été obtenus sans dépenses supplémentaires. En effet, les économies réalisées sur le lait par l'avancement du sevrage de 90 à 70 jours et sur la ration complète distribuée après le sevrage financent les coûts liés aux traitements des vaches taries », note la conseillère. L'action conduite sur les vaches taries présente d'autres avantages difficilement chiffrables (vêlages plus faciles, moins de rétentions placentaires, retour en chaleur plus rapide, vitalité des veaux).
DENIS SCHANG
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