UN TEST DE GESTATION RÉVOLUTIONNAIRE À PARTIR DU LAIT

Le kit Idexx de détection de la gestation est un test immuno-enzymatique permettant de détecter, dans les échantillons de lait, les glycoprotéines associées à la gestation.
Le kit Idexx de détection de la gestation est un test immuno-enzymatique permettant de détecter, dans les échantillons de lait, les glycoprotéines associées à la gestation. (©)

Validé par l'École vétérinaire de Lyon, le nouveau test de gestation mis en service par le laboratoire Idexx apparaît à la fois plus fiable et plus souple d'utilisation que les tests existants. Il est aussi économique avec un coût annoncé de 5 € par vache et par analyse.

LES PERFORMANCES DE REPRODUCTION ont un impact direct sur la rentabilité des exploitations laitières. À ce titre, la confirmation précoce de la gestation est un élément essentiel d'optimisation des résultats zootechniques, et donc économiques. C'est pour répondre à cet enjeu que l'École vétérinaire de Lyon a évalué la fiabilité du test Elisa, mis au point par la société suisse Idexx, qui consiste à détecter la présence de marqueurs de la gestation chez la vache. « Certaines cellules des embryons bovins synthétisent, après nidification, des glycoprotéines appelées PAGs (Pregnancy Associated Glycoproteins) détectables dans le sang et dans le lait des vaches, explique Loïc Commun. Vingt-deux PAGs sont connues actuellement et leur présence est clairement associée à la gestation, mais toutes ne sont pas excrétées au même moment et certaines s'éliminent plus ou moins rapidement après le vêlage. Pour diagnostiquer la gestation, l'idée consiste donc à mettre en service l'équivalent d'un test de grossesse pour vache, qui repose sur la détection ciblée de certaines de ces PAGs ».

Idexx a réussi à identifier des PAGs précoces, détectables également dans le lait pour s'affranchir de la contrainte de la prise de sang. Afin de cibler ces PAGs, la société a conçu un test Elisa réalisable en laboratoire. Son principe de mise en oeuvre est le suivant : le kit, fourni par la société aux laboratoires d'analyses, comprend des plaques composées d'une centaine de « puits ». Chacun de ces puits est tapissé d'anticorps capables de fixer des PAGs présentes dans les échantillons. Le laborantin dépose une fraction de chaque échantillon de lait, ou de sang, dans un puits. Ensuite, il ajoute un indicateur colorimétrique capable de révéler la présence des PAGs à travers la densité optique de chaque puits. En résumé, plus la réaction colorée est intense dans un puits, plus il y a de PAGs dans l'échantillon, ce qui signifie que la vache est gestante. Pour valider le test et définir ses modalités d'utilisation, l'École vétérinaire l'a mis à l'essai dans le cadre d'une thèse.

La thèse de Jean-Baptiste Barbry, encadrée par Loïc Commun, a commencé par un plan de prélèvements dans douze élevages de Bourgogne, grâce à la participation active d'un vétérinaire de terrain, le docteur Xavier Koehrer.

LA FIABILITÉ DU TEST ÉVALUÉE EN ÉLEVAGE

Le test a été réalisé sur des prélèvements de sang et de lait, recueillis à intervalles réguliers entre 27 et 55 jours après insémination, sur 102 vaches montbéliardes et holsteins, âgées de 2,5 à 9 ans. « Les tests Elisa ont été réalisés au sein des laboratoires Idexx de Bern en aveugle, c'est-à-dire que les techniciens en charge des analyses n'ont pas eu accès au statut de l'animal. » Seule l'équipe de l'École vétérinaire retenait la liste de correspondance entre les numéros d'échantillons envoyés au laboratoire d'analyse et le diagnostic de gestation réalisé par échographie. En effet, les résultats des tests ont été confrontés au diagnostic de gestation, réalisé par le praticien via une échographie, 40 jours après l'IA. Ce protocole expérimental portait sur un total de 116 vaches, les 102 vaches inséminées et 14 témoins négatifs. « Il s'agissait de vaches dont on était sûr qu'elles étaient vides car non inséminées, pour voir comment le test réagissait sur ce type d'animaux, et notamment s'assurer de l'absence de faux positifs liés à la gestation précédente. »

Les premiers résultats ont permis de déterminer à partir de quel moment, après une IA fécondante, les PAGs sont détectables par le test. Quelle que soit la nature de l'échantillon, les premières analyses réalisées avant 25 jours de gestation étaient toutes négatives, y compris sur des vaches confirmées gestantes par la suite, ce qui montre que le test n'est pas utilisable avant cette date. Cela s'explique par une nidification tardive de l'embryon qui a lieu vers le dix-neuvième jour.

100 % DE FIABILITÉ DÈS 28 JOURS DE GESTATION

« Ces résultats préliminaires sont logiques d'un point de vue physiologique. En effet, les PAGs sont produites par des cellules binucléées du trophoderme qui apparaissent lorsque l'embryon commence sa nidification. Il est donc normal que les PAGs ne soient pas détectables dans les tout premiers jours suivant l'insémination. Mais ces premiers résultats ont permis de constater que les PAGs de la gestation précédente ne sont plus présentes et ne fausseront pas le résultat des analyses », précise l'enseignant-chercheur.

À partir de 27 jours après l'IA, les résultats se sont révélés très concluants quels que soient les types de prélèvements. Les analyses Elisa révélant la présence ou l'absence de gestation ont été confirmées après échographie avec une exactitude de 100 % dans le sérum et dans le plasma, et de 98,1 % dans le lait. L'efficacité du test est donc avérée pour distinguer les vaches vides, ce qui permet de les réinséminer le plus tôt possible pour gagner en performance de reproduction.

Concernant les analyses de lait, une moindre densité optique a été observée, indiquant une concentration plus faible en PAGs que dans le sang. Il a donc été nécessaire de réajuster le seuil de détection pour les analyses sur le lait. C'est pourquoi Idexx a développé un test spécifique pour le lait, dont le protocole est validé pour le diagnostic de gestation 35 jours post-IA. Notons également que dans le cadre de cette thèse, quatre vaches présumées pleines après le test Elisa, réalisé à J27, sur les échantillons de sang et de lait se sont révélées vides après confirmation par échographie à J40. « Au regard des résultats bruts, il semble que ces quatre vaches aient avorté entre le premier test et la confirmation. Un chiffre qui correspond au taux de résorption embryonnaire précoce d'environ 4 % constaté chez la vache laitière entre J33 et J40. À travers ces quatre avortements, nous avons pu noter que quelques jours sont nécessaires pour que la concentration en PAGs redescende en dessous du seuil de détection après une perte embryonnaire. Au final, on peut donc conseiller aux éleveurs de renouveler le test à J50 pour plus de sécurité. »

« L'étude montre que ce test offre une alternative, fiable, pratique et précoce en matière de diagnostic de gestation. Les analyses dans le lait constituent une avancée majeure pour les troupeaux laitiers. En outre, étant donné que le test est 100 % fiable sur le sang, un intérêt non négligeable peut aussi être trouvé dans les élevages allaitants, car il est parfois plus facile de réaliser un prélèvement de sang sur ces animaux que des échographies, notamment lors de la saison de pâturage. » Le test peut ainsi être utilisé seul ou en complément de l'échographie, qui présente quant à elle l'avantage de pouvoir dater la gestation, d'évaluer les problèmes d'involution et/ou d'infections utérines ou la présence de jumeaux, ce que ne permettent pas les PAGs. L'échographie permet d'obtenir une réponse immédiate de la part d'un vétérinaire expérimenté à partir de J26 chez la génisse et J28 chez la vache.

DEUX KITS DISPONIBLES À CINQ EUROS PAR ANALYSE

Mais à l'inverse de l'échographie, le prélèvement de lait ne requiert pas de compétences ni d'investissements. En effet, l'utilisation d'un échographe coûte entre 1 000 et 2 000 € par an (achat de l'échographe, maintenance), ce qui nécessite un nombre d'actes conséquent pour être rentable.

D'autres méthodes d'analyses existent également sur le marché comme le dosage de progestérone, qui peut être effectué sur le sérum ou le lait maternel, mais sur une fenêtre très serrée de 21 à 24 jours post-insémination seulement. Différents kits de dosage de progestérone offrent une méthode simple et économique de diagnostic de gestation, mais la fiabilité n'est pas toujours au rendez-vous. « La valeur prédictive négative des tests fondés sur la progestérone est certes très bonne, de 90 %, mais la valeur prédictive positive de ces tests est mauvaise. Cela signifie que si le test est négatif, la vache a toutes les chances d'être vide. S'il est positif, on ne peut pas conclure sur son statut. Bref, les tests fondés sur la progestérone sont plutôt des tests de non-gestation, alors que sur le test basé sur les PAGs montre des résultats excellents, aussi bien pour détecter les vaches pleines que les vides ».

À la suite de ces essais, Idexx commercialise deux tests Elisa de diagnostic de gestation : le kit Bovine Pregnancy Test, à partir d'une prise de sang de 5 ml réalisée par les vétérinaires qui sous-traitent l'analyse aux laboratoires départementaux, et le kit Milk Pregnancy Test, réalisable sur échantillon de lait (prélèvement de 25 ml), analysable par les laboratoires laitiers pour les centres d'insémination, les contrôles laitiers et les vétérinaires. Chaque kit se présente sous la forme d'une microplaque avec les anticorps anti-PAGs. Le résultat est fourni en moins de 2 h 30 à un coût annoncé de 5 €/VL/analyse.

JÉRÔME PEZON

Loïc Commun, maître de conférences en zootechnie et coordinateur de l'équipe de médecine des populations sur le campus vétérinaire de Lyon.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

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« L’IA ne remplace pas notre métier, elle le facilite »

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