DERMATITE DIGITÉE : « J'AI TESTÉ LE PANSEMENT MORTELLA HEAL »

Confrontés à un important problème de boiteries, Florian et son associé Simon ont mis en place, avec leur vétérinaire, un plan de lutte global contre la Mortellaro.© J.P.
Confrontés à un important problème de boiteries, Florian et son associé Simon ont mis en place, avec leur vétérinaire, un plan de lutte global contre la Mortellaro.© J.P. (©)

Dans un élevage fortement touché par la dermatite digitée, nous avons expérimenté, dans la durée, l'efficacité du pansement Mortella Heal. Un essai concluant qui ouvre désormais la voie à la mise en oeuvre de mesures de prévention globale.

LES BOITERIES RÉCURRENTES SONT DEVENUES LA PRINCIPALE PATHOLOGIE DU TROUPEAU laitier au Gaec des Vallons. Un problème sanitaire majeur que le passage annuel du pédicure ne suffisait pas à résoudre, dans un système de zéro pâturage, où les animaux sont logés en stabulation à logettes paillées sur béton raclé. « Nous avons alors commencé par fractionner les interventions du pédicure sans plus de résultats, explique Florian Ernault. Mais ce travail a eu au moins le mérite de diagnostiquer la forte présence de la dermatite digitée (Mortellaro) au sein du troupeau. » Pour lutter contre cette maladie infectieuse, le jeune éleveur investit alors dans une station mousse de la société Ecolab. Cet appareil fabrique une mousse aux propriétés biocides à partir d'un produit acide (acide acétique + eau oxygénée) qu'il diffuse sur 20 cm d'épaisseur dans le couloir de sortie du roto de traite. Là encore, l'amélioration escomptée n'est pas à la hauteur des attentes : « Grâce à la mousse, nous avons pu contenir la diffusion de la maladie et ses conséquences, mais pas à guérir les lésions », regrette-t-il.

Décidé à prendre ce problème de boiteries à bras-le-corps, Florian suit alors une formation au parage dispensée par le groupe vétérinaire Vetformance. Il apprend à faire les pansements, s'équipe d'une cage pour réaliser les soins au cas par cas et définit avec Nicolas Gaudout, son vétérinaire, un protocole de soins global.

Dans un premier temps, sur les conseils du praticien, il renforce les mesures d'hygiène, s'attelle à la détection des lésions en salle de traite et met en place des traitements individuels : la station mousse fonctionne une semaine sur deux pendant quatre jours ; les pieds sont lavés au jet pendant la traite et les vaches infectées sont orientées vers un box de soins, puis vers la cage de parage où Florian nettoie la plaie avant d'appliquer un gel vert à l'aloe vera (Hoof-Fit) et de réaliser un pansement avec une bande autoadhésive. « En situation maîtrisée, c'est-à-dire moins de 10 % d'animaux atteints, ce protocole constitue une bonne prise en charge de la maladie, explique Nicolas Gaudout. Mais, dans ce cas de forte contamination, Florian s'est rapidement trouvé débordé par l'ampleur des soins à réaliser.En outre, la maladie était arrivée à un stade de développement trop avancé pour qu'il soit réellement efficace. »

« LA POSE PLANIFIÉE AU DÉBUT DE L'HIVER »

La dermatite est en effet une maladie évolutive, classée du stade M1 au stade M4 (voir encadré p. 56). Au Gaec, la fréquence d'utilisation de la station mousse a permis de contenir la forme aiguë de la maladie (M2). Mais celle-ci s'est installée profondément dans le troupeau sous sa forme M4, à l'origine de boiteries modérées, mais principal réservoir infectieux et aussi forme la plus longue à traiter.

Pour revenir à une situation plus saine, le praticien propose les pansements de Mortella Heal sur toutes les lésions au même moment : « L'objectif est de réduire significativement la pression infectieuse au début de l'hiver, pour que les éleveurs puissentconcentrer leurs efforts sur les cas les plus tenaces et sur la prévention. »

Pour rappel, le Mortella Heal est distribué par la société Schippers. C'est un patch translucide en polyuréthane, sans molécules actives. Il est maintenu en contact étroit avec la lésion de Mortellaro à l'aide d'une compresse et d'un bandage. « Le pansement agit alors comme une seconde peau, explique Émilie Philibert, technico-commerciale chez Schippers. En mimant la première étape de formation d'une croûte, à l'abri des souillures et des contaminations, il induit le déclenchement d'un processus naturel d'autoguérison. »

« DE UN À TROIS PANSEMENTS SELON LES LÉSIONS »

Ce pansement est retiré après dix jours et renouvelé une à deux fois, selon l'évolution de l'infection. Au préalable, près d'une quarantaine de lésions de dermatite avaient été répertoriées début novembre, une période critique associée à l'augmentation de l'humidité ambiante dans les bâtiments, favorable à la réactivation des formes chroniques de la maladie. Huit vaches infectées M4 sont réformées. Puis le 19 novembre, le praticien et l'éleveur posent trente pansements au prix unitaire de 25 €. Un coût loin d'être anodin si l'on prend en compte les honoraires du praticien et l'ampleur du chantier (6 vaches/heure). Les pansements sont retirés le 30 novembre pour un premier bilan contrasté (dans l'intervalle, la station mousse est arrêtée) : « Les vaches soignées avec Mortella Heal ont cessé de boiter », observe d'abord Florian. Dans la cage, au moment d'ôter les pansements, les lésions sont en effet moins douloureuses. Leur taille a fortement diminué, « mais sans être totalement guéries pour autant », précise Nicolas. Le duo éleveur-vétérinaire renouvellera donc 22 pansements, avant de les ôter de nouveau le 9 décembre. À cette date, six vaches auront encore un troisième pansement. Selon le fournisseur, il n'y a pas de règles en la matière : « Le nombre de pansements dépend du type de lésions, mais aussi de l'état immunitaire des animaux, indique Émilie Philibert. Un seul pansement peut par exemple suffire sur une petite lésion au talon de type M1, là où une lésion plus avancée, positionnée à l'avant du pied ou sur une limace, réclamera davantage de soins. »

Ce chantier Mortella Heal représente un budget de 3 000 €. Un chiffre comparable au coût de fonctionnement d'un pédiluve pendant cinq mois d'hiver. Au final, l'objectif d'augmenter fortement le capital de pieds sains est atteint : « La pose est délicate et réclame idéalement deux personnes », souligne Florian.

« LES LÉSIONS ET LES BOITERIES ONT FORTEMENT DIMINUÉ »

« Mais le nombre de boiteries a fortement diminué, précise Simon, son associé. Je n'ai plus besoin de pousser les vaches dans le parc d'attente. La taille des lésions aussi a diminué dès le premier passage. » Une observation partagée par le praticien, pour lequel il s'agissait aussi d'une première : « L'aspect des lésions évolue et on voit clairement que la cicatrisation s'opère. Quand le contact entre Mortella Heal et la lésion est bien conservé tout au long des dix jours, le résultat est bluffant, observe-t-il. Les lésions sont guéries ou revenues à un stade précocegérableavec un traitement classique. »

Les deux associés vont donc continuer à laver les pieds au roto et, le cas échéant, à traiter individuellement les lésions avec le Hoof-Fit jusqu'à obtention du stade M3.

« On ne peut pas faire l'économie de ces traitements individuels et la première règle consiste à traiter dès les premiers signes, rappelle Nicolas. En la matière, différents produits existent sur le marché : les bombes antibiotiques, les minéraux chélatés (pâte à appliquer au pinceau), la poudre d'oxytétracycline ou d'acide acétylsalicylique utilisée aux Pays-Bas. Tous fonctionnent, les antibiotiques pas mieux que les autres, et à condition de respecter une observance régulière, ce qui n'est pas toujours aisé en salle de traite. C'est pourquoi il ne faut pas hésiter à lever les pieds des vaches douteuses et de toutes les nouvelles entrantes, génisses et taries comprises, pour ne pas réintroduire des lésions non gérées. » Parallèlement, la station mousse sera réactivée tous les quinze jours, mais en réduisant le nombre de jours de traitement. Un bilan de la situation est d'ores et déjà programmé au printemps. Dans l'attente, les éleveurs vont s'atteler à un autre aspect de la prévention : réduire les facteurs de risque favorables aux nouvelles contaminations qui, pour rappel, sont provoquées par une bactérie ne supportant pas l'oxygène, mais adorant l'humidité. Objectif : maintenir autant que possible un pied propre et un sol sec dans les bâtiments.

« PROTÉGER DE L'HUMIDITÉ EN AUGMENTANT LE TEMPS DE COUCHAGE »

Leur stabulation se compose de deux rangées de logettes paillées, sur couloirs d'alimentation raclés en béton. Ceux-ci ont une forte pente donnant accès à une large aire d'exercice extérieure bétonnée. Le premier travail a consisté en un ragréage de l'aire d'exercice pour supprimer les irrégularités du sol où se forment des flaques d'eau stagnantes. Dans un deuxième temps, les éleveurs ont prévu d'ôter une planche sur deux au niveau du bardage pour améliorer la ventilation, et donc l'évacuation de l'humidité.

Un autre moyen de maintenir les pieds au sec est de limiter les stations debout dans les déjections en améliorant le temps de couchage. Au Gaec, la présence de tarsites (lésions du jarret) et d'ulcères sous les pieds oriente vers la nécessaire amélioration du confort des logettes. Enfin, le parage fonctionnel sera maintenu. Il remet le talon loin du sol et en facilite l'évacuation des bouses, protégeant ainsi les pieds des souillures et donc des contaminations. Mais, la forte pente des couloirs d'alimentation est un facteur de risque d'érosion de la corne du talon qui laisse la peau en contact directe avec l'humidité. « À terme, le recours aux tapis pourrait être un moyen de récupérer de la hauteur de talon, conclut Nicolas. À condition d'augmenter la fréquence de parage sur une surface où l'usure de la corne est réduite et d'améliorer le confort de couchage pour éviter que les vaches ne se couchent dans les allées. » n

JÉRÔME PEZON

JÉRÔME PEZON

Ici, le mur est trop proche du bout de la logette, la vache peut difficilement balancer sa tête vers l'avant pour se relever. Les éleveurs ont décidé de casser le mur pour le remonter derrière les piliers porteurs et ainsi gagner 20 cm de dégagement vers l'avant.

Pour améliorer l'évacuation de l'humidité, les éleveurs envisagent d'ôter du bardage une planche sur deux. Dans la logette, le trottoir en guise d'arrêtoir au sol est une source d'inconfort qui ne permet pas à l'animal de tendre sa patte vers l'avant. Il a été cassé au marteau-piqueur sur une première rangée de logettes et remplacé par une sangle.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

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« L’IA ne remplace pas notre métier, elle le facilite »

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