Bruxelles ne comprend pas pourquoi, alors que le prix du lait aux producteurs n'a jamais été autant rémunérateur en 2011, la France n'a pas « saturé » son quota et termine la campagne laitière avec une sous réalisation de 2 %. Le chiffrage des ventes perdues et de leurs bénéfices aux producteurs est assez simple.
La France aurait pu facilement produire 2 % de plus des 20 milliards de litres sur les 24 milliards du quota national, soit 400 millions de litres avec un paiement d'environ 300 €/1 000 l, et un manque à gagner de 120 millions d'euros. En fait, seul un tiers des producteurs (30 000) est réellement réactif au prix rémunérateur parce que compétitif sur le plan économique et technique. Ils représentent environ 50 % du lait français. Ils auraient pu alors produire 4 % de lait en plus, réalisant ainsi 120 millions d'euros de ventes de lait supplémentaires.
Ces 4 % pouvaient être produits avec des charges de structure quasi-constantes. Le bénéfice avant impôts pour ces éleveurs aurait représenté environ 40 % de ces 120 Md de vente de lait, soit globalement au minimum 40 millions et, en moyenne, un bénéfice (avant impôts) de 1 600 € par producteur.
C'est dire que le système français de redistribution des quotas reste absurde et antiéconomique. La redistribution de 920 millions de litres (3,8 % du quota) au sein des bassins laitiers, décidée par Bruno Le Maire et FranceAgri- Mer, est donc un échec.
Les entreprises privées et coopératives n'auraient pas pu refuser aux producteurs ce lait additionnel, même si la valorisation à l'exportation pouvait entraîner une légère baisse du prix de ce lait.
C'est pourquoi nous avons fait l'hypothèse d'un prix de seulement 300 €/1 000 l. En effet, plus de 400 millions de litres n'auraient pas effondré le marché en 2011, ce qui se savait fin 2010, et les laiteries n'auraient eu qu'à organiser des adaptations de gestion des sites industriels pour exporter (poudre), comme l'ont réussi leurs concurrents de l'Union européene. À quand la fin de ce gâchis ? Si aujourd'hui près de 150 millions de litres cherchent des débouchés (GIE Sud-Ouest, la Fourme de Montbrison, des éleveurs du Sud-Ouest et la CLHN), les causes sont multiples : mauvais choix stratégiques historiques, grandes erreurs de gestion, etc.
[…]
À Bruxelles, la question est celle-ci : combien de temps encore la France va-t-elle refuser d'entrer dans une économie non administrative, ouverte au monde, avec le potentiel croissant de consommation des produits laitiers dans les pays dits « émergents », pour devenir compétitive vis-à-vis de ses principaux concurrents de l'UE à l'exportation ? La réponse n'est pas dans les usines à gaz de la contractualisation et des organisations de producteurs à la française, dit-on toujours à Bruxelles.
JEAN-PIERRE CARLIER, CONSULTANT
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