Produits du terroir, les fromages au lait cru sont une spécialité gastronomique française reconnue. Leur mode de fabrication permet de garantir un goût unique, mais les expose à des risques sanitaires, ce qui cause de nombreux débats.
Qu'est-ce qu'un fromage au lait cru ? Les fromages au lait cru sont issus d'un lait qui n'a pas été chauffé au-delà de 40°C durant toute la fabrication. L'absence de chauffage permet de préserver les micro-organismes présents naturellement dans le lait après la traite. Les bactéries, les levures et les moisissures dans la flore microbienne du lait apportent chacune leurs spécificités et jouent un rôle central durant la transformation du lait en fromage, puis l'affinage. Ce processus crée des « spécificités sensorielles très grandes », selon l'Institut de recherche agronomique (Inrae).
Les trois quarts des fromages d'appellation d'origine protégée (AOP) sont au lait cru. Cela correspond à 15 % des fromages produits en France. Certains fromages, dits à « pâte pressée cuite », sont aussi fabriqués à base de lait cru mais leur fabrication comporte une étape de chauffage du caillé (lait coagulé). Lorsque le lait est chauffé entre 40 et 72°C pendant au moins 15 secondes, on parle de « lait thermisé ». Lorsqu'il est chauffé au-delà de 72°C pendant 15 secondes, on parle de « lait pasteurisé ». Pour les différencier, la mention « au lait cru » est systématiquement étiquetée sur les fromages non chauffés.
Qui peut les consommer ?
Les fromages au lait cru renferment une flore vivante variée, qui peut être favorable en termes de santé (ex. bactéries lactiques diverses). Mais ils ne sont pas adaptés aux personnes dont le système immunitaire est affaibli ou immature : les enfants, les femmes enceintes et les personnes immuno-déprimées, rappelle le ministère de l'agriculture. En effet, l'absence de chauffage du lait rend possible la présence de bactéries pathogènes (listéria, salmonella ou e.coli par exemple) dans le lait cru et ensuite dans le fromage.
« Les enfants de moins de cinq ans ne doivent pas consommer de fromage au lait cru, ni de lait cru. Au-delà, le risque existe toujours mais il est quand même décroissant », selon la cheffe de la mission des urgences sanitaires au ministère de l'agriculture, Marie-Pierre Donguy. Il peut toutefois aussi y avoir des problèmes sanitaires avec le lait pasteurisé si l'acidification ne se passe pas bien, ce qui empêche les bonnes bactéries de se développer.
Sans minimiser les risques de maladies infectieuses bactériennes, des chercheurs travaillent néanmoins sur les bénéfices d'une alimentation non pasteurisée pour renforcer le microbiote intestinal et diminuer le risque d'apparition de maladies comme les allergies, l'asthme ou les dermatites atopiques.
« La consommation de lait cru par l'enfant pendant la première année de vie et par sa mère pendant la grossesse (est) associée à une protection contre des manifestations de l'allergie, et aux mécanismes immunitaires impliqués », déclare ainsi la pédiatre-allergologue du CHU Nancy, Amandine Divaret-Chauveau, d'après les résultats de l'étude menée sur la cohorte Pasture en Europe.
Un reflet du terroir
La pasteurisation facilite l'industrialisation de la fabrication de fromage, mais avec moins de diversité microbienne, les produits sont plus standardisés. Dans un fromage au lait cru, l'ensemble des nutriments n'est pas détruit par le chauffage : ils ont plus de goût, de corps, et une complexité au niveau gustatif due à la qualité de la matière première mais aussi à la diversité de la faune microbienne. Celle-ci varie en fonction de l'environnement de la ferme, et notamment de l'alimentation des vaches.
Sources : Conseil national des appellations des origines laitières (CNAOL), Santé Publique France, ministère de l'agriculture, Inrae.
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