
Bien qu’aucun cas de dermatose nodulaire contagieuse n’ait été détecté dans l’Aude, sa proximité géographique avec les Pyrénées-Orientales, où six foyers sont désormais confirmés, conduit la préfecture audoise à prendre les devants. La course contre la montre a commencé dans les exploitations.
À la ferme Terrios, l’heure est au branle-bas de combat depuis le 16 octobre. « J’avais programmé ces jours-ci de labourer mes champs pour semer des céréales, mais cela attendra la semaine prochaine. On est dans l’urgence absolue. La priorité est de rassembler ma cinquantaine d’Aubracs dans les parcs, puis de les rentrer dans le bâtiment avant la venue du vétérinaire, ce jeudi 23 octobre », confie Olivier Moreno, polyculteur-éleveur, à Quillan. Mères et veaux seront vaccinés, même si ses vaches sont moins susceptibles d’être exposées à cette maladie puisqu’elles pâturent dans les 150 hectares de parcs et landes de la ferme. « Mais comme je subis les retours d’estive de mes voisins, on n’est jamais trop prudent », ajoute-t-il.
L’exploitation fait partie des 86 communes de la zone de surveillance définie par la préfecture le 16 octobre dernier, située pour l’essentiel entre le Piémont pyrénéen, le plateau de Sault et les Corbières. Cette zone est depuis le 20 octobre étendue à 20 nouvelles communes à la suite de la découverte, d’un nouveau foyer ce même jour à Baillestavy, dans les Pyrénées-Orientales. 106 communes sont désormais concernées, notamment par des restrictions de déplacement des bovins dans le cadre du nouvel arrêté pris à cette date. Sur les 12 000 vaches allaitantes et le millier de vaches laitières élevées dans l’Aude, 300 d’entre elles sont encore en estive, et ne peuvent donc pas être ramenées dans leurs exploitations. La campagne de vaccination obligatoire a débuté le 23 octobre, avec pour priorité de s’occuper des bovins en estive.
Du désarroi à la mobilisation générale
La maladie continuant à circuler parmi les troupeaux en estive dans les Pyrénées-Orientales, l’inquiétude s’accroît chez les éleveurs audois. « Notre première réaction a été le désarroi, puis l’angoisse face à cette maladie qui n’est pas d’ici. Comment est-elle arrivée chez nous ? Comment la maladie est véhiculée ? On n’en sait rien. Moi, ce qui me fout la trouille, ce sont les camions d’équarrissage qui viennent dans nos exploitations. Il n’y a pas de sas de sécurité quand ils ouvrent les portes », commente l’éleveur.
Puis d’enchaîner sur le fait que « quoi qu’il arrive, il faut sauver les bêtes. C’est une course contre la montre qui s’engage, il n’y a pas une minute à perdre. Mais si nous sommes tous favorables à une vaccination, qui devrait d’ailleurs être généralisée à l’ensemble du cheptel bovin français, on ne comprend pas pourquoi tout un troupeau devrait être tué quand une seule bête est contaminée. C’est une solution trop radicale qui met en péril tout le travail génétique accompli ».
Il y a un véritable élan de solidarité agricole
Dans ce grand chamboule-tout, la mobilisation du monde agricole et de ses partenaires est heureusement au rendez-vous. Le Conseil régional de l’Ordre des vétérinaires d’Occitanie a mobilisé les étudiants de l’École vétérinaire de Toulouse et tous les professionnels de la région pour qu’ils participent à la campagne de vaccination des bovins dans les Pyrénées-Orientales et l’Aude. Les vaccins étant en stock suffisant, il y en aura pour toutes les bêtes. De plus, les Cuma ont mis en place un réseau d’entraide auprès des éleveurs. « Il y a un véritable élan de solidarité agricole. C’est un véritable soulagement pour nous », se réjouit l’éleveur. Mais la mobilisation générale et l’absence de pénurie de vaccins n’apaisent pas pour autant les craintes qui planent sur la filière bovine.
Arrêt de mort annoncé pour la filière bovine ?
Le gouvernement a décidé de suspendre, du 17 octobre au 4 novembre inclus, toute sortie de bovins du territoire métropolitain. Un coup dur pour la filière, car la France est l’un des premiers exportateurs mondiaux d’animaux vivants. « Comme nous sommes en zone de surveillance, les animaux sont confinés et ne peuvent sortir du territoire pour la vente et l’export. Cela va créer un manque à gagner dans les trésoreries des exploitations, d’autant plus que lorsque les bêtes sont vaccinées, leur commercialisation est interdite durant 14 mois. Donc, il n’y aura pas de vente de broutards à l’export durant toute cette période », relève Jean-Luc Pull, responsable du service élevage à la Chambre d’agriculture de l’Aude.
La présence des bêtes plus longue que d’ordinaire dans les exploitations aura un effet domino : manque de place dans les bâtiments, tensions entre les animaux, surcharge de travail, surcoût alimentaire… « Ce délai de 14 mois, c’est énorme pour nous. S’il est maintenu, nous aurons une année blanche. Il va nous falloir acheter des céréales parce qu’il n’y aura pas assez d’herbe pour les bêtes et qu’il nous faut l’économiser. Pour les veaux mâles, il va falloir les séparer pour éviter les bagarres, voire les castrer afin que la fécondation des vaches n’arrive pas avant qu’elles ne soient formées », précise Olivier Moreno.
Enfin, l’obligation d’abattre tout un cheptel en cas de la contamination, même d’une seule bête, met en péril tout le travail génétique des éleveurs. « Comment fait-on derrière pour reconstruire des élevages en système extensif sur des petites races telles que la Gasconne qui est la plus répandue chez nous ? Comment, dans ces conditions, pourra-t-on maintenir la filière élevage demain sur nos territoires ? », interroge Jean-Luc Pull. Mais, pour l’heure, tous croisent les doigts pour qu’aucun cas de DNC ne soit détecté dans le département.
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