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FertilisationOptimiser l'utilisation des effluents d'élevage pour faire des économies

Pour éviter les pertes d'azote, phosphore et potasse, ne stockez pas vos fumiers dehors avant deux mois de maturation. (©Terre-net Média)
Pour éviter les pertes d'azote, phosphore et potasse, ne stockez pas vos fumiers dehors avant deux mois de maturation. (©Terre-net Média)

Face à la flambée des prix des intrants et notamment des engrais, gérer au mieux sa fertilisation organique permet de réaliser quelques économies. Cela passe notamment par la couverture du fumier, l’épandage la dose optimale au bon moment ou encore l’implantation de légumineuses.

« Il y a de l’or dans les élevages qui n’est pas forcément exploité comme il faut ! » Bénilde Lomelet, conseiller élevages allaitants chez Seenovia, ne cesse de marteler ce message aux éleveurs qu’il accompagne. L’or, c’est le fumier et le lisier, qu’il convient de ne pas gaspiller.

Pour cela, il faut commencer par couvrir le tas de fumier, pour éviter à la fois le lessivage et la volatilisation. Un tas de fumier qui passe l’hiver dehors perd 60 % d’azote, 35 % de phosphore et 70 % de potasse, selon les essais réalisés par le service agronomie de Seenovia. La moitié de ces valeurs disparaissent dès le premier mois de stockage. Du pur gaspillage.

Au Gaec de Sainte-Pauline à Joué-sur-Erdre (Loire-Atlantique), la moitié des 1 200 tonnes de fumier produit dorment dehors. « Si ce fumier était couvert durant l’hiver, cela permettrait d’économiser 6,4 tonnes d’ammonitrate, 1,5 tonne de superphosphate et 6,7 tonnes de chlorure de potasse » a calculé Bénilde Lomelet.

Sur sa ferme du Loroux-Bottereau, à une vingtaine de kilomètres à l’est de Nantes, Thierry Têtedoie recouvre son tas de fumier de paille, « cela permet de garder la chaleur à l’intérieur, tout en laissant respirer ». Pas sûr toutefois que cela évite le lessivage, lorsqu’il pleut.

Tas de fumier
Sur son exploitation du Loroux-Bottereau (Loire-Atlantique), Thierry Têtedoie recouvre ses 1  000 tonnes de fumier de paille : « Cela permet de garder la chaleur à l’intérieur, tout en laissant respirer ». (©Antoine Humeau)

Une simple bâche plastique peut aussi faire l’affaire sur du court terme, elle évite le lessivage et la volatilisation. Mais elle ne résiste pas au vent et ne permet pas les échanges gazeux. Attention donc à l’oxygénation du tas. Elle peut convenir pour les fumiers secs (volailles, caprins, moutons) car elle préserve bien l’humidité.

L’idéal est d’opter pour une bâche géotextile. Il s’agit d’une trame en matière synthétique, tissée ou non. Elle laisse les échanges gazeux se faire mais reste imperméable à l’eau.

La couverture du tas de fumier doit se faire rapidement après la mise en place de l’andain. « Pour éviter les reprises de fermentation, il faut tasser avec le chargeur, et éviter le plus possible de manipuler le fumier » recommande le technicien élevages allaitants.

Dans l’idéal, le tas doit être constitué si possible de façon pyramidale, de sorte que l’eau puisse s’écouler.

Épandre au bon moment

Un épandage optimal, c’est un apport au bon moment pour une meilleure minéralisation.

En Pays-de-la-Loire par exemple, où l’épandage est interdit du 15 décembre au 15 janvier, il est intéressant de disperser son fumier à l’automne sans attendre tant que cela porte, sur les pâtures. Les conditions le permettaient à l’automne dernier, les épandeurs ont tourné à fond dans les campagnes ligériennes. La végétation valorisera ensuite les éléments présents, avec les pluies.

C’est ce qu’a fait Thierry Têtedoie sur ses prairies à fauche : « Épandre à l’automne, cela me permet d’avoir un fumier plus composé, et je trouve que les prairies valorisent mieux à cette période », constate l’éleveur de vaches allaitantes, en bio depuis l’an dernier. Il a environ 1 000 tonnes à épandre, 20 t/ha, conformément aux recommandations de son technicien.

Il vaut mieux mettre 20 tonnes de fumier tous les ans que d’apporter 30 ou 40 tonnes une fois tous les 3 ans. « Ne pas apporter de grosses quantités mais les répartir sur une surface plus grande », précise Bénilde Lomelet. « On épand une dizaine de tonnes par hectare sur les prairies pâturées et on va jusqu’à 20 tonnes tous les ans pour les prairies 100 % fauchées. » Le fumier épandu à l’automne peut représenter environ un quart à un tiers du volume produit durant l’année. Le reste sera épandu sur les cultures de printemps et sur les cultures d’automne. Pour ses cultures de maïs et tournesol implantées après prairies, Thierry Têtedoie n’apporte pas de fumier. Il en épand en revanche 20 tonnes sur la culture suivante, le plus souvent un mélange céréalier.

Pour la fertilisation minérale, la dose doit être calculée en fonction du chargement d’UGB à l’hectare. Le premier apport d’azote sur les prairies doit se faire à 200 degrés jours (c’est la somme des températures journalières cumulées depuis le 1er janvier).

L’apport d’azote doit être fait rapidement, c’est-à-dire dans les 5 jours qui suivent le retrait des animaux de la parcelle. « Les éleveurs sont parfois un peu surpris de l’apprendre », constate Bénilde Lomelet. Après une fauche, le délai de latence peut être un peu étendu, jusqu’à 10 jours environ.

Implanter des légumineuses

Un autre levier d’économie de fertilisation consiste à développer les légumineuses. « Ce sont les moteurs des prairies », rappelle Bénilde Lomelet. Dans les associations graminées + légumineuses, une partie de l’azote est en effet fournie par les légumineuses, capables de fixer l’azote atmosphérique grâce aux nodosités présentes sur leurs racines.

Une prairie qui compte 30 % de légumineuses peut ainsi se passer d’azote minéral. Les bios l’ont bien compris. Mais un bon nombre d’éleveurs en conventionnel, dans l’Ouest, n’en ont pas plus de 10 % à 15 %.

Sur les dérobées à base de ray-grass avec plus de 50 % de trèfle annuel, il est conseillé d’apporter 40 unités d’azote. Sur les dérobées à base de seigle, avoine, trèfle annuel, il est possible de descendre à 0 unité s’il y a eu un apport d’engrais organique à l’implantation, à l’automne. « Il faut commencer à introduire des légumineuses dans ses prairies avant de passer en bio », suggère Thierry Têtedoie, qui a largement développé le pâturage sur sa ferme, autre levier d’économies :  « Cela permet de faire la fauche et l’épandage à la fois, gratuitement ».

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