
Pour le GIE Maïs-Épi de la Loire, l'évolution des cours du maïs-grain et les tensions sur le prix du lait rendent la contractualisation difficile entre les producteurs et les acheteurs.
DEPUIS LONGTEMPS, DES RELATIONS SE SONT TISSÉES autour du maïs-épi entre les producteurs de la plaine du Forez et les éleveurs des régions montagneuses environnantes : Monts du Forez dans la Loire, Monts du Lyonnais dans le Rhône, Puy-de-Dôme, Haute- Loire… « Dans le Massif Central, les premiers contacts se sont établis par l'intermédiaire de l'entreprise de travaux agricoles, qui ensilait l'herbe dans ces départements et qui récoltait le maïs-grain chez nous, précise Alain Chaussat, polyculteur éleveur à Mornand-en-Forez et président du GIE Maïs-Épi depuis douze ans. Riche en énergie, le maïs-épi est apprécié par les éleveurs pour son effet lactogène dû à la fermentation et qui le rend plus intéressant qu'un maïs sec broyé. »
« UN EFFET LACTOGÈNE INTÉRESSANT »
En 1992, une quinzaine de producteurs de la plaine du Forez ont souhaité s'organiser pour facturer collectivement la vente de leur maïs-épi. « C'était plus sécurisant financièrement », souligne Alain Chaussat. À cette époque, le GIE était seul à proposer ce produit sur le marché. L'épi se vendait alors en vrac. La démarche avait été engagée avec l'appui de la chambre d'agriculture de la Loire. « Sur le terrain, les agents du contrôle laitier faisaient l'interface entre les éleveurs ayant besoin d'énergie dans leur alimentation et nous. Aujourd'hui, avec le développement de la concurrence et l'arrivée d'autres entrepreneurs, ces relations privilégiées ne sont plus possibles. » Depuis 2003, année de sécheresse, le GIE commercialise aussi de l'ensilage de plante entière (en vrac et balles rondes). Les quantités varient beaucoup selon les conditions climatiques de l'année.
Alors que les surfaces commercialisées par le GIE se situent aujourd'hui à 250 ha (150 ha en épis et 100 ha en ensilage de plantes entières en vrac ou en balles rondes), les techniques de récolte et de conditionnement du maïs-épi ont évolué. Depuis 2004, les deux tiers des 3 000 t mises en marché sont conditionnés en bottes. « C'est plus cher mais plus pratique pour l'éleveur. Il n'a pas besoin de confectionner de silo. Broyé et ensilé, le produit est disponible de suite à la consommation. Il n'a ni perte ni souci de reprise. » Le fonctionnement du GIE Maïs-Épi nécessite un suivi des chantiers de récolte et une bonne logistique pour le transport. L'épi est récolté quinze jours à trois semaines avant le grain, ce qui permet de libérer les terrains et de semer en blé les parcelles ainsi disponibles. « C'est un avantage et une sécurité pour les terres non portantes qui craignent l'eau, reconnaît Alain Chaussat. C'est d'ailleurs un point que reprennent les éleveurs pour essayer de faire baisser les prix. Ils disent qu'ils nous “débarrassent”. La machine à broyer l'épi de maïs et à faire les bottes s'installe dans une commune où se trouvent plusieurs producteurs. Elle peut aussi charger directement en bout de champ les bennes des camions de 15 ou 25 t mobilisés pour le vrac. »
« LE MAÏS-ÉPI EST VENDU AU POIDS DE LA MATIÈRE SÈCHE »
Pour « être le plus juste possible », le GIE vend le maïs-épi au poids de matière sèche. « Nous récoltons entre 50 et 70 % de matière sèche, en essayant d'être au plus près des 60 % de MS. Un échantillon est prélevé par camion de 25 t. Les analyses (de 100 cette année, à 300 les années de forte demande, comme 2011) sont réalisées par un laboratoire régional agréé. Nous facturons un mois après la livraison, le temps d'avoir les résultats d'analyse de MS. Les producteurs reçoivent des acomptes et les comptes sont soldés un an après la récolte. » Pour permettre aux semi-remorques de livrer facilement dans les régions montagneuses, il faut impérativement apporter la marchandise avant le mois de décembre. « Mettre en concurrence les transporteurs n'est pas évident car le travail est saisonnier, souligne Martine Chaussat, la femme d'Alain, très impliquée dans le suivi administratif et commercial du GIE Maïs-Épi. Il faut également tenir compte des samedis et dimanches, quand les camions ne roulent pas et que les bascules à peser des coopératives sont fermées », poursuit-elle. La fixation des prix et les relations avec les éleveurs se sont compliquées ces dernières années. Les prix du maïs-épi sont fixés au mois de juillet lors de la réunion de bureau du GIE en fonction de plusieurs éléments, dont le cours du grain, celui des engrais et des frais de récolte. Les coûts de récolte de l'épi (212 €/ha) et les frais de pesée des camions, des analyses de matière sèche et des coûts de comptabilité du GIE doivent également être pris en compte.
« DE PLUS EN PLUS DE CLIENTS SONT OPPORTUNISTES »
« Depuis 2008, avec les importantes fluctuations des cours du grain et des intrants, se mettre d'accord sur un prix devient compliqué, souligne le président du GIE Une année où l'on nous avait demandé que les éleveurs participent à la fixation des prix, nous nous sommes retrouvés quinze autour de la table. Nous n'y sommes pas arrivés. En 2009, les producteurs de maïs ne voulaient plus mettre leur produit car ils estimaient que le prix n'était pas assez élevé. Il a fallu rappeler les acheteurs pour leur annoncer que le tarif allait être relevé. Cette année 2012, nous avons attendu le mois d'août pour fixer les prix. » Il s'est établi à 265 €/t de matière sèche pour l'épi en bottes. Avec le développement de la concurrence, fidéliser la relation devient difficile. Chaque année, mi-août, une offre commerciale est envoyée à chaque client connu (650 particuliers environ). « Nous avons encore un noyau de bons clients qui apprécient la qualité de notre produit et la rigueur dans la livraison, mais de plus en plus de personnes sont opportunistes », note Alain Chaussat.
Dans ce contexte, envisager de contractualiser pour lisser les prix sur plusieurs années n'est pas envisageable, d'autant plus que le maïs est maintenant coté en bourse. Faire admettre à des producteurs que cette année, ils gagneront moins mais qu'ils se rattraperont l'an prochain est difficile. Seuls ceux qui sont aussi éleveurs peuvent l'admettre et encore, de moins en moins. Essayer d'être le plus juste possible ne suffit plus à contenter les deux parties. Du fait de la baisse du prix du lait, les relations sont plus dures. L'éleveur a tendance à se sentir « volé », le producteur estime qu'il a mal vendu.
« Aujourd'hui, les intérêts sont trop divergents. »
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