
Transporter une centaine de litres de lait sans se faire mal au dos et distribuer rapidement la bonne dose : le taxi-lait séduit de plus en plus d'éleveurs.
J'UTILISE CE TAXI-LAIT DEPUIS 2011, explique Maryline Berson, associée du Gaec des Chauffodières, à Maisoncelles-du-Maine (Mayenne). C'est un outil très pratique, très simple et désormais indispensable sur notre exploitation. » Fabriqué par Holm et Laue, cet engin est monté sur quatre roues : deux directrices à l'arrière et deux motrices à l'avant. Un moteur électrique relié à une batterie rechargeable assure l'avancement. La cuve en Inox, qui peut contenir jusqu'à 130 l, possède un mélangeur pour préparer du lait en poudre et une résistance chauffante avec thermostat. Pour le mélange et la distribution, le taxi-lait possède une pompe électrique reliée à un tuyau de trois mètres avec un pistolet doseur.
« LES VEAUX ONT BEAUCOUP MOINS DE PROBLÈMES DE DIARRHÉES QU'AUPARAVANT »
« Pendant la traite, je verse directement la quantité dont j'ai besoin dans la cuve, ajoute Maryline Berson. Puis je branche l'appareil sur le secteur pour réchauffer le lait et le maintenir à la bonne température. Le thermostat est réglé à 44°C. Je préfère bien chauffer au départ pour compenser le refroidissement pendant le transport et la distribution. Les veaux digèrent mieux le lait chaud que tiède, et nous avons beaucoup moins de problèmes de diarrhées qu'auparavant. » La nurserie des veaux est répartie dans deux salles situées à une vingtaine de mètres de la laiterie. Le chemin d'accès emprunte un couloir avec un seuil de trois centimètres à franchir. Grâce à l'avancement électrique, Maryline n'a aucun effort à fournir : l'engin se pilote simplement en appuyant d'un pouce sur la commande d'avancement. Il possède deux vitesses avant et arrière. Avant de remplir les seaux, elle laisse circuler du lait dans les tuyaux et le reverse en cuve. Cela réchauffe le circuit et garantit que les premiers veaux reçoivent bien du lait chaud. Ensuite, il suffit de placer le pistolet doseur dans le seau et de choisir la quantité à donner. Une télécommande est en effet intégrée à la poignée. Elle se compose d'un petit écran et deux boutons « plus » et « moins ». L'utilisateur peut mémoriser et choisir cinq quantités différentes numérotées de 1 à 5.
« SEULEMENT TROIS SECONDES PAR ANIMAL »
La distribution dure environ trois secondes par veau. Quand la cuve est vide, Maryline nettoie le tout avec de l'eau, complétée parfois par un peu de lessive. « Nous n'avons jamais eu de gros soucis mécaniques, ajoute-t-elle. Après bientôt cinq années d'utilisation, la batterie vient juste d'être changée. Pas question de revenir en arrière : les seaux à porter, les allers et retours, le mal de dos, c'est terminé ! »
Même préoccupation au Gaec de Fontenay, à Lithaire (Manche), où Bertrand Lallemand utilise un taxi-lait conçu et fabriqué par son fils Romain, actuellement étudiant en BTS agricole (voir infographie page 49.) « Cet outil me permet de nourrir jusqu'à 50 veaux deux fois par jour en à peine vingt minutes par passage. »
Matin et soir, Bertrand distribue à chaque veau 2 l de lait, complété par 0,5 l d'eau chaude. Le lait est prélevé pendant la traite, mais la laiterie et la nurserie sont situées dans deux bâtiments distants d'une centaine de mètres.
« TOUTE L'ASTUCE REPOSE DANS LE JEU DE TUYAUTERIES ET DE VANNES »
Il fallait un engin suffisamment stable et maniable pour transporter 100 l de lait. Romain a fabriqué un chariot en acier soudé, avec quatre roues, dont deux directrices. Le chemin, empierré et en légère pente, facilite le déplacement puisque ce taxi-lait artisanal ne possède pas de roues motrices. Sur ce chariot, il a fixé un bidon de 130 l avec des graduations à l'intérieur. Le fond est percé et connecté à une petite pompe vide-cale de bateau achetée d'occasion pour 70 €. Elle est alimentée par une batterie de tracteur de 12 V placée juste à côté. Un interrupteur marche-arrêt pilote l'ensemble. Toute l'astuce du système repose dans le jeu de tuyauteries et de vannes (voir infographie). En sortie de pompe se trouve un premier T qui divise le circuit en deux : d'un côté, un tuyau de gros diamètre (50 mm) qui s'élève verticalement à environ 2 m de hauteur pour retomber dans le bidon, de l'autre côté, un morceau de tuyau d'arrosage de diamètre 25 mm au bout duquel se trouve une première vanne. Quand cette vanne est fermée, le lait retourne directement dans la cuve via le tuyau de 50 mm, assurant ainsi un brassage avec l'eau chaude. Après la première vanne, le circuit se divise à nouveau en deux au niveau d'un second T. Une première branche est connectée à un tuyau de 25 mm de diamètre, enroulé du bas vers le haut autour d'un seau. Cet enroulement forme un serpentin vertical dont l'extrémité haute retombe également dans le bidon. Sur l'autre branche du T se trouve une seconde vanne, prolongée par un petit tuyau de vidange, placé en descente sur le côté du chariot juste à hauteur des seaux à remplir. Le tuyau enroulé en serpentin mesure 5,10 m. Une longueur qui n'a pas été choisie au hasard puisque le volume interne du tuyau entre la vanne et le haut du serpentin est exactement de 2,5 l. « Pendant la traite, je place directement la canne dans le grand bidon, explique Bertrand. Ensuite, j'emmène le taxi-lait à la nurserie. Sur place, nous avons installé un chauffe-eau électrique. J'ajoute un quart du volume d'eau bien chaude et je mets la pompe en route pour que le brassage commence. Aussitôt, je recule le chariot jusqu'au fond de l'allée à côté du premier cornadis. Le tuyau de vidange doit être placé juste au-dessus du seau à remplir. »
« LE SERPENTIN CONTIENT 2,5 L, LA DOSE POUR UN VEAU »
À ce stade, il ne faut pas perdre de temps pour éviter que le mélange ne refroidisse. Pour commencer la distribution, Bertrand ouvre la première vanne, ce qui interrompt le brassage. Le lait emprunte un nouveau circuit et vient remplir le serpentin poussé par la pompe et par la pression dans le gros tuyau en hauteur. En quelques secondes, le serpentin est rempli et du lait ressort à l'autre extrémité. À ce moment, Bertrand referme la première vanne d'une main et ouvre la seconde avec l'autre main. Le serpentin qui n'est plus alimenté se vide complètement par gravité dans le seau et le veau reçoit sa dose de 2,5 l. En parallèle, la pompe qui fonctionne en permanence renvoie du lait dans le gros tuyau, qui sert alors de réserve tampon. Une fois la vidange du serpentin terminée, Bertrand rebascule les deux vannes dans leur position précédente et avance le chariot jusqu'au veau suivant. Pendant ce déplacement, le serpentin de 2,5 l se remplit et une fois le chariot en place, il suffit de tourner simultanément les deux vannes pour distribuer une nouvelle dose de lait au second veau. L'opération est répétée ainsi autant de fois que nécessaire.
« LE LAIT N'A PAS LE TEMPS DE REFROIDIR »
« Cela fonctionne bien, assure l'éleveur. Le lait n'a pas le temps de refroidir, surtout avec l'eau chaude que je rajoute au départ. Quand tous les veaux ont bu, je rince le bidon et le circuit. Une fois par semaine environ, j'ajoute aussi un peu de lessive. »
Ce taxi-lait n'a coûté qu'une centaine d'euros en pièces achetées (pompes, roues...), car pour l'essentiel, Romain a utilisé des matériaux de récupération. Quant au temps passé, il estime l'avoir déjà rattrapé par le gain obtenu en réduisant la contrainte du travail. Ce taxi-lait a été cité en juin 2015 parmi les dix meilleures astuces d'agriculteurs, lors d'un concours organisé par les chambres d'agriculture de Normandie.
Avec le taxi-lait artisanal conçu par son fils, Bertrand Lallemand nourrit jusqu'à 50 veaux en vingt minutes environ. L'EXPLOITATION : À Lithaire (Manche). Gaec à 2 associés + 1 apprenti. 80 vaches prim'holsteins et normandes. 500 000 l de lait. 140 ha de SAU. 30 à 40 jeunes bovins. © D.L.
L'éleveur recule le chariot jusqu'au fond de l'allée, puis revient en distribuant une dose dans chaque seau. © D.L.
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