LES PIONNIERS DU SEMIS SOUS COUVERT PERMANENT

Bertrand Duvernois, expérimenté en semis direct sur 300 ha en sols argilo-limoneux, souhaite passer progressivement en couverts permanents sur toutes les parcelles. © RAPHAEL HELLE
Bertrand Duvernois, expérimenté en semis direct sur 300 ha en sols argilo-limoneux, souhaite passer progressivement en couverts permanents sur toutes les parcelles. © RAPHAEL HELLE (©)

Le Gaec Duvernois sème en direct depuis dix ans et passe aujourd'hui au semis sous couvert pérenne de légumineuses. Objectif : gagner en productivité et baisser les intrants. Première tentative sur 9 ha de maïs.

LE GAEC DUVERNOIS A SEMÉ SES MAÏS FIN AVRIL sur 95 ha, destinés pour moitié à l'ensilage et pour moitié à la récolte en grains. Cela s'est fait en semis direct, comme l'ensemble des cultures de cette exploitation située à Taxenne, dans la plaine du Jura. De toute façon, il n'y a plus de matériel de travail du sol au sein de ce Gaec à quatre associés, sur 430 ha (310 ha de cultures et 120 ha de prairies), 1 million de litres de lait et des boeufs. Les agriculteurs, convertis aux techniques culturales simplifiées en 1998, ont adopté le semis direct en 2004. Accompagnés dans ces changements par Serge Augier, responsable de la Franche-Comté au négoce Sépac et très investi sur le développement du semis direct, ils abordent aujourd'hui une nouvelle étape : Bertrand Duvernois teste, sur 9 ha, la culture de maïs semé dans des couverts permanents (en place pour environ cinq ans) de légumineuses.

20 % DE RENDEMENT EN PLUS OU 80 UNITÉS D'AZOTE ÉCONOMISÉES

« Sur 7 ha, j'ai semé mon maïs dans un couvert vivant de luzerne, et sur 2 ha de la même parcelle, où le sol est plus hydromorphe, je l'ai semé dans un couvert vivant de lotier, détaille l'agriculteur. Je travaille déjà avec des couverts annuels d'interculture entre récoltes et semis de cultures de printemps (maïs, soja). Mais les couverts permanents, c'est nouveau. L'objectif serait de passer, à terme, en semis sous couvert permanent sur toute l'exploitation. »

Serge Augier, promoteur des pratiques d'agriculture de conservation, suit aujourd'hui plus de 20 000 ha en semis direct sur la région. Il considère le semis sous couverts vivants comme la pratique la plus aboutie en semis direct. « L'objectif est clair : rendre les sols plus fertiles et accroître la productivité, tout en diminuant les intrants. » Au-delà d'une couverture du sol efficace contre les levées d'adventices permettant d'utiliser moins de phytosanitaires, Serge Augier insiste en effet sur les bénéfices globaux des couverts permanents pour la vie du sol et le système de culture. « Grâce à leur descente racinaire, ces légumineuses pluriannuelles créent une fissuration profonde, remontent les éléments minéraux du sol, favorisent leur absorption et celle de l'eau par les cultures. Elles stockent l'azote, enrichissent le sol en matière organique sur 50-60 cm, améliorent la portance des sols..., apprécie-t-il. On doit réaliser, à rendement constant, une économie d'azote de 70-80 unités par hectare. Ou, compte tenu d'une augmentation de productivité attendue, rester à dose constante d'azote pour 20 % de rendement supplémentaire. Et la qualité des blés devrait également s'améliorer grâce aux légumineuses. »

Bertrand Duvernois pointe un autre avantage : « Un couvert permanent éliminera nos habituelles difficultés (manque de temps, sécheresse fréquente...) à implanter des intercultures après récolte. » Histoire d'anticiper son essai sur maïs, il avait semé, en août 2014, du colza dans une luzerne fourragère en place depuis quatre ans. « Le semis s'est déroulé sans difficultés, puis le colza s'est très bien développé », constate-t-il. Fin avril, il a donc semé sereinement 10 % de sa surface en maïs sous des couverts vivants, implantés depuis mars 2014, puis fauchés et désherbés (voir photos).

UN COÛT DE DÉSHERBAGE DIVISÉ PAR TROIS

Au niveau de la fertilisation de ces maïs, sachant qu'il récolte « en moyenne 103 quintaux secs par hectare en grains et 18 t de MS/ha en ensilage », Bertrand Duvernois table sur un total qui avoisinera les 150 unités d'azote par hectare (15 t de fumier épandues en sortie d'hiver, 20 kg/ha au semis de microfertilisation de N, P et oligoéléments, puis un apport d'urée). « Un test GPN sera réalisé. » À l'échelle de la rotation, « j'ai déjà apporté 30 unités de moins sur le blé récolté en 2014, et j'espère gagner 70 unités par hectare les années suivantes », résume Bertrand Duvernois.

Du côté du désherbage, l'agriculteur compte bien « diviser le coût par trois ». Ayant désherbé sélectivement la luzerne en sortie d'hiver, sa stratégie dépendra des adventices, évidemment contrées par le couvert qui « après le stade six feuilles du maïs peut monter sans poser de problèmes », déclare-t-il.

UN SEUL TRAITEMENT PAR AN ET PAR HECTARE CONTRE LES MALADIES

Quant aux fongicides dans les années à venir, Serge Augier table sur « un traitement par hectare et par an (c'est déjà le cas sur près de 70 % des surfaces) ». Car il prévoit une moindre pression des maladies grâce à l'association de plantes.

Enfin, la coupe de luzerne (3 t de MS/ha) et de lotier (1,5 t de MS/ha) enrubannée en septembre 2014 a servi de fourrage au troupeau. Un point que Bertrand Duvernois apprécie, même si fournir du fourrage n'est pas le but des couverts permanents. « En effet, il ne faut pas tout récolter. Sinon, il y a trop d'exports et on n'obtient pas les effets agronomiques recherchés ! », pointe Serge Augier.

CATHERINE REGNARD

Semée en direct en mars 2014 dans un blé, récoltée à l'automne, puis désherbée au printemps, la luzerne formant le couvert permanent de la parcelle s'est développée suffisamment, mais sans excès, afin de ne pas gêner l'implantation du futur maïs. Dans l'objectif que la luzerne ne dépasse pas une dizaine de centimètres de haut lors du semis de maïs, Bertrand Duvernois a utilisé une variété à démarrage tardif (quinze jours plus tard qu'une luzerne classique).

© RAPHAEL HELLE

Dans la parcelle de 9 ha où Bertrand Duvernois teste le semis de maïs sous couvert vivant, la luzerne occupe la partie la plus saine (7 ha).

Le semis de maïs a eu lieu le 25 avril, à l'aide du semoir direct à double disques de l'exploitation.

© RAPHAEL HELLE

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Vaches, charolaises, U= France 7,46 €/kg net =
Vaches, charolaises, R= France 7,23 €/kg net =
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