Menu

[Interview] Lallemand Animal NutritionComment limiter l’effet de la sub-acidose autour du vêlage ?

Stress du vêlage, transition alimentaire, perte d’état corporel, etc. Les premières semaines de lactation mettent le métabolisme de la vache laitière à rude épreuve. Pour Laurent Dussert, responsable de la gamme additifs ruminants chez Lallemand Animal Nutrition, les levures vivantes et les antioxydants peuvent aider à limiter les pertes liées à une efficacité ruminale moindre. Interview.

Laurent Dussert Lallemand Animal Nutrition
Laurent Dussert. Lallemand Nutrition Animal commercialise des levures et des additifs ainsi que des inoculants bactériens pour les ensilages. (©Terre-net Média)

Web-agri : Que se passe-t-il dans le rumen après le vêlage ?

Laurent Dussert : L’ingestion baisse de près d’un tiers dans les jours qui précèdent le vêlage, cela est suivi d’une transition alimentaire parfois assez brutale lorsque la vache fraîchement vêlée rejoint le troupeau. Le passage de la ration de tarissement à une ration à haut niveau d’énergie va nécessairement modifier la flore ruminale et augmenter le temps passé en sub-acidose. D’autant que la capacité d’ingestion des fibres reste limitée.

Après le vêlage, les populations de bactéries et champignons fibrolytiques tendent à se réduire, laissant la place aux bactéries amylolytiques qui risquent de transformer l’énergie disponible en acide lactique. Ainsi, une vache produit quotidiennement 6 à 7 litres d’acide. Le pH d’un rumen sain se situe entre 6,2 et 6,6, mais celui-ci peut descendre en-dessous de 5,8 de pH. L’animal est alors en sub-acidose. L’acidité attaque les papilles ruminales qui s’érodent et réduisent leur surface d’absorption, pouvant aller jusqu’à créer des dommages irréversibles sur la barrière épithéliale.

Selon les pratiques d’alimentation (nombre de distributions, Dac,…), le pH peut être assez variable au cours de la journée et de la nuit. Par ailleurs, certaines vaches tolèreraient mieux l’acidose que d’autres. Les levures vivantes spécifiques ruminants Levucell SC, de type Sacharomyces cerevisiae, (souche CNCM I-1077), que nous produisons servent non seulement à extraire plus d’énergie des fibres de la ration mais aussi à limiter l’acidose et les stress alimentaires comme les changements de silo, la mise à l’herbe, ou à mieux supporter des températures élevées (stress thermique).

Rumens de bovins viande pris en abattoirs : à gauche les papilles sont saines.
Rumens de bovins viande pris en abattoirs : à gauche les papilles ruminales sont saines et bien développées, tandis que le rumen de droite a été "cramé" par l'acidose avec une grande partie des papilles détruites et donc une moindre surface d'absorption des nutriments. (©Lallemand)

Comment ces levures vivantes peuvent-elles limiter l’acidose ?

LD : L’acidose est un cercle vicieux car un rumen en sub-acidose, en dessous de 5,8 pH, aura d’autant plus de difficultés à dégrader les fibres. Ainsi la digestibilité de la fibre (NDF) se réduit de 3 % à chaque fois que le pH descend de 0,1 point.

Les levures vivantes Levucell SC ont prouvé leur efficacité depuis de nombreuses années et font l’objet d’une soixantaine de publications scientifiques. Ces levures vivantes augmentent significativement le pH du rumen : de + 0,1 point de pH sur des rations riches en fibres, jusqu’à + 0,5 point de pH en moyenne sur des rations à haut niveau d’amidon.

Car les levures ont des effets indirects sur les conditions ruminales en augmentant l’activité enzymatique (polysaccharides-hydrolases et glycosidases) des bactéries cellulolytiques et en limitant la production d’acide lactique. En effet, les levures parviennent à stabiliser le pH du rumen puisqu’elles réduisent l’activité de bactéries productrices de lactate et aident à la multiplication de celles consommatrices de ce lactate.

Par ailleurs, une vache ingère chaque jour 7 à 8 litres d’oxygène, mais l’O2 est très toxique pour l’écosystème ruminal. Les levures contribuent à consommer cet oxygène afin de maintenir les conditions anaérobies et l’équilibre bactérien.

Tous ces éléments permettent d’améliorer l’efficience alimentaire et notamment l’efficacité des fibres. Avec les levures, la dégradabilité de la NDF augmente ainsi de + 3,8 points pour de l’ensilage de maïs, et jusqu’à + 6,7 points de digestibilité pour de l’ensilage d’herbe ou de l’herbe pâturée. Les levures jouent également sur le comportement des animaux puisque nous avons mesuré que les vaches supplémentées passent en moyenne 22 minutes de plus couchées à ruminer dans leurs logettes. De même, le comportement alimentaire est également plus régulier, on a montré que les proses alimentaires étaient plus fréquentes et moindre avec la levure vivante, ce qui contribue également à maintenir l’équilibre du rumen.

Quelles sont les performances laitières attendues ?

LD : La majorité des essais montrent un gain de production de 1 à 1,3 kilo de lait corrigé par vache et par jour sur l’ensemble de la lactation, avec une différence pouvant aller jusqu’à + 2,7 kg de lait au pic de lactation. Le taux butyreux augmente lui aussi de + 0,12 % à + 0,43 %, sans évolution significative du TP. De plus, ces performances laitières sont obtenues tout en limitant la perte d’état corporel. Car produire du lait c’est une chose, mais il ne faut pas oublier qu’une vache doit aussi être en mesure de se reproduire deux à trois mois après avoir vêlé. Un essai de l’université de Munich a montré qu’après cinq mois de lactation, le taux de gestation était de 63 % dans le lot témoin, tandis que 82 % des vaches du lot ayant reçu Levucell SC étaient gestantes.

Pour conserver une bonne fertilité, il faudrait idéalement que les vaches perdent moins d’un point de note d’état durant les cinq semaines qui suivent le vêlage. Grâce aux levures, la perte d’état corporel est moins marquée avec un poids moyen supérieur de 9,7 kg pour les vaches supplémentées en Levucell SC.

Lallemand travaille également sur le stress oxydatif chez l’animal, en quoi cela peut-il être utile aux bovins ?

LD : Nous savons que le status antioxydant des animaux est mis à mal autour du vêlage, qui représente une importante source de stress oxydant. Cela va impacter la vache mais aussi son veau (comptage cellulaire, baisse d’immunité, veaux malades…). Un apport en antioxydants est ainsi fortement recommandé pour booster l’immunité, la fertilité ou la vivacité des jeunes. Nous avons développé deux solutions antioxydantes complémentaires d’origine naturelle :

Alkosel apporte du sélénium organique contenu dans des levures inactivées. Comparé à la sélénite, le sélénium sous forme organique est particulièrement assimilable par les animaux. Avec une quinzaine d’essais, la levure au sélénium Alkosel est la référence de biodisponibilité chez le ruminant (+ 200 % de sélénium dans le lait que pour le sélénite à dose équivalente). Ce sélénium est produit à partir d’une souche de levure sélectionnée, il joue un rôle primordial sur les défenses immunitaires, utiles pour lutter contre les infections mammaires par exemple. Le sélénium est notamment transféré dans le lait et le colostrum pour améliorer le transfert d’immunité de la vache à son veau. Cet oligoélément influence également la fertilité et la qualité du lait et de la viande qui perd alors moins d’eau et se conserve plus longtemps.

Melofeed est une solution antioxydante innovante et unique à base de jus et pulpe de melon concentré naturellement riche en antioxydant primaires, les enzymes superoxyde dismutase (SOD) et catalases. Ces enzymes sont importantes pour lutter contre le stress oxydatif des cellules, et activer les défenses naturelles notamment chez les jeunes animaux. La SOD est documentée comme déficiente naturellement chez les veaux autour du sevrage ou les vaches en transition.

Antioxydants primaires (SOD, catalases), sélénium, et antioxydants secondaires (vitamines E…) jouent des rôles complémentaires dans les systèmes de défenses antioxydantes de l’organisme. Ainsi l’apport d’Alkosel et Melofeed a montré des effets synergiques, notamment pour favoriser la croissance des veaux et contribuer à réduire les comptages cellulaires dans le lait de vache ou de chèvre dans les élevages à problèmes.

 

Réagir à cet article

Sur le même sujet