Un temps gagné qui coûte cher !

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Un temps gagné qui coûte cher !

Les rations sèches pour vaches laitières sont apparues en France, en 2003, suite à la sécheresse. Pour les éleveurs, cette solution permet de réduire les temps d’astreinte liés à l’affouragement hivernal. Mais, l’augmentation du coût des matières premières pourrait remettre en question ce choix. Résumé d’une enquête menée par les Chambres d’agriculture de Bretagne et l’Institut de l’élevage.


La première motivation des éleveurs, qui passent en ration sèche,
est la diminution de l’astreinte autour de l’alimentation des vaches.
(© Terre-net Média)

L’Institut de l’élevage et les Chambres d’agriculture de Bretagne ont décidé, en 2007, d’interroger les éleveurs ayant recours aux rations sèches.

Objectif : mieux connaître les raisons de leur adoption, les conditions pratiques et les modifications de systèmes engendrées par leur mise en œuvre.

« Les conséquences sur les performances, le travail et le niveau de satisfaction des éleveurs ont également été analysées », souligne Gérard Losq, des Chambres d'agriculture de Bretagne.

Trois raisons

Pour réaliser cette enquête, les partenaires se sont appuyés sur les organismes de contrôle laitier, qui ont recensé quelques 174 élevages pratiquant les rations sèches, répartis dans 65 départements français. Pour l’étude, 51 élevages ont été sélectionnés. La première motivation des éleveurs est la diminution de l’astreinte autour de l’alimentation des vaches, argument qui sort en premier lieu pour trois éleveurs sur quatre.

La seconde motivation est la place du maïs dans le système d’alimentation : en passant aux rations sèches, et donc en s’abstenant du maïs, les éleveurs suppriment de fait les travaux liés à l’atelier et se libèrent du temps (semis, récolte) ; mais, ils trouvent également une solution aux rendements insatisfaisants ou aux qualités de maïs insuffisantes qui ne permettent pas, selon eux, de garantir une ration parfaite au niveau qualitatif et quantitatif. Enfin, la 3e raison mise en avant est celle des investissements : en arrêtant la culture de maïs, il s’évite l’entretien inévitable des silos et du matériel à remplacer.

Un choix remis en question

L’enquête montre clairement que l’objectif premier, qui a guidé les éleveurs à s’orienter vers les rations sèches, est la réduction du temps d’astreinte. Si en 2003, le choix économique était justifié, avec l’évolution ces derniers mois du coût des matières premières, il pourrait toutefois être remis en question. Une seconde enquête téléphonique, réalisée un an après l’enquête initiale, a d’ailleurs confirmé cette possibilité : sur 18 élevages enquêtés, cinq éleveurs avaient abandonné la ration sèche et deux étaient passés en ration demi-sèche.

Les exploitations enquêtées

  • Elles sont de taille importante en moyenne avec 131 ha de Sau ;
  • La part de Sfp est également élevée (59 %), dont 35 % de maïs avant l’adoption de la ration sèche ;
  • Le troupeau est de 49 VL en moyenne, pour un quota d’environ 390.000 l de lait ;
  • Les éleveurs sont plutôt jeunes (41 ans) et disposent de 2,1 unités de main d’œuvre en moyenne.
Ces éleveurs, qui ont recours aux rations sèches, peuvent également s’appuyer sur une production personnelle de fourrages. « Le foin est présent dans 80 % des élevages, mais sa qualité est souvent moyenne, voire médiocre dans un tiers des cas », précisait Gérard Losq. À noter que ce fourrage est généralement conservé en balles rondes.

En complément de la ration sèche, les quantités de fourrages amenées sont toutefois très variables d’un élevage à l’autre, entre 4,5 et 14 kg/j. « Dans la majorité des cas, la distribution est manuelle. » Les concentrés (granulés ou gros bouchons) représentent en moyenne 65 % de la ration. En moyenne toujours, les éleveurs distribuent des parts importantes de concentrés (environ 17 kg/VL). « Un éleveur sur deux a investi dans un Dac, et un sur quatre dans un nourrisseur. Mais, dans 30 % des cas, le concentré est distribué manuellement à l’auge et à l’aide d’une brouette… un travail astreignant ! »

Evolution notable du système fourrager

Outre la quasi disparition de l’atelier maïs, le passage à la ration sèche a également une incidence sur le système fourrager, avec une augmentation de la surface en prairie. « Le maïs ensilage est remplacé par du maïs grain, des céréales et des oléagineux. » Les résultats zootechniques sont également affectés par le changement. On note en particulier :

  • une augmentation moyenne de la production (+3,1 kg lait/j/VL) ;
  • une baisse du TB (-4,3 g/kg) et du TP (-0,5 g/kg) par rapport à une ration conventionnelle ;
  • une sous-réalisation du droit à produire d’environ 11.000 l de lait.

« Mais ces changements de performances ne sont pas imputables en totalité à la ration sèche », poursuivait Gérard Losq. Principale évolution, celle attendue par les éleveurs : la baisse du temps d’astreinte. L’enquête a démontré qu’elle variait de 5,5 à 11 mn/VL/semaine.

Des coûts alimentaires augmentés de 25 %

Par ailleurs, les éleveurs mettent en avant d’autres avantages amenés par ce changement : une pénibilité en baisse (pas de rebâchage, travail au sec). Mais, tout cela ne doit pas occulter le fait que le passage à la ration sèche a entraîné une baisse des résultats économiques (cité par deux éleveurs sur trois) : en effet, les coûts alimentaires sont en forte augmentation puisque l’enquête montre qu’ils sont passés de 83 à 104 €/1.000 l « dans les exploitations où cette approche économique a pu être réalisée », précisait le technicien breton. Par ailleurs, « les niveaux d’Ebe (hors main d’œuvre) situent ces élevages dans le quart inférieur des exploitations lait spécialisées, avec moins de 150 €/1.000 l de lait ».

Pour aller plus loin

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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