Qu'est ce qu'on entend par « mieux vivre » ? Résultats de l'enquête Onilait réalisée sur un échantillon de 600 producteurs de lait en Avril 2000 : Quelles sont leurs principales priorités pour l'avenir ? Pour 36% : l' amélioration de la qualité de vie. Pour 21% : l' augmentation de son revenu. Pour 18% : transmettre l'exploitation dans les meilleures conditions. Résultats de l'enquête robot du laboratoire d'économie de l'élevage de l'INRA de Clermont Ferrand : à 91% la motivation d'achat d'un robot de traite répond à un problème de travail. Un constat sur le terrain : La main d'œuvre devient le facteur le plus limitant sur de nombreuses exploitations ; Les éleveurs se tournent d'abord vers l'automatisation avant le recours à la main d'œuvre extérieure
On polémique beaucoup autour du robot de traite, pourtant la mécanisation et l'automatisation en élevage laitier ce n'est pas nouveau !
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La production laitière a en effet connu un rythme de modernisation intense et a su intégrer un grand nombre de technologies nouvelles.
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Cette modernisation est aujourd'hui remise en cause par les dernières crises qui ont secoué l'élevage (dioxine, ESB, OGM) et qui ont accentué une opposition entre une agriculture «industrielle » utilisant des technologies modernes mais peu avouables, et une agriculture plus « authentique », qui associe production de qualité et occupation de l'espace.
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Dans ce contexte il est difficile de parler de traite robotisée sans déclencher une polémique et sans se faire classer dans un camp ou dans l'autre.
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Opposer ainsi une agriculture moderne « mauvaise » et une agriculture traditionnelle « bonne » nous semble un débat stérile. L'enjeu est au contraire de pouvoir allier modernité et tradition.
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L'arrivée du robot de traite est une nouvelle étape importante; il permet en effet ce qui paraissait encore inconcevable il y a peu de temps : remplacer totalement l'homme pour le travail de la traite.
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C'est une technologie nouvelle, qu'il faut encore apprivoiser, et qui, comme les autres, amènera son lot d' avantages mais aussi d'inconvénients dont il faudra tenir compte.
Quelques exemples d'automatismes en élevage laitier : Des avantages mais parfois des effets pervers .
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Les automatismes en salle de traite : ils n'ont cessé d'évoluer : décrochage automatique, compteurs à lait, tandems, traites arrières à sortie rapide, roto tandems, identification automatique, mesures de conductivité. Ce qui a été recherché : cadence de traite élevée et confort pour l'animal et le trayeur. Cette évolution conduit cependant parfois à des installations surdimensionnées, coûteuses, et qui induisent des effets pervers si elles sont mal utilisées : développement de mammites, traite en dépit de la physiologie des animaux, cadence très rapide incompatible avec une bonne hygiène de traite.
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Le DAC : Il a été conçu il y a 25 ans pour simplifier et rationaliser la distribution du concentré. Que constate t'on ? Ce n'est pas le DAC mais la manière de l'utiliser qui permet ou non des économies de concentrés
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Les Remorques désileuses, mélangeuses, peseuses, distributrices : Elles ont permis de simplifier le rationnement des animaux, mais là aussi le meilleur y côtoie le pire :
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Le pire : mélanges compliqués de co-produits coûteux , réduits en bouillie et qui n'arrangent ni le porte monnaie de l'éleveur ni la santé des animaux.
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Le mieux : simplification du rationnement, utilisation de matières premières, ajustement ration calculée - ration distribuée grâce à la pesée, bilans de consommation, maîtrise du coût de la ration totale.
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Le fin du fin : Ceux qui ont réussi à simplifier encore plus le travail en déléguant totalement la distribution des rations à des machines en cuma.
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Le DAL à veaux : Peut être le petit frère et précurseur du robot de traite. Il a créé une petite révolution en supprimant « la corvée des seaux de lait » à l'heure de la traite. Depuis 5 ans le bilan est largement positif : plus grande souplesse de travail, meilleure santé des veaux, meilleure gestion des aliments mais à condition d'une surveillance très régulière des animaux et de la machine.
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Les racleurs automatiques : Ils permettent un raclage du bâtiment plusieurs fois dans la journée sans intervention humaine et sans déranger les vaches. Combien de chaînes, cependant, ont été récupérées dans le fumier avant que l'hydraulique ne supprime cet inconvénient et fiabilise énormément ces matériels.
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Enfin ne négligeons pas les « petits automatismes » qui peuvent paraître coûteux, mais qui apportent un gain de temps et un confort de travail difficilement chiffrables : lavages de tank automatiques, barrières poussantes d'aires d'attente, portes à ouverture automatique, caméras de surveillance, podomètres et autres mesureurs d'activités, ceintures de vêlage à monitoring, etc…
Plus que l' automatisme lui-même, c'est son adaptation à une exploitation donnée, et la manière de l'utiliser, qui compte dans la réussite ou l'échec de son installation.
Quelles nouveautés peut on attendre pour l'avenir ?
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Le robot de traite n'est qu'à ses débuts et va continuer à se développer et à s'améliorer.
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Des évolutions vont certainement se faire dans le domaine de l'assistance à la traite : (bras automatisés, mesures de conductivité).
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Enfin l'informatique sur les exploitations devra évoluer. Les automatismes fournissent une quantité importante de données. Il y a donc de gros besoins en solutions informatiques pour les collecter, les trier, les garder en mémoire, effectuer les tâches répétitives et les retransmettre :
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A l'éleveur sous forme de tableaux de bord simples pour l'aider à piloter son élevage.
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Aux différentes administrations : plans d'épandage, données de traçabilité, déclarations PAC.
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Aux organismes de gestion : afin d'améliorer la vitesse et la fiabilité des enregistrements.
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Ces innovations contribuent elles au mieux vivre des producteurs ?Permettent elles effectivement un gain de temps, et les conditions de travail sont elles réellement améliorées ?
Oui mais à condition de respecter les conditions d'utilisation.
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Ne pas espérer un gain de temps important mais plutôt, une réduction des besoins en main d'œuvre sur les exploitations. L'automatisation amène une plus grande souplesse et diminue la pénibilité du travail.
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Remettre à plat son organisation du travail et sa manière de travailler : qui fera quoi ?
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Etre conscient des nouvelles contraintes, des effets pervers, de la part d'inconnu qu'il existe dans toute nouveauté, et qu'il faut bien intégrer dans son organisation.
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Garder à l'esprit que ces automatismes ne remplaceront jamais l'œil, le savoir faire, et le pouvoir de décision de l'éleveur . Ils apporteront les meilleurs résultats chez les meilleurs éleveurs.
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Les éleveurs doivent se former à l'utilisation de ces technologies.
L'Automatisation coûte cher. Ne risque t'elle pas de fragiliser financièrement les exploitations ?
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Ces coûts sont à relativiser par rapport à d'autres coûts de mécanisation ( Salle de traite arrière, tracteur, moissonneuse batteuse). On investit souvent plus facilement en cultures qu'en élevage.
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Ils sont à relativiser par rapport au coût du travail qui, souvent, n'est pas pris en compte: Quel est le revenu horaire du travail de l'éleveur comparé au coût horaire de la main d'œuvre ? Entre l'exploitation qui dispose de main d'œuvre familiale qui ne compte pas ses heures, et celle qui devra dans un avenir proche avoir recours à de la main d'œuvre salariée les préoccupations seront très différentes. ( ex : un Dal à veaux de 60.000 F qui permet de gagner 2h00 par jour de main d'œuvre extérieure à 85 F / heure sur 150 j sera amorti en 3 ans).
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Automatisation: luxe ou nécessité ? Cela dépend souvent de l'age de l'éleveur, de sa situation financière, de la structure de la main d'œuvre : familiale certaine ou incertaine, salariée.
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Ces investissements sont souvent réalisés sur des exploitations bien assises financièrement ou avec plusieurs ateliers qui peuvent financer en partie l'investissement dans le lait.
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Attention de ne pas compromettre l'avenir de jeunes exploitations en cédant à des effets de mode. ( on peut encore racler des couloirs au tracteur en attendant de pouvoir se payer un racleur automatique)
L'Automatisation en élevage n'est ce pas aussi une certaine promotion du métier de producteur de lait ?
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Les éleveurs, comme d'autres catégories professionnelles, ont le désir légitime de faire évoluer leur métier. Pourquoi ne profiteraient ils pas eux aussi des nouvelles technologies ?
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Certains éleveurs sont et resteront des pionniers et des innovateurs qui contribuent à mettre au point les nouveautés pour les autres.
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L'automatisation permet de dégager du temps de travail de routine pour en consacrer plus à l'observation du troupeau et à la partie « éleveur » et gestionnaire du métier de producteur de lait.
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La limite : Attention à ne pas perdre sa liberté d'entreprise : Ne pas entrer dans un système d'intégration avec dépendance des éleveurs vis à vis de firmes : ( problème de la maintenance et de la mise à jour future de matériels pointus comme les robots de traite).
L'Automatisation ne risque t'elle pas de ternir l'image de qualité des produits laitiers ?
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L'automatisation permet la standardisation de certains processus, et peut assurer par là même, un certain niveau de qualité des produits ( ex : moins d'intervention humaine, lavages systématisés, détection plus précoce des mammites par mesure de conductivité du lait).
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Elle permet d'assurer une certaine traçabilité de la production sans enregistrements manuels fastidieux. ( ex : consommation d'aliments au DAC, données de compteurs à lait).
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La mise en place d'automatismes nécessite par contre souvent le renforcement des mesures d'hygiène préventive. ( ex cas de la lutte contre les butyriques avec le robot de traite).
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Attention à ne pas faire n'importe quoi . ex le robot de traite oui peut-être, mais en bâtiment zéro pâturage sur lisier intégral avec 2 logettes pour 3 vaches : certainement pas. Il y a une responsabilité des producteurs, des constructeurs, et de la filière en général d'accompagner et encadrer la mise en place de ces nouveautés pour préserver l'image de la filière.
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L'automatisation peut ainsi, ne pas être compatibles avec l'image de haute qualité de certains produits. Si cette image permet de dégager une forte valeur ajoutée, il sera légitime de se démarquer ainsi de produits plus standards. ( ex des machines à vendanger non utilisées dans les grands vignobles ).
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En production laitière, et contrairement à d'autres élevages hors sols, l'automatisation contribue plutôt à la notion de bien-être des animaux ( respect du rythme naturel et réduction des stress) , à condition là aussi de respecter les autres critères de bien-être liés au logement.
L'Automatisation ne concerne t'elle pas finalement qu'une petite frange d'exploitations?
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Il est clair que l'automatisation et la robotisation à outrance ne conviennent pas ou ne sont pas conseillées économiquement dans certaines situations de production laitière :
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Exploitations reposant en grande partie sur le pâturage,
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Très grosses structures qui économiquement auront intérêt à embaucher des salariés,
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Zones où un tissu dense d'exploitations permet le travail en commun ou la sous-traitance.
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Par contre, dans certaines zones de déprise de la production laitière, ils contribueront certainement à maintenir des structures familiales, de taille relativement importante, solides financièrement mais confrontées à de gros problèmes de manque de main d'œuvre.
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L'automatisme seul ne suffira pas si l'on ne recrée pas également une nouvelle dynamique correspondant aux préoccupations de ces éleveurs . ex : groupes d'échange robot en utilisant les possibilités de communication d'Internet qui réduiront les distances.
L'automatisme et la robotisation en production laitière ce n'est pas qu'une affaire de technique ; c'est surtout une affaire d'Hommes.
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Au niveau de l'exploitation, ne pas s'attacher qu'aux aspects techniques, certes importants, mais souvent faciles à résoudre, Il faut également s'intéresser aux conditions d'utilisation, aux répercussions économiques( charge financière + coût réel de fonctionnement), et à l'organisation du travail autour de ces innovations. Elles doivent s'intégrer dans la cohérence de l'exploitation. L'éleveur doit se former pour en tirer le meilleur parti
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Au niveau de la filière laitière : Ne pas rejeter à priori le progrès qui répond à une aspiration légitime, mais veiller à la mise en place de garde-fous pour éviter les dérives qui peuvent ternir l'image de la production laitière.
Philippe Wallet
BTPL
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