« Nos taries sont parfois un peu à l’étroit »

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Virginie Jounot, son fils Thomas (à g.), son neveu Elouan (à dr.), et  Fabien Vaillant, conseiller d’élevage à BCEL Ouest.c.ruelle
Virginie Jounot, son fils Thomas (à g.), son neveu Elouan (à dr.), et Fabien Vaillant, conseiller d’élevage à BCEL Ouest.c.ruelle (©c.ruelle)

Les Jounot chouchoutent leurs taries. En filmant ce lot de vaches, ils ont découvert des détails qui peuvent les aider à progresser encore.

Installés en 2007, Virginie et David Jounot travaillent dans la continuité de ce que faisaient les parents de ce dernier. Le troupeau reste stable autour de 45 vaches et est hébergé sur la même aire paillée. Le couple a conservé aussi l’atelier d’ovins pour la viande.

« Notre système est plutôt intensif avec une moyenne d’étable à 9 700 litres. Les vaches en lactation pâturent 20 ares et le silo de maïs est toujours ouvert », précise Virginie. Leur conduite a été remise à plat dans l’objectif de réduire les fièvres de lait, un peu trop nombreuses à une époque. « Avant, le maïs n’était pas rationné. Nous avons revu l’apport de minéraux aussi. La ration est calculée pour diminuer le Baca. »

Une ration sur mesure durant le dernier mois de gestation

À partir d’un mois avant le vêlage, les taries reçoivent 7 kg de MS d’ensilage de maïs, 1,5 kg de tourteau de colza, un minéral spécial pour les taries, du chlorure de magnésium (100 à 150 g/vache) et de la paille à volonté. Le mois précédent, elles sont en pâture, en fonction de la saison.

« On les rentre pour les préparer au vêlage », précise David. Les génisses en fin de gestation les rejoignent. Pour elles qui vont vivre leur premier vêlage, la présence du groupe réduit le stress. Cela facilite leur intégration dans le troupeau par la suite. Les éleveurs constatent qu’avec cette conduite, les animaux sont plus calmes.

Ces vaches en fin de tarissement sont logées à proximité de la stabulation des vaches en lactation. Leur surveillance est aisée. Et il suffit de bouger les barrières pour les faire changer de lot. Une personne seule y arrive. Elles disposent d’une aire paillée de 10 x 10 m, dont une partie est occupée par le râtelier. L’auge offre 14 places. « On les bloque quand on distribue la ration pour éviter la compétition. »

Les naissances se produisent dans l’espace des taries. Les éleveurs reconnaissent que l’aménagement d’un box à vêlage présenterait des avantages sur les plans sanitaire et pratique. Mais pour l’instant, cela fonctionne. Quand il est nécessaire d’intervenir, les autres vaches peuvent être bloquées au cornadis. La case est paillée tous les jours et vidée toutes les trois semaines. Après un vêlage, la délivrance est ramassée et les éleveurs paillent de nouveau.

Cette conduite simple dans un bâtiment ancien donne de bons résultats. L’intervalle entre vêlages s’établit à 368 jours contre 405 jours pour le groupe (troupeaux à plus de 9 500 kg de lait/vache). Il suffit de 1,6 insémination pour obtenir un veau (contre 2,1). Le taux de réussite à la première insémination s’élève à 61 % pour les vaches (42 % pour le groupe). Virginie ajoute que les résultats de reproduction se sont améliorés depuis qu’ils utilisent le monitoring pour détecter les chaleurs.

Les frais vétérinaires ne dépassent pas 50 € par vache

Le changement de ration a permis de réduire le nombre de fièvres de lait et d’améliorer les démarrages de lactation. Au premier contrôle, les multipares ont produit 44 kg et les primipares 30 kg. L’an dernier, les éleveurs ont enregistré une non-délivrance et une métrite sur 64 vêlages. Les frais vétérinaires se limitent à 50 €/vache (127 € pour le groupe). Les pertes induites par les problèmes sanitaires sont évaluées à 70 €/VL.

Par ailleurs, les veaux démarrent bien. Le taux de mortalité est à 6 %, contre 11 % pour le groupe. Virginie vérifie la qualité du colostrum avant de le distribuer.

Malgré ces bonnes performances, les éleveurs ont été intéressés quand BCEL Ouest leur a proposé de filmer leurs taries. « Une vidéo de ce type a été réalisée sur un élevage de notre groupe lait, raconte Virginie. Cela m’a plu d’observer le comportement des vaches en l’absence des éleveurs. On voit comment elles mangent ou boivent, les dominantes. »

Une caméra a été posée au-dessus du box pendant vingt-quatre heures en avril. Cinq vaches et une génisse en fin de gestation étaient présentes. On voit qu’en fin de matinée, certaines vaches continuent de manger lorsque le cornadis est ouvert. La ration est distribuée le matin. Si les vaches sont bien rationnées, il ne reste rien au bout de deux heures. Là, ce n’est pas le cas. Virginie n’est pas surprise, elle sait qu’elle peut mieux faire. « On ne pèse pas la ration. » Quand elles ont fini de manger, la plupart des vaches vont boire. Leur caractère grégaire saute aux yeux sur la vidéo, même à l’échelle d’un petit groupe. On voit aussi les relations de domination. L’abreuvoir mesure 120 cm de long et offre un volume de 30 l avec un niveau constant. Il est bien placé sur le côté. Toutes les vaches peuvent y accéder facilement. Sauf que la dominante se place parfois devant, empêchant les autres d’approcher.

« Quand plusieurs vaches boivent en même temps, on constate que le niveau peut tomber bas. Il faut un peu de temps pour qu’il remonte, faute d’un débit suffisant », remarque Yannick Saillard, vétérinaire chez BCEL Ouest. En revanche, il n’existe pas ici de comportement dominant gênant en ce qui concerne le râtelier à paille. Il est net aussi que les vaches connaissent l’heure de distribution de la ration. Aucune ne mange de paille en début de matinée, comme si elles voulaient garder de la place pour leur vrai repas ! Et le film montre l’importance des contacts entre les lots. Les animaux de cases voisines se recherchent.

des barrières pour agrandir quand le lot est plus important

Les vaches se répartissent bien sur l’aire paillée quand elles se couchent. Mais elles n’étaient pas très nombreuses au moment où la vidéo a été tournée. Elles sont parfois une dizaine et là, les éleveurs savent que la surface est un peu juste. « Nous réfléchissons à un jeu de barrières pour agrandir la surface quand le lot est plus important, sans trop réduire l’espace des vaches en lactation. » Lorsque le box est un peu trop chargé, il y a plus de mammites ensuite.

La réalisation de la vidéo s’accompagne d’un examen détaillé de la zone filmée et des animaux. La lumière et la ventilation doivent être suffisantes dans tout le box. La propreté des vaches est importante (pattes, poils). Elle reflète le risque d’infections (mammites, leucocytes, boiteries infectieuses). De même, les taries doivent disposer d’une auge propre et d’une eau claire. Leur note d’état doit être inférieure à 3,5. L’état d’engraissement est parfois trop élevé, ce qui entraîne des difficultés au vêlage ou encore des risques d’amaigrissement trop prononcé et d’acétonémie par la suite. La température de la litière est vérifiée. Mieux vaut rester en dessous de 35°C, ce qui est le cas ici. Au-delà, le risque de mammites augmente. Par ailleurs, l’état des bouses est conforme à ce qui est attendu chez des vaches taries (note 3 à 3,5).

Virginie et David sont plutôt confortés dans leurs pratiques par cette observation de leurs vaches taries. Ils savaient que tout n’était pas parfait. Ils font aujourd’hui la part des choses entre ce qui ne doit pas être remis en question et les postes sur lesquels ils peuvent progresser.

Pascale Le Cann

© P.L.C. - État. La réalisation de la vidéo s’accompagne d’une observation des animaux pour vérifier qu’ils sont en bon état (voir encadré Repères).P.L.C.

© P.L.C. - Bouses. Pour les taries, les bouses doivent être semi- compactes (note 3 à 3,5), ce qui correspond à la texture d’un yaourt épais.P.L.C.

© P.L.C. - Réfractomètre. Virginie utilise cet appareil de mesure de la densité optique pour évaluer la qualité du colostrum et choisir celui qu’elle va distribuer ou congeler.P.L.C.

© P.L.C. - À proscrire. Ce type d’abreuvoir disposé dans un coin sera rarement utilisé par les vaches dominées. Elles auront peur de s’engager dans cet endroit sans issue.P.L.C.

Aperçu des marchés
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