Observer son troupeau pendant une longue durée via une caméra a permis à Maxime Le Floch, éleveur, d’enrayer une chute de production.
Maxime Le Floch, installé en Gaec avec ses parents dans le Morbihan, possédait deux stalles de robot qui n’étaient pas saturées. Il a acheté un contrat en 2015 pour produire 240 000 litres de lait supplémentaires. L’objectif était de monter progressivement en production via une augmentation de l’effectif sans aménagement de bâtiment. Quelques vaches ont été achetées, mais l’essentiel de la croissance s’est fait en interne. Le régime alimentaire n’a pas été modifié. Les vaches pâturent du printemps à l’automne. La ration est distribuée le matin. En hiver, elle se compose d’ensilage de maïs (13 kg de matière sèche), d’ensilage d’herbe (2,5 kg) et de betterave (2 kg). Deux kilos de correcteur azoté sont apportés à l’auge. Cette ration est calculée pour une production de 30 kg par vache et par jour. Les problèmes métaboliques sont rares. Les éleveurs repoussaient parfois le fourrage manuellement au cours de la journée.
Le constat
Une chute de production inexpliquée
Dès l’hiver 2016, quand les 120 vaches se sont retrouvées dans le bâtiment, la production a chuté de 3 à 4 kg par vache laitière et par jour. Faute de trouver une explication, les éleveurs en ont parlé à leur consultant Pascal Le Méro, de Bretagne Conseil élevage Ouest. Il leur a proposé de placer une caméra dans la stabulation pendant quarante huit heures en juillet 2017. L’objectif était d’observer les animaux pour détecter un éventuel problème. Ils ont accepté.
les observations
Une ration inaccessible la nuit, un abreuvement insuffisant, des vaches qui ne se couchent pas
En visionnant les films, il s’est avéré que dès minuit, les vaches n’avaient plus accès au fourrage. Elles n’étaient donc pas alimentées à volonté comme le pensaient les éleveurs. Une observation confirmée par les notes de remplissage du rumen. Elles apparaissent hétérogènes avec plus de 20 % des vaches notées en dessous de deux. Le manque d’accès aux fourrages créait une compétition entre les animaux, au détriment des primipares et des vaches en début de lactation. Par ailleurs, l’aspect des bouses était lui aussi hétérogène. De plus, environ 20 % des vaches restaient longtemps debout dans les logettes avant de repartir ou de s’y coucher. Une preuve évidente d’inconfort. 20 % des vaches avaient une marque sur le cou, attribuée à un mauvais positionnement de la barre des logettes.
L’observation des vaches a aussi montré qu’elles devaient parfois attendre pour boire, faute d’accès à l’abreuvoir. Certaines finissaient par renoncer. Parfois, elles étaient plusieurs à boire ensemble à un même abreuvoir. Or, le débit permis était sans doute alors insuffisant. 20 % des vaches avaient les naseaux secs. La visualisation des circuits a montré aussi que l’accès à l’eau n’était pas pratique à la sortie du robot, au moment où les vaches ont le plus besoin de boire.
Maxime a fait des relevés de consommation d’eau. Par déduction, il a évalué l’alimentation des abreuvoirs. Il s’est aperçu qu’elle était inférieure de 30 % aux besoins des vaches : nous étions à 50 litres par vache et par jour. De plus, il y avait des courants parasites dans les abreuvoirs. Et la concentration en chlore était trop élevée.
Les actions
Ajouter deux abreuvoirs, alimenter le soir et régler les logettes
Deux abreuvoirs supplémentaires ont été installés dont l’un dans l’aire d’attente. Les éleveurs ont tout de suite constaté que les vaches y allaient. Il y avait un réel besoin. Les relevés de compteur ont confirmé une hausse de la consommation. La teneur en chlore a été réduite.
La distribution de la ration est faite désormais le soir. Un changement d’organisation tout à fait gérable et qui permet aux vaches d’avoir accès au fourrage durant la nuit. Pendant la journée, il faut repousser de temps en temps, mais les éleveurs sont là pour le faire.
Dans les logettes, la barre au garrot a été reculée de 5 cm. Maxime reconnaît qu’il avait choisi un réglage un peu court pour que les bouses tombent à l’extérieur et qu’il passe moins de temps à l’entretien des logettes. Mais en voyant ses vaches piétiner au lieu de se coucher, il a pensé que le confort était primordial.
Le résultat
4 kg de lait de plus par vache et par jour
La production individuelle a gagné 4 kg par jour en deux semaines, sans changement de la ration ni du mois moyen de lactation. Elle s’est stabilisée ensuite. Cet effet est surtout marqué en début de lactation. Cela représente 10 000 l supplémentaires par mois, soit environ 3 000 € de recettes en plus quasiment sans surcoût.
Le Gaec pourra donc produire la totalité de sa référence laitière. Le coût alimentaire, qui était monté à 140 €/1 000 litres, est redescendu à 110 €.
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