« J’évite les à-coups pour la croissance de mes génisses »

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Choyer. Pour compenser un bâtiment difficile, Lydie Lacroix est aux petits soins pour ses veaux. Le sevrage en extérieur et l’alimentation avec un mash fibreux portent leurs fruits.

Depuis son installation il y a douze ans (d’abord avec son père puis en individuel), Lydie Lacroix s’est totalement impliquée dans l’atelier lait, veillant à travailler la génétique, l’alimentation et le sanitaire. Résultat : la production laitière du troupeau est passée de 152 000 litres en 2006, avec 32 vaches en vêlages d’automne, à 500 000 litres avec 60 vaches à la traite en moyenne.

Ce développement s’est fait avec une stabulation paillée à la capacité limitée (32 places pour les vaches et 15 pour les génisses), qu’il a fallu aménager à moindre coût pour loger le cheptel en croissance (1). Qui plus est, le bâtiment dédié aux jeunes était mal orienté et ventilait difficilement. « Les veaux toussaient sans être malades, précise Lydie. Il faisait chaud l’été et froid l’hiver. Avec l’arrêt des taurillons de 18 mois hébergés sous ce même toit, l’ambiance s’est améliorée depuis deux ans. » De la place a été récupérée pour les génisses, ce qui permet d’élever plus de renouvellements et de mieux trier. Toutes les femelles sont génotypées. Elles sont conservées si elles répondent aux critères de sélection : le tempérament, la santé (mamelles, cellules) et les bons aplombs.

« Une vache qui se tient bien va manger quand elle a faim, souligne la jeune éleveuse. Elle ne va pas se coucher tout de suite après la traite. On évite des maladies. » Pouvoir garder toutes ses génisses est appréciable : cela permet de réformer plus facilement en cas de problèmes de cellules ou de reproduction.

Seule avec un salarié et un apprenti depuis 2017, Lydie a un objectif : produire du lait simplement avec des animaux qui continuent à pâturer et qui se sentent bien. « Mes animaux ne sont pas poussés mais expriment leur potentiel. Le vétérinaire, peu présent sur la ferme, vient essentiellement en cas de problèmes de vêlages. »

« Être présente aux vêlages est indispensable »

Des vêlages qu’il n’est pas question de louper, même si l’éleveuse n’intervient pas souvent. « Être présente est indispensable. Un animal se construit dès sa naissance. Pour assurer son immunité et donc sa santé future, il est essentiel de lui donner du colostrum tout de suite. Par ailleurs, c’est à partir de ce moment que le lien avec l’animal s’établit. » Un point très important pour Lydie qui n’a pas envie de « passer du temps à courir après les animaux ».

La jeune éleveuse ne délègue à personne les soins aux veaux. En niches extérieures les dix premiers jours, les petits veaux restent désormais dehors jusqu’au sevrage. Ils sont placés en igloo (12 animaux au maximum pour 16 places) jusqu’à l’âge de trois mois à trois mois et demi.

Un mash fermier à 50 % de fibres

Initialement nourris au lait de vache, foin et aliment spécial veaux plutôt riche, ils sont aujourd’hui alimentés avec du lait et un mash fermier à 50 % de fibres. « Ils sont moins grassouillets, mais développent une belle panse. »

Distribué à volonté à l’abri sous un auvent, l’aliment est renouvelé tous les jours. Chaque soir, les refus sont enlevés et donnés aux veaux sevrés. Le midi en apportant de l’eau, Lydie Lacroix secoue le mash dans les seaux pour l’aérer. « Les veaux craignent la salive des autres, et puis ça éveille leur appétit. C’est impressionnant la quantité que l’on passe. » En case collective, des veaux de dix jours côtoient des veaux presque sevrés, ce qui les incite, par mimétisme, à consommer rapidement du mash. Cette pratique semble contraire aux préconisations en matière de microbisme. « Mais quand les petits veaux ont bien eu leur colostrum, ils ont fait leur immunité », estime-t-elle.

Pour le lait, Lydie est repassée à deux repas par jour. La transition se fait en douceur, avec un demi-litre par repas avant sevrage. Quand les veaux rentrent en stabulation, ils sont habitués à manger de la fibre. Ils n’ont pas le double stress du sevrage et du changement de bâtiment.

Les problèmes de digestion difficile lors de la transition du colostrum au lait de ferme ont été réglés à 75 % grâce à l’utilisation partielle de lait en poudre. « Les petits veaux ne souffraient pas de diarrhée infectieuse, ils gardaient de l’appétit, explique notre interlocutrice. Mais j’étais parfois obligée de couper le lait au moins un jour en donnant des sachets pour éviter l’irritation de l’intestin. » Entre le quatrième et le septième jour après la naissance, au lieu de moitié lait de la mère et moitié lait de tank, Lydie distribue désormais moitié lait en poudre (riche en lait écrémé) et moitié lait de tank. « Je suis convaincue de l’intérêt de la poudre, plus stable, mais mon tank déborde. »

Une croissance améliorée

Le logement en extérieur et l’alimentation au mash ont porté leurs fruits.

Le premier lot élevé dehors jusqu’au sevrage eut une bien meilleure croissance que tous les lots précédents. « D’après le suivi au ruban réalisé avec Acsel Conseil Élevage, nous avons gagné deux, voire trois mois sur l’âge prévisionnel au premier vêlage, passant de 27-30 mois à 24-27 mois. »

Pour prémunir son troupeau des maladies importées, Lydie Lacroix n’achète aucun animal à l’extérieur. Tous les ans, les vaches et les génisses sont vaccinées contre la BVD un mois avant la mise à la reproduction.

« J’ai trop de voisins de pâture. Je ne prends pas de risque. Je me protège, je les protège. »

Anne Bréhier

(1) De l’autre côté de l’aire d’alimentation ont été aménagées une case pour quinze vaches en lactation, une autre pour les taries, ainsi qu’une aire de stockage pour les génisses.

© a.B. - Igloo. Avec douze veaux par case pour seize places, il n’y a pas de concurrence entre les veaux (petits et gros). Les auges de mash ne sont jamais vides et l’eau est toujours disponible.

© Lydie Lacroix - Biberons.Les veaux sont sevrés en extérieur. Les biberons sont laissés un moment après la tétée. « Les veaux ont besoin de succion, observe Lydie. En niche collective, ils se tètent moins entre eux. »

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Thomas Pitrel dans sa prairie de ray-grass

« La prairie multi-espèce a étouffé le ray-grass sauvage »

Herbe
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

Alsace Lait

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