Zoonose. La bactérie qui cause la tuberculose bovine, très contagieuse, est résistante et incube durant plusieurs mois. La détection n’est pas fiable à 100 %. Certaines zones sont mises sous surveillance avec, chaque année, une campagne de prophylaxie.
L es autorités sanitaires maintiennent la pression sur la surveillance de la tuberculose bovine dans les élevages. Autour des foyers détectés est mise en place une zone de prophylaxie renforcée, d’un rayon de 2 à 10 km en fonction des situations. À l’intérieur, de novembre à mai, tous les cheptels bovins sont soumis à un dépistage, que les éleveurs vivent difficilement (encadré ci-contre). La France tient à son statut « indemne de tuberculose bovine », qui lui permet de commercialiser sans entrave les animaux au sein et hors de l’Union européenne, et les produits laitiers vers les pays tiers (dont le Royaume-Uni). Pour le conserver, le taux de troupeaux officiellement indemnes doit être supérieur à 99,9 % pendant six années consécutives – soit moins de 220 cas par an.
La tuberculose bovine transmissible à l’homme
« La tuberculose bovine est une zoonose », a rappelé récemment Claire Osdoit, à l’occasion d’une formation sur la maladie organisée par les GDS et GTV (groupement technique vétérinaire) de l’Orne. Il y a peu encore, avant son départ à la retraite, elle était vétérinaire au GDS 61. Une partie de ce département est en prophylaxie renforcée depuis 2018.
« La bactérie Mycobacterium bovis est transmissible à l’homme, reprend-elle. Avec moins de dix cas répertoriés, la tuberculose bovine reste très rare en France, et concerne des personnes âgées contaminées il y a des années. Dans les pays où la lutte est moins organisée, elle peut représenter jusqu’à 30 % des cas de tuberculose humaine. » Avec 1,4 million de décès chaque année, la tuberculose humaine est une des dix premières causes de mortalité dans le monde (notamment en Afrique).
« Soigner la tuberculose bovine est interdit, complète Frédéric Lallet, vétérinaire à L’Aigle (Orne). Le traitement antibiotique, long, n’est pas administré aux bovins, car si une antibiorésistance humaine apparaît, il n’existera pas d’autres solutions thérapeutiques. » De même, la vaccination préventive des bovins est interdite afin d’éviter la confusion, lors de l’identification des animaux porteurs, entre les anticorps liés au vaccin et ceux dus à l’infection.
La lutte par la détection des bovins infectés est, elle aussi, compliquée. Les tests ne sont pas fiables à 100 % (voir encadré). La bactérie incube plusieurs mois et peut survivre également plusieurs mois dans le sol, la pâture ou les milieux humides non exposés au soleil. « L’expression de la maladie est souvent asymptomatique », ajoute Claire Osdoit. Comme elle est très contagieuse, et sauf dérogation, l’assainissement par abattage total du troupeau est la solution retenue par les pouvoirs publics pour éviter sa propagation directement d’un élevage à un autre et via la faune sauvage, en particulier les blaireaux, porteurs de la bactérie. Entre bovins, elle se fait principalement par voie respiratoire. « Après expectoration au cours de la toux, un bacille peut rester jusqu’à trente minutes en suspension dans la stabulation, en hiver. Or, il en suffit d’un pour infecter un bovin », détaille Frédéric Lallet. Le lait, les déjections, le sperme des taureaux et les sécrétions utérines sont d’autres sources d’excrétion du bacille. Les contaminations liées aux blaireaux s’effectuent principalement par voie urinaire : ils excrètent… 10 millions de bactéries dans 50 ml d’urine !
Engager un plan de biosécurité
En dehors de la campagne annuelle de prophylaxie, le principal moyen de lutte est donc la prévention, grâce à des mesures de biosécurité. Le premier objectif est d’empêcher l’introduction de Mycobacterium bovis (et d’autres agents infectieux) dans l’exploitation. Si cela se produit malgré tout, il faut éviter la circulation de la bactérie dans le troupeau et l’infection des personnes intervenantes. Il faut également éviter qu’elle en sorte et puisse persister dans l’environnement (bâtiments, pâtures, etc.). Le reportage sur la biosécurité paru dans L’Éleveur laitier n° 309 de septembre 2021 (p. 61) détaille un bon exemple des mesures prises vis-à-vis des visiteurs (parking, pédiluve), des achats d’animaux (quarantaine), de la circulation des engins, etc.
Contact direct entre troupeaux voisins : le risque multiplié par 6,8
Les résultats de l’enquête, menée par l’Anses en 2014-2015 dans 225 élevages de Dordogne, de Côte-d’Or et des Ardennes, permettent de mieux cibler les principales mesures à prendre. Le premier facteur de contamination est le contact direct mufle à mufle entre troupeaux voisins de pâture. « Entre élevages non foyers et foyers de la même zone, le risque est multiplié par 6,8, et concerne aussi l’IBR ou la BVD », indique Claire Osdoit. La solution la plus immédiate est l’entretien des clôtures et l’installation de doubles clôtures, permanentes ou temporaires, éloignées d’au moins 1,5 m. L’abreuvement partagé entre bovins de cheptels différents ou dans des points d’eau naturels est le deuxième facteur de risque : il est multiplié par 3,4, selon l’Anses. Des cours d’eau mis en défens, des bacs à 80 cm de haut, la désinfection des abreuvoirs au moins deux fois par an, le réduisent.
L’achat d’herbe sur pied est également vecteur de contact avec les bovins voisins ou avec un environnement contaminé (risque multiplié par 3). Au rang des facteurs de risque, on retrouve logiquement l’introduction d’animaux dans le troupeau (risque multiplié par 2,3), ainsi que les bâtiments isolés (2,1 fois plus de risque) : la faune sauvage s’y introduit avec beaucoup moins de crainte. Ne pas nourrir les animaux le soir, fermer systématiquement les portes du bâtiment, protéger les fronts d’attaque avec des bâches ou des fils électriques, etc. sont autant de moyens pour décourager les blaireaux, et la faune sauvage en général.

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