Huiles essentielles. Les deux essais conduits par l’Adage 35 sur le traitement des mammites subcliniques par les huiles essentielles ne répondent pas aux attentes. Les résultats observés sont équivalents à ceux de la guérison spontanée.
Entre 2015 et 2017, le Civam Adage 35 a piloté le projet Arôm’Adage, visant à répondre à la problématique suivante : comment traiter les mammites subcliniques à l’aide d’huiles essentielles ? Cette approche alternative aux antibiotiques a bénéficié des financements de la Région, du département et de la laiterie Triballat.
Dans le cadre de ce projet, des éleveurs membres de l’association ont constitué un groupe de travail et mis en place les essais en deux temps :
- de mars à août 2015, 22 vaches issues de six exploitations et 6 vaches de la ferme expérimentale de l’Inra de Mirecourt ont été traitées et suivies ;
- de novembre 2015 à mars 2016, 12 vaches de cinq exploitations.
Dans un premier temps, il s’agissait d’animaux à plus de 400 000 cellules, n’ayant reçu aucun traitement le mois précédant les essais. Le seuil a été réduit à 300 000 cellules lors de la deuxième phase d’essai. Le protocole testé était proposé par Michel Derval, aromathérapeute. Sa préparation combine trois huiles :
- Cinnamomum zeylanicum (écorce) appliqué en un spray sur l’ombilic ;
- Elettaria cardamomum(semences) avec deux sprays de chaque côté au niveau du pli du grasset ;
- Daucus carota (semences cultivées) en un spray de chaque côté sur les lunules des pattes arrière. « Ce protocole visait à stimuler les défenses immunitaires et à lutter contre les germes pathogènes dans la mamelle », explique l’aromathérapeute. Résultat : seules 4 vaches sur 40 enregistrent des résultats satisfaisants, soit deux comptages successifs inférieurs à 300 000 cellules au cours des trois mois suivant le traitement.
Des staphylocoques difficiles à éliminer
Trente analyses bactériologiques exploitables, à J + 30 et J + 60, révèlent que seulement deux vaches laitières ont totalement éliminé la souche bactérienne présente dans leur quartier avant le traitement. Onze l’ont éliminée, mais ont été réinfectées par une autre. Les bactéries les plus présentes sont des staphylocoques aureus et des streptocoques uberis et dysgalactiae. « Le protocole n’a pas répondu aux attentes du groupe, tant au niveau des comptages cellulaires que des infections bactériennes, explique Edith Chemin, coordinatrice de l’Adage. Les mauvais résultats bactériologiques s’expliquent par une forte proportion de germes difficiles à éliminer, avec des résultats équivalents à ceux de la guérison spontanée. »
Pour ne pas s’obstiner sur les cas incurables, un troisième essai a été reconduit en 2017 avec quelques ajustements (19 vaches de dix fermes, sélectionnées après deux comptages supérieurs à 300 000 cellules et sans mammites dans la lactation en cours) et un nouveau protocole :
- Cinnamomum zeylanicum(écorce) appliqué en un spray sur l’attache de la queue ;
- Ravensara anisata (écorce) en deux sprays au niveau de l’ombilic ;
- Pinus ponderosa en un spray sur l’ombilic.
Résultat : aucune vache n’a réduit durablement ses comptages cellulaires dans les trois mois qui ont suivi ce protocole.
Un observatoire pour aider à choisir l’huile la mieux adaptée
Ces résultats ne surprennent pas Loïc Jouet, praticien en Ille-et-Vilaine : « Les streptocoques et surtout les staphylocoques peuvent s’enkyster dans la mamelle, où même les antibiotiques ne peuvent pas les atteindre. Les voies à explorer contre les mammites subcliniques passent donc par la gestion de l’immunité : il faut aider la vache à lutter elle-même contre l’infection, au lieu de cibler des molécules agissant sur le germe. Certaines huiles essentielles ou préparations homéopathiques soutiennent l’immunité, mais on sait encore trop peu de chose scientifiquement », explique Edith Chemin.
En effet, l’aromathérapie scientifique en médecine humaine n’a que 40 ans et certaines huiles concentrent jusqu’à trois cents molécules, aux propriétés anti-inflammatoires, antibactériennes, antivirales, décongestionnantes, relaxantes… « Chacune a une action propre. Elles sont interactives, ce qui offre des milliards de combinaisons possibles, mais on ne sait presque rien de façon scientifique sur la dynamique de réaction chez l’animal », souligne Michel Derval.
Sur le terrain, les éleveurs avancent en groupe, identifient des protocoles leur apportant satisfaction contre d’autres maladies (voir infographie).
Il est donc nécessaire non seulement de structurer la recherche, mais aussi de faire fructifier ces expériences de terrain et les échanges pour aider chacun à choisir les huiles les mieux adaptées. Dans l’attente, l’Adage 35 anime des formations et propose, en libre-service sur son site, un guide pratique d’utilisation des huiles essentielles, enrichi de témoignages.
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