Fièvre Q : une zoonose grave mais méconnue

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Enquête. Responsable d’avortements chez les bovins et chez l’homme, la fièvre Q touche environ 30 % des élevages bovins. Le Comité fièvre Q s’inquiète du faible niveau de connaissance de la maladie chez les éleveurs comme chez les vétérinaires.

Si la plupart des éleveurs et vétérinaires pensent que la fièvre Q provoque des avortements, beaucoup n’en sont pas sûrs. Et seulement 27 % des médecins associent cette maladie à un risque élevé pour la santé humaine. Parmi les éleveurs dont le troupeau a été contaminé, seulement un sur deux a pris des mesures de protection pour lui-même et pour ses proches.

Ces chiffres sont issus d’une enquête réalisée par le Comité fièvre Q auprès d’échantillons représentatifs d’éleveurs, de vétérinaires et de médecins exerçant en zone rurale. Ils donnent une idée du chemin à parcourir pour lutter efficacement contre la fièvre Q.

Et pourtant, cette zoonose d’origine infectieuse n’est ni nouvelle ni rare. Une autre enquête s’est intéressée à sa prévalence dans le Finistère et la Loire-Atlantique, deux départements où l’élevage est très présent. Elle a montré que 55 % des éleveurs, 90 % des vétérinaires et 12 % des donneurs de sang présentaient des anticorps trahissant un contact direct avec la bactérie responsable de la maladie.

Une petite bactérie très résistante

Cette bactérie, Coxiella burnetii, a la particularité d’être très petite et résistante. Les animaux contaminés l’excrètent en grande quantité au moment de la mise bas. On la retrouve aussi dans les fèces, de manière sporadique, ou dans le lait à des doses non contaminantes. La bactérie peut rester présente dans la poussière et le sol durant quatre à cinq mois. Le vent peut la transporter sur dix-huit kilomètres, contaminant ainsi d’autres élevages. L’infection se produit le plus souvent par inhalation, parfois par ingestion, mais aussi par le sang, via des tiques. Les précautions à prendre pour limiter les risques de contagion découlent de ces caractéristiques. Les animaux suspects doivent être isolés, surtout au moment de la mise bas. Les locaux doivent ensuite être désinfectés et les produits du vêlage sont à détruire. L’épandage d’effluents­ d’élevages touchés est à proscrire lorsqu’il y a du vent. Les personnes en contact doivent se protéger : masque, gants, changement de vêtements. Un élevage contaminé ne doit pas recevoir de public.

Un impact sur la reproduction

Le symptôme le plus visible est l’avortement. Chez l’homme, l’infection est le plus souvent asymptomatique (60 % des cas). Elle peut entraîner un syndrome pseudo-grippal, voire plus rarement, une hépatite ou une endocardite. Le danger majeur concerne les femmes enceintes avec un risque élevé de fausse couche.

Si près de la moitié des éleveurs soupçonnent la fièvre Q en cas d’avortement, ils minimisent souvent les autres conséquences, qui sont pourtant réelles. Le laboratoire Ceva a travaillé avec GDS Bretagne et Évolution pour regarder les performances de reproduction des élevages contaminés par la fièvre Q. La fertilité y est inférieure à la moyenne de sept points. Des études ont également montré que dans les troupeaux infectés, le risque de métrites est multiplié par 2,5 et celui de rétention placentaire par 1,5. L’intervalle entre le vêlage et la fécondation s’allonge de deux semaines chez les vaches contaminées. Cette infection favorise aussi les vêlages prématurés et la naissance de veaux chétifs. La fièvre Q a donc un impact économique diffus mais non négligeable. Sa prévalence est évaluée à 30 % dans les troupeaux bovins, 55 % des ovins et 60 % des caprins. Des avortements en série doivent faire penser à la fièvre Q.

Les avortements doivent être déclarés

Rappelons que les avortements doivent être déclarés. Selon Oscar (Observatoire et suivi des causes d’avortements chez les ruminants), sur 866 séries d’avortements bovins étudiées, 46 % ont été élucidées. La néosporose est impliquée dans 15,4 % des cas, la fièvre Q suit avec 9,7 % et la BVD est à 7,7 %. Il est essentiel que les avortements soient déclarés pour déterminer leur origine et qu’un plan de lutte soit mis en place. On estime qu’un tiers ne le sont pas. L’enquête du Comité fièvre Q montre aussi que la complexité du protocole proposé en cas de suspicion de fièvre Q constitue un frein à la maîtrise de la maladie. Les prélèvements en vue du diagnostic ne sont pas toujours réalisés dans des conditions optimales. Le choix des animaux à prélever se révèle trop complexe. Les éleveurs et les vétérinaires doivent savoir qu’en cas d’avortement déclaré, les analyses et les visites du vétérinaire sont prises en charge par le GDS dans le cadre de la surveillance de la brucellose.

Une fois le diagnostic posé, la lutte passe par la vaccination. Son efficacité est démontrée, mais là encore, il existe un manque d’information. Dans l’enquête, seulement quatre vétérinaires sur dix citent la vaccination comme moyen de maîtrise de la fièvre Q. Le plus souvent, elle est réalisée dans l’urgence alors qu’il s’agit d’abord d’un outil de prévention. Elle permet de limiter les avortements, d’améliorer la fertilité et de diminuer l’excrétion de la bactérie dans l’environnement. Compte tenu de la durée de vie de la bactérie, la vaccination doit être poursuivie durant au moins cinq ans, ce qui est rarement le cas. Cet état des lieux conduit le Comité fièvre Q à chercher des moyens d’agir pour améliorer l’information des éleveurs, vétérinaires et médecins sur la maladie. Des fiches techniques seront produites à destination de ces différents publics sur des thèmes précis : quand suspecter la fièvre Q ? Ou encore, quels prélèvements réaliser en cas de suspicion ? Une première série de fiches a été mise en ligne sur le site internet de GDS France (1) en juin 2021. Une deuxième suivra en septembre.

pascale le cann

(1) https ://www.gdsfrance.org/, taper « fièvre Q » dans la zone de recherche.

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