Un dimanche après-midi, je reçois un appel pour un veau né le matin même sans anus… Les quelques mots échangés au téléphone laissent présager une euthanasie. L’éleveur souhaite, malgré tout, que je passe l’après-midi même. Je me rends donc sur l’exploitation accompagné de Jérémy, un stagiaire, pour voir le phénomène.
Arrivés sur place, nous constatons que le veau est en bon état général. Il a bu son colostrum normalement, mais l’éleveur commence à le trouver gêné du fait de ne pas pouvoir déféquer, et pour cause… Sur ce veau, croisé normand charolais, il n’y a non seulement pas d’anus mais pas de queue non plus ! Il n’a aucune vertèbre coccygienne.
Une simple incision pour pouvoir évacuer les selles
Après avoir examiné le veau dans la région pelvienne, nous pensons sentir du méconium (premières selles) derrière le bassin du fait de l’absence de vertèbre coccygienne, ce qui semblerait indiquer que le système digestif est complet, mis à part l’anus. Heureusement, nous ne sommes pas dans le cas d’une atrésie du côlon.
Je discute avec l’éleveur et lui demande son accord pour tenter quelque chose. Nous réalisons donc à la ferme une anesthésie générale et locale, et abouchons le rectum à l’emplacement approximatif de l’anus : concrètement, il s’agit d’inciser la peau puis de suturer le rectum à cette ouverture. Une opération réalisée à deux, en 45 minutes. Grâce à cela, le veau peut évacuer son méconium et déféquer. En revanche, l’orifice ainsi créé n’est pas un anus et donc les selles s’évacuent de façon libre et ont tendance à souiller l’arrière-train en permanence. Malgré cela, le veau est sauvé et pourra être valorisé en veau de boucherie à l’âge de 4 mois. Des veaux nés sans queue ont déjà été décrits dans la littérature, cette anomalie n’est pas systématiquement associée à l’absence d’anus. J’ai personnellement vu, au cours de mes visites, un bœuf normand de 3 ans sans queue avec un anus fonctionnel, qui avait eu une croissance normale.
Cette anomalie du tractus gastro-intestinal demeure tout de même rare, et la cause en est inconnue. En revanche, l’atrésie du côlon est une autre anomalie du tractus gastro-intestinal, plus fréquente. Il s’agit d’une occlusion complète du côlon, le gros intestin.
Une prise en charge rapide
Contrairement au cas décrit, la plupart du temps, les veaux ont un anus fonctionnel mais ne peuvent pas évacuer le méconium du fait de l’occlusion au niveau du côlon. Si rien n’est fait, l’animal meurt intoxiqué des suites de proliférations bactériennes, en quelques jours. Cette anomalie fait l’objet de recherche par l’Observatoire national des anomalies bovines (Onab) pour en déterminer l’origine, en race prim’holstein, bien qu’elle ait été aussi décrite chez d’autres races. L’origine génétique est aujourd’hui fortement suspectée. La correction de cette anomalie est plus difficile et plus lourde que dans notre cas. En effet, l’intervention chirurgicale nécessite d’ouvrir l’abdomen et, le plus souvent, d’aboucher le côlon au niveau du flanc en le fixant à la paroi musculaire.
Qu’il s’agisse d’atrésie anale, comme ici, ou de l’atrésie du côlon, le seul traitement possible est chirurgical. Le succès de l’opération dépend de la gravité des lésions et de la précocité de la prise en charge. Ici, l’éleveur a été très réactif et le veau n’a pas eu le temps de souffrir de son atrésie. Malgré une prise en charge rapide qui permet de corriger ces anomalies avec succès, l’avenir du veau est bien souvent compromis pour la reproduction. De ce fait, la chirurgie semble plutôt à réserver à des veaux à valeur bouchère.
Matthieu Dutertre, vétérinaire dans la manche
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