BÂTIR UNE STRATÉGIE D'HYGIÈNE DE LA MAMELLE EN TROIS ÉTAPES

L'adhésion complète de l'éleveur est indispensable lors de la mise en place de la technique d'hygiène.© PHILIPPE DESCHAMPS
L'adhésion complète de l'éleveur est indispensable lors de la mise en place de la technique d'hygiène.© PHILIPPE DESCHAMPS (©)

Dans un premier temps, il est nécessaire de déterminer dans quel contexte épidémiologique se trouve l'élevage. Ensuite, il convient de mettre en place la bonne stratégie d'action, puis de choisir une technique d'hygiène adaptée.

LE VOLET PRÉVENTIF DES PLANS DE MAÎTRISE DES MAMMITES des vaches laitières est basé sur l'hygiène d'élevage, en particulier à la traite. La seule modification du produit de trempage ne peut en aucun cas constituer la clé de réussite d'un plan de lutte contre les infections mammaires. La prévention doit, au contraire, s'appuyer sur une stratégie d'hygiène en fonction de la situation épidémiologique de l'élevage. Elle se déroule en trois étapes.

Déterminer le contexte épidémiologique

Il est nécessaire de déterminer dans quel contexte épidémiologique se trouve l'élevage. Ce diagnostic se réalise grâce aux documents de l'exploitation. Les données du contrôle laitier sur les douze derniers mois et les comptages cellulaires dans le tank de la laiterie sur les trois dernières années doivent être recueillis. Il convient aussi d'étudier les informations du carnet sanitaire. Ces documents permettent de déterminer quatre contextes différents. Tout d'abord, on peut constater une situation sanitaire bien maîtrisée. Elle se rencontre lorsqu'il y a moins de 150 000 cellules dans le tank et moins de 20 % de mammites cliniques par an dans le troupeau. Dans ce cas, la pression infectieuse est faible et la mise en place d'un plan de prévention autre que celui existant n'est pas nécessaire. Ensuite, on peut mettre en évidence un contexte de mammites à réservoir mammaire. « Cette situation se présente lorsqu'il y a moins de vingt mammites cliniques pour cent vaches par an, mais plus de 250 000 cellules dans le tank. La contamination du troupeau s'effectue alors pendant la traite », explique Frédéric Lemarchand, responsable technique régionale chez Pfizer Santé Animale. Troisième situation épidémiologique rencontrée : un contexte de réservoir d'environnement. Dans ce cas, il y a plus de 20 % de mammites cliniques dans le troupeau et par an, mais moins de 250 000 cellules dans le tank. Les vaches se contaminent entre les deux traites. Il existe un dernier contexte où la situation épidémiologique n'est pas clairement définie (une situation sanitaire mixte). Dans ce cas, l'étude des documents papier doit être complétée par des analyses bactériologiques du lait. Un prélèvement sur, au minimum cinq vaches dans le troupeau doit être réalisé.

Utiliser la bonne stratégie d'action

La stratégie va dépendre de la situation épidémiologique qui prédomine dans l'élevage. Dans un contexte de mammites à réservoir mammaire, la stratégie consiste à limiter les contaminations croisées pendant la traite. Quand une vache infectée est traite mécaniquement, des bactéries persistent sur la paroi des manchons trayeurs. Il a été montré qu'une transmission de ces bactéries était possible à six vaches traites après la vache infectée. Dans ce cas, l'objectif est de limiter la multiplication bactérienne sur la peau du trayon à l‘issue de la dépose du faisceau trayeur. « Une application rapide du désinfectant après la traite permet sa pénétration dans le canal du trayon resté ouvert. Les bactéries présentes à ce niveau sont alors accessibles. En cas de mammites à réservoir mammaire, c'est l'action de désinfection post-traite qui est recherchée. » Lorsque la situation sanitaire de l'élevage est dégradée, il est également conseillé de désinfecter le trayon avant la traite.

Dans un contexte de mammites à réservoir d'environnement, la stratégie consiste à limiter les contaminations entre les deux traites. L'objectif est d'éviter la présence des agents pathogènes sur le trayon au moment de la traite et le contact direct des trayons avec l'environnement après la traite. « Dans ce cas, c'est l'action de nettoyage-séchage du trayon qui est recherchée. Lorsque la situation sanitaire de l'élevage est dégradée, le nettoyage-séchage peut être complété par une désinfection. » Ensuite, il est vivement conseillé d'utiliser un produit à effet barrière. Cette technique évite la pénétration, entre les traites, des germes d'environnement et trouvera tout son intérêt pour limiter les épidémies de mammites cliniques dites d'environnement de types colibacilles. Le mode d'application a également son importance : il doit assurer une bonne répartition de la solution sur toute la surface du trayon. Le gobelet ou le pulvérisateur avec gobelet sont préférables au pulvérisateur libre. Dans un contexte de situation mixte, il convient de combiner plusieurs techniques (voir infographie ci-contre).

Choisir sa technique d'hygiène de traite

La technique d'hygiène de traite est la dernière étape. Là encore, en fonction de la situation épidémiologique de l'élevage, certaines techniques sont davantage conseillées que d'autres. Dans un contexte de mammites à réservoir mammaire, mieux vaut éviter la douchette et l'essuyage papier au profit d'un prétrempage. Cette pratique apporte une décontamination plus efficace pour les bactéries présentes sur la peau du trayon (staphylocoques, streptocoques). Attention à laisser agir le produit durant environ trente secondes avant la traite, suivie d'un essuyage. Comparée aux lavettes individuelles et aux douchettes, cette technique n'est pas plus performante sur les germes d'environnement (coliformes, listeria…). Il ne faut pas oublier que la désinfection des trayons avant la traite peut être un risque de résidus dans le lait. Il est donc impératif de n'utiliser en prétrempage que des produits prévus à cet usage. En cas de mammites à réservoir d'environnement, l'utilisation de lavettes individuelles est la technique la plus conseillée. Certaines règles doivent cependant être rigoureusement respectées. Le savon doit comporter des agents adoucissants et avoir un pH adapté à la peau du trayon. Il convient de réaliser un premier nettoyage des trayons avec la lavette mouillée. Ensuite, on recommande de l'essorer, puis de la retourner pour réaliser un second passage. La désinfection des lavettes doit être réalisée avec des produits adaptés, qui sont à la fois détergents et désinfectants en respectant les concentrations préconisées par le fabricant. Il faut aussi s'assurer que les lavettes trempent bien dans le liquide désinfectant (l'eau de Javel sans détergent ne peut pas assurer une bonne désinfection). Le lavage régulier à la machine à laver, à l'eau très chaude (90 °C), avec un produit détergent est conseillé. L'essuyage papier complétant l'essuyage par la lavette améliore l'efficacité de la méthode, surtout sur les spores butyriques et les germes d'environnement.

La douchette peut donner des résultats satisfaisants, si cette technique est correctement réalisée. Le jet d'eau tiède doit être dirigé sur le trayon en ne mouillant pas le reste de la mamelle. Ensuite, l'essuyage avec une serviette à usage unique, en papier de bonne qualité (et surtout pas avec une lavette collective), doit être pratiqué. C'est une méthode qui paraît plus simple, mais qui prend plus de temps que les autres si elle est bien réalisée. Cette méthode fait l'économie du savon, mais n'a aucune action adoucissante sur la peau et peut parfois aggraver les problèmes de gerçures si l'essuyage est mal fait.

« L'adhésion complète de l'éleveur est indispensable dans la mise en place de la technique. Surtout si on souhaite le faire basculer d'une pratique à une autre. On préférera conseiller l'éleveur dans une technique qu'il a adoptée plutôt que de le forcer à changer radicalement de technique. »

NICOLAS LOUIS

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo

« L’IA ne remplace pas notre métier, elle le facilite »

Monitoring

Tapez un ou plusieurs mots-clés...