L’augmentation de volume et la mise en place du robot acheté dans une conjoncture laitière porteuse ont complexifié la gestion du troupeau au Gaec d’Albieux. Le changement de conduite demande à être optimisé.
Seuls depuis le départ à la retraite du père et de l’oncle de Cédric, les deux associés du Gaec d’Albieux ont décidé, en 2014, de simplifier leur système de production. « Avec 45 limousines, 50 laitières produisant 350 000 litres et tous les produits à l’engraissement, nous avions jusqu’à 280 bêtes, expliquent Arnaud Foron et Cédric Essertel. Les bâtiments étaient pleins. Nous avions l’impression de ne faire que pailler et sortir du fumier. Le troupeau allaitant exigeait beaucoup de travail de contention et de transport en bétaillère. Les vêlages commençaient sur notre second site à 2 km. Des veaux naissaient au pré. À partir de fin août, il fallait courir là-bas pour les boucler. Sur les 45 vaches limousines, seulement 16 étaient primées. Les marges étaient faibles. » En revanche, à l’époque, les perspectives laitières étaient bonnes. « Après la crise de 2009, le prix du lait était remonté, précisent les deux beaux-frères. Il était alors difficile d’imaginer qu’un jour, il pourrait descendre aussi bas ! Des droits à produire étaient disponibles chez Sodiaal(1). Doubler notre production était possible. » L’exploitation disposait de fourrage supplémentaire. L’irrigation, introduite en 1994, avait permis d’intensifier les surfaces fourragères. Le maïs, mais aussi les prairies ensilées ainsi qu’une bonne partie des céréales sont irrigués.
« Nous ne voulions plus qu’un seul trayeur »
« Nous faisons des ray-grass diploïdes, productifs, rapides, avec des repousses de qualité, derrière du maïs », précise Arnaud. La fertilisation est soignée, avec deux apports d’azote. Le premier sous forme d’ammonitrate (60 unités/ha) ou de lisier si les sols sont portants. Le second sous forme d’un engrais azoté soufré (54 unités/ha). Le maïs, lui, reçoit 40 t/ha de fumier, un engrais starter (100 kg de localisé avec le semoir) et 250 kg d’urée. Les agriculteurs de Bussy-Albieux ne lésinent pas non plus sur les tours d’eau (jusqu’à douze par parcelle).
« Dans nos terrains sableux, il faut passer souvent avec l’enrouleur. On commence autour de mi-avril et on finit le plus tard possible. En 2015, année sèche, nous avons passé plus de 80 000 m3 d’eau. Cela nous a coûté 10 000 €. C’est un coût et du travail (10 heures à l’hectare). Cette année, nous n’avons pas arrêté. Les quelques orages de 15-20 mm cet été nous ont aidés. Les maïs ont moins souffert. » Cela valait la peine. Les ensilages récoltés fin septembre ont atteint un rendement de 16-17 t/ha de MS avec une très bonne qualité (33 % de MS, 0,93 UFL, 39,4 % d’amidon). En revanche, côté bâtiment, des investissements étaient indispensables. Le niveau cellulaire (507 000 leucocytes/ml) et le nombre de mammites étaient élevés (une par an et par vache). Il fallait agrandir la stabulation et changer la salle de traite, une 2 x 5 sans décrochage, vieille de 30 ans.
Qui plus est, elle était située dans un ancien bâtiment au-dessus de la stabulation, ce qui exigeait que les vaches sortent pour la traite. « Compte tenu de la topographie du site, nous n’avions pas la place pour mettre une grosse salle de traite, de type roto. Nous voulions aussi éviter tout gaspillage d’eau et un agrandissement des fosses. Nous souhaitions un système de traite avec un seul trayeur. » Acheté en mars 2014, dans une conjoncture laitière bien différente, un robot DeLaval a été mis en service six mois plus tard, après la fin des travaux de réfection des logettes et de construction d’une fosse caillebotis sous l’aire d’attente.
« Nous avions trop déconcentré la ration »
Deux années plus tôt, deux travées (10 m) avaient été rajoutées au bâtiment des laitières. Le pâturage a été arrêté. Les contraintes de déplacement des animaux étaient trop lourdes et les parcelles éloignées. Il fallait emprunter une grande route sur 400 m, ce qui mobilisait deux personnes pour un herbage pas très bon. Si le printemps était sec, il n’y avait plus d’herbe au 20 mai. La mise en service du robot n’a pas été facile. « Nous avons démarré avec un maïs très riche en amidon, expliquent Arnaud et Cédric. Il y a eu des problèmes de pieds. Nous avions par ailleurs trop déconcentré la ration. Plus ça allait, moins les vaches passaient. Il fallait être présent le soir et le matin. » Lors du passage au robot, il y a eu beaucoup de « casse » à cause des pieds et des mammites. La relève était insuffisante pour satisfaire lors du passage au robot et aux besoins de grossissement du troupeau (malgré les achats externes). Les réformes ont été plus subies que choisies. Des vaches à la production faible (moins de 17 litres) ont été gardées. Faute de volume laitier suffisant (et donc d’effet dilution), les coûts des concentrés se sont envolés. Face à ces dérapages, un plan d’action a été mis en place.
La ration des laitières a été modifiée. Elle se compose aujourd’hui de 26 kg bruts d’ensilage maïs, 15 kg bruts d’ensilage herbe, 1 kg de paille d’orge, 3,5 kg de tourteau de colza, de minéraux 5/25/5 et de carbonate de calcium (craie). Elle est complémentée au robot avec du tourteau de colza et une VL 20 (5 kg/vache et 1,5 kg de tourteau maximum).
« Plus de souplesse avec le robot, et de surveillance »
Un effort a été engagé pour mieux étaler les vêlages et avoir davantage de femelles pour le renouvellement. L’an dernier, les vêlages étaient insuffisamment planifiés et il y a eu des trous. Cet été, le lait a manqué. Depuis 2015, les éleveurs utilisent de la semence sexée et les vêlages sont mieux lissés. Un lot de génisses inséminées cette année vêlera en mars, avril et mai 2017. « En octobre-novembre, avec les nombreux vêlages, nous avons amélioré la proportion de vaches fraîches, alors que jusqu’à présent, nous avions beaucoup de vieilles au lait. » Pour l’instant, le robot n’a pas allégé le quotidien des éleveurs. « Nous avons gagné en souplesse, mais il y a de la surveillance. Avec les vaches en bâtiment, il faut parer plus souvent. La robotique, plus technique, est plus compliquée que ce que nous imaginions. Nous avons dû repenser nos façons de travailler et notre manière de suivre le troupeau : d’une conduite par lots, nous sommes passés à une conduite individuelle. Il faut désormais analyser chaque silo, et peser ce que nous distribuons aux animaux pour être le plus précis possible. » Le nouveau système est cohérent, mais reste à caler pour qu’il soit aussi performant que l’ancien. « Nous avions un système simple et économe avec des vaches à 8 000 kg et une ration semi-complète. Le soir, le concentré était donné au seau aux plus productives. »
« Le système était performant, mais la salle de traite était morte »
« C’était performant, mais le bâtiment datait de trente-cinq ans, et la salle de traite était morte. Nous ne pouvions pas rester comme ça. » Aujourd’hui, le système en place demande à être optimisé avec un peu plus de productivité à l’animal. Pour Dominique Tisseur, le conseiller élevage de l’exploitation, un objectif de 9 500-10 000 kg pour un volume global de 650 000 litres d’ici à 2018 est raisonnable. La moyenne laitière des vaches augmente. Il faut continuer à trier les animaux. Dans une conjoncture difficile, les éleveurs ont dû gérer à la fois le grossissement de leur troupeau et la mise en place du robot. Une fois que le nouveau système sera bien calé et avec un prix du lait raisonnable, ils devraient retrouver un niveau de revenu de l’atelier lait satisfaisant. En attendant, ils peuvent compter sur le revenu des panneaux photovoltaïques. Une diversification judicieuse réalisée en 2011.
(1) Échange des 16 droits à prime vaches allaitantes contre 80 000 litres de quota laitier + volumes de consolidation (du quota A en tant que gros investisseur) + achat de quota B sur deux campagnes (2 fois 35 000 litres). Aujourd’hui une référence laitière de 725 000 litres.
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