
Mon besoin en fonds de roulement correspond habituellement à 2,5 ou 3 mois de dépenses. Cette année, cela ne suffira pas. » Un éleveur du Calvados
La réponse de l’expertstrong
Les hausses simultanées des prix des intrants (aliments, engrais, carburant, électricité), du lait et de la viande bousculent les repères habituels de besoin en trésorerie. Jusqu’à maintenant, les rentrées d’argent plus importantes pouvaient donner l’illusion que la trésorerie disponible suivait bon an mal an. Mais bon nombre d’éleveurs sont en fin de contrat d’aliments et doivent se couvrir à des prix beaucoup plus élevés. De leur côté, les fournisseurs d’engrais ne peuvent assurer cette année des tarifs plus faibles en morte-saison, les cours des engrais étant volatiles. Quant au carburant, son prix augmente depuis décembre 2021. Dans ce contexte, encore plus que les années précédentes, il est indispensable d’anticiper le financement des trois cycles de production qui rythment une exploitation laitière, surtout si elle est en phase de développement ou a déjà une trésorerie fragile. Le premier touche les semis de maïs et les ensilages d’herbe en avril et mai qui, pour 50 ha, mobilisent de l’ordre de 20 000 €. Le deuxième renvoie aux charges mensuelles de l’activité laitière. Le dernier cycle concerne l’élevage des génisses qui sont improductives durant deux ans, voire plus.
L’équivalent de 0,8 à 1,5 mois supplémentaire de dépenses
En temps normal, avec des rentrées d’argent régulières, les exploitations laitières ont un besoin en fonds de roulement (BFR (1)) de 2,5 à 3 mois de dépenses. Dit autrement, 2,5 à 3 mois d’avance sont nécessaires pour financer leurs cycles de production. Cette moyenne augmente logiquement avec les prix exponentiels des intrants. Selon la simulation de CERFrance Normandie Ouest, pour une ferme du Calvados de 607 700 litres et 118 ha, dont 24 ha de cultures de vente, près de 17 200 € et + 0,8 mois de trésorerie sont nécessaires pour absorber + 20 % de prix des intrants (voir l’infographie). Avec + 40 % de prix des intrants, il faut 34 320 € et 1,5 mois de BFR de plus. Connaître le BFR de chaque cycle de production et prendre en compte le surplus de chiffre d’affaires lié aux hausses des prix du lait et de la viande faciliteront la décision sur les prochains achats d’aliments ou d’engrais et aideront à définir le financement à mobiliser.
Comment trouver la trésorerie en plus ?
Si vous avez pris la précaution de constituer une épargne ces dernières années, la conjoncture vous donne raison. Mobiliser cette épargne permettra de supporter le surcoût ou de négocier un surcroît d’emprunt court terme auprès de votre banquier.
Si votre trésorerie vous permet habituellement d’autofinancer vos achats sans utiliser la ligne de crédit accordée par votre banque, c’est le bon moment pour le faire.
Si vous utilisez déjà toutes vos lignes de crédit et que vous n’avez pas d’épargne de précaution, n’hésitez pas à prendre les devants et à solliciter votre banquier pour un rendez-vous. Cela le rassurera sur votre capacité à gérer cette situation exceptionnelle, plus encore, si vous lui présentez les adaptations envisagées ou décidées pour passer le cap.
Aides. Il ne faut pas non plus hésiter à déposer une demande pour bénéficier du dispositif « alimentation animale » du plan de résilience actuellement en vigueur.A minima, une aide forfaitaire de 1 000 € sera accordée si la part des charges d’alimentation animale, dans le total des charges de l’exploitation, est comprise entre 10 % et 30 %.
Adaptations : un mix de microsolutions
La première règle est de conserver le système de production mis en place ces dernières années. Le changer dans l’urgence serait coûteux. En revanche, améliorer sa résilience aux aléas, y compris climatiques, sera source d’économies. Cette crise est une opportunité pour repenser sa stratégie technico-économique vers plus d’autonomie. Par exemple, faire davantage pâturer ses génisses et augmenter celui des vaches par plus de prairies ou de couverts végétaux économisera fourrages et concentrés. Autre piste : une meilleure valorisation du lisier réduira l’achat d’engrais minéraux. Cela pourra aller jusqu’à repenser son équipement d’épandage pour limiter la volatilisation de l’azote. Les élevages laitiers ont la chance de disposer d’unités d’azote à pas cher. L’échange paille-fumier est une alternative supplémentaire à étudier de près. Il n’y a pas de solutions miracle mais un mix de microsolutions à envisager.
(1) Le besoin en fonds de roulement se calcule à partir du passif du bilan : stocks + créances - dettes fournisseurs, sociales et fiscales.
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