Les sommes de températures gouvernent la pousse de l’herbe. La connaissance de ces cycles permet de maximiser la consommation d’herbe de qualité et d’accroître le revenu à l’hectare.
« Selon l’utilisation et la maîtrise dans la gestion du pâturage, la valorisation ou le gaspillage de l’herbe peut facilement varier du simple au double », déclare Laure Chazelas, animatrice à la Fédération régionale des Civam du Limousin (Centres d’initiatives pour la valorisation de l’agriculture et du milieu rural). Pour permettre aux éleveurs de maximiser la valorisation du pâturage et donc d’augmenter l’autonomie alimentaire, elle a conduit une étude en collaboration avec l’Inra de Toulouse en 2004 basée sur l’utilisation des sommes de températures. Avec quelques années de recul, l’application de cette technique, adoptée par des éleveurs, a montré tout son intérêt économique et environnemental. Des éleveurs laitiers ont par exemple pu arrêter la distribution de maïs et de correcteur azoté au printemps, simplement en augmentant la quantité et la qualité de l’herbe consommée. Finalement, c’est le revenu par hectare qui s’accroît.
« Au premier abord, cette technique peut paraître abstraite ou rebutante », reconnaît Laure Chazelas. « Elle ne demande en réalité qu’un petit temps d’adaptation. En outre, la compréhension des sommes de températures qui gouvernent la pousse des végétaux va permettre de mieux appréhender les mécanismes de l’herbe. »
Sortir entre 5 et 7 cm
Très concrètement, l’utilisation des sommes de températures permet de savoir précisément quand faire entrer les animaux dans les pâtures, à quel rythme les faire tourner, quand arrêter le déprimage pour optimiser la récolte fourragère et quand remettre les animaux dans les pâtures en automne. Les sommes de température fournissent des clés de maximisation.
Au printemps, l’idéal est de mettre les animaux sur des pâtures d’une hauteur de 15-20cm.
![]() Pour maximiser la quantité d’herbe consommée, il faut être au bon stade. Le temps de repousse optimal correspond à la durée de vie d’une feuille verte. Pour les ray grass, cette durée de vie est de 500°Cjour, qui est à prendre en compte depuis la dernière exploitation de l’herbe. En divisant 500°Cjour par la moyenne des températures, on va obtenir le temps de retour sur les parcelles en automne. Si les parcelles sont dominées par d’autres graminées, il faudra se référer à la durée de vie des feuilles correspondantes. (© Frcivam) |
En fait, cet idéal correspond au moment où l’accumulation de feuilles est optimale, ce qui répond en réalité à la somme de 500°Cjour pour un ray grass ou 800°Cjour pour un dactyle ou une fétuque élevée, cumul de températures à compter du 1er février de l‘année. « Mais pour faire pâturer les parcelles à leur optimum de production, il sera judicieux au printemps de rentrer sur la première pâture de la surface de base à 400°Cjour en ray grass, compte tenu du décalage de pousse. On peut garder la valeur de 500°C sur des pâtures peu fertiles», souligne Laure Chazelas
Sur ces surfaces de base, c’est à dire les parcelles destinées uniquement au pâturage, on cherche à avoir une repousse feuillue. « L’objectif est de couper un maximum d’épis en train de monter pour ne pas avoir de refus. Le seuil de 5 cm est celui en dessous duquel les animaux ne peuvent pâturer et 20 cm celui au delà duquel l’épi sera refusé. Un épi mettant environ 200°Cjour pour passer de 5 à 20 cm, il faudra revenir sur les parcelles tous les 15 à 20 jours au printemps. Ce qui a permis aux éleveurs de ne plus avoir de refus. Par ailleurs, le temps de présence sur la parcelle qui ne doit pas excéder 4-5 jours, toujours au printemps. »
Premières fleurs de forsythia
Il convient aussi de respecter une certaine hauteur de sortie, entre 5 et 7 cm. Si la hauteur est plus importante au 1er tour, l’herbe est gaspillée, « 1cm, c’est 100 kg de matière sèche perdue à chaque tour ». A l’inverse, si la hauteur est trop basse à la sortie, la plante est atteinte dans ses réserves et le démarrage de la repousse sera ralenti.
Se pose ensuite la question, pour la surface complémentaire qui est à la fois pâturée et fauchée, de déterminer le moment où l’éleveur met fin au déprimage. Sur ces surfaces à faucher, l’objectif poursuivi est de couper un minimum d’épis pour ne pas avoir une repousse feuillue mais des épis qui montent. « On recherche de la matière sèche, il va donc falloir sortir les animaux avant que les épis soient trop hauts et ne pas faire d’étêtage », développe Laure Chazelas. « Quand le seuil de 500°Cjour est atteint, les épis des variétés les plus précoces comme les ray grass atteignent 5 cm. Il faut sortir les animaux pour ne pas pénaliser la récolte. Nombreux sont les éleveurs qui ont pris des repères dans la nature auprès des arbres pour leur servir d’alerte signifiant que les 500°Cjour sont atteints. Certains m’ont dit se repérer aux premières fleurs de forsythia. »
Au delà de ces grandes règles générales, les temps de retour devront être adaptés en fonction de la composition de la graminée dominante et en fonction de la saison (moyennes de températures journalières), sachant que les temps de retour sont obtenus en divisant la durée de vie d’une feuille par la moyenne de températures journalières.
![]() « Au printemps, si l’éleveur veut optimiser la quantité d’herbe consommée, il faut tourner fréquemment sur les parcelles, à un rythme de 200°Cjour, ce qui correspond à une rotation tous les 15-20 jours », commente Laure Chazelas, animatrice à la fédération régionale des Civam (Centres d’initiatives pour la valorisation de l’agriculture et du milieu rural) du Limousin. (© Frcivam) |
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