États généraux de l’alimentation :la compétitivité, grande absente des débats

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Votre analyse à propos des États généraux de l’alimentation néglige un point essentiel, celui de la compétitivité, de la performance de la ferme France qui, à aucun moment, n’a été abordé dans les débats. Comment comprendre, alors même que personne n’a remis en cause le fait que l’activité agricole se situe dans un environnement de libre-concurrence (décisions européennes de 1992, 1999 et 2003), qu’aucun responsable politique ou professionnel n’aborde ce sujet central. Et cela alors que de nombreux rapports (des organismes techniques et économiques, du Sénat…) démontrent les retards pris par la France, en particulier pour ses filières animales.

Il y a là un problème culturel français évident . Lorsque l’on parle marchés, entreprises, les sujets de performance, de compétitivité devraient normalement être au cœur des préoccupations des chefs d’entreprise. Preuve en est, la priorité mise sur ce sujet par nos principaux concurrents européens depuis presque dix ans. Mais paradoxalement, en France, il est tabou, associé à la notion d’incompétence ou renvoyé à la confrontation syndicale…

Un point essentiel est abordé par le président de la République française dans son discours , celui de la responsabilité des différents acteurs. En disant clairement que les filières doivent se doter d’une stratégie, il sous-entend qu’elles n’en ont pas aujourd’hui alors même que le monde de l’agroalimentaire est en profonde mutation.

Comment s’adapter, répondre aux nouvelles attentes tout en restant sur des schémas d’organisation fondés sur un mode de fonctionnement d’hier ?

L’absence d’analyse stratégique exprimée, le manque de projets stratégiques font que la France vit les crises de volatilité comme des drames dont on ne se relèvera que difficilement. Le président de la République dit explicitement que la solution n’est pas dans la loi ! Personne, à ma connaissance, n’a développé ce point. À l’inverse, combien d’espoirs mis dans une énième loi encadrant les relations commerciales. Déjà plus de dix votées et sans effets, et autant de désillusions, de rancœurs, de retards…

À l’issue de ce discours, et dans les premières réactions, l’illusion est encore entretenue en laissant croire que les coûts de production pourraient devenir « pierre angulaire » de la constitution du prix ! Dans un marché ouvert où la France réalise une part importante de son activité à l’exportation et où les produits des pays tiers arrivent librement, pourquoi laisser croire que, pour la grande majorité des productions, on puisse échapper aux marchés (équilibre offre/demande) qui détermineront prioritairement les prix des produits ?

Concernant les organisations de producteurs, il est louable de demander une restructuration des OP et de souhaiter les doter d’une activité commerciale propre. Mais poser ainsi, les bases du débat ne sont pas les bonnes. Ce dont a besoin notre filière laitière, c’est de producteurs qui se regroupent sur la base de véritables organisations collectives et économiques des producteurs construites autour d’un projet partagé. Pas de structures imposées politiquement, qu’elles soient verticales ou horizontales !

Veut-on simplement négocier un prix de marché pour le compte de tiers (les organisations de producteurs actuelles) ? Veut-on assumer la gestion du froid et de la collecte (coop de collecte et diversification des clients) ? Veut-on créer de la valeur autour de produits immatériels (concept, cahier des charges, marques…) ? Veut-on créer de la valeur sur des produits traditionnels ou industriels et commerciaux ?

Mais sortons définitivement de l’illusion que le rapport de force pourrait redevenir régulateur et créateur de valeur Seul l’investissement, et donc la prise de responsabilité, peut permettre aux producteurs, par leur implication dans l’aval, de reconquérir des moyens de lutter contre la volatilité et de créer de la valeur pour leur propre compte.

Les États généraux de l’alimentation sont une opportunité pour l’agriculture française de sortir du repli sur soi dans lequel elle s’est installée depuis trop longtemps. Bien évidemment, des politiques et des ONG contesteront le droit des agriculteurs à décider de leur avenir, mais l’élément déterminant qui permettra de sortir de ce marasme sera la capacité des agriculteurs et de leurs organisations à comprendre, accepter, et surtout se projeter dans un environnement où les demandes sont tout à la fois globales et mondiales, mais aussi locales et différenciées.

Patrick Ramet, ancien responsable de la FNPL, producteur de lait en Haute-Savoie

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
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Maladies
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Herbe

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