« La génétique a bien plus d’impacts qu’on ne le pensait »

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Performances. Le Gaec de Bonizac, dans le Morbihan, a dit adieu aux pénalités et ne voit presque plus de mammites. Le génotypage, l’utilisation de doses sexées et la sélection sur les index fonctionnels ont payé.

Ce qui compte pour nous, c’est le lait qui va dans le tank, celui qu’on vend », affirme Thierry Le Roux, éleveur en Gaec avec Sophie Autret, sa conjointe. Cela peut sembler évident et pourtant : le lait non produit parce que le troupeau ne fonctionne pas à l’optimum représente des coûts diffus et mal évalués, mais non négligeables.

Les éleveurs en ont pris conscience pendant l’hiver 2012. « Nous avions 90 vaches pour 70 places en aire paillée. Ça fonctionnait bien. Puis tout a dérapé à la suite d’une longue période très humide. Une vache a eu une mammite. Elle a contaminé les autres et en deux semaines, on en a eu quinze. Du jamais-vu chez nous. » Ils ont réagi et sont parvenus à maîtriser la situation au prix d’un gros travail supplémentaire pour vidanger et assécher la litière tous les dix jours. Ils ont cherché des solutions pour que cela ne se reproduise plus. Des logettes ont été aménagées l’été suivant.

Adhérent à Prim’holstein France, Thierry a regardé les index des vaches qui avaient été les plus touchées. Bingo ! Toutes avaient des notes négatives en santé de la mamelle.

« On a perdu du temps »

Jusque-là, Thierry se focalisait sur la ration pour optimiser le fonctionnement du troupeau. « On a perdu du temps et de l’énergie en travaillant de cette façon », constate Sophie.

Les éleveurs ont réfléchi pour recadrer la conduite de leur troupeau et mieux définir leurs objectifs. Avec une main-d’œuvre limitante, la productivité par vache est essentielle afin de contenir l’effectif tout en produisant la référence. La race holstein n’a donc pas été remise en cause. Seuls les animaux nécessaires à la production doivent rester sur l’élevage. La présence d’une salariée accentue la pression sur le revenu. Le potentiel important de l’exploitation pour le pâturage exclut le recours à la traite robotisée. « Nous ne maîtrisons pas le prix de vente, nous devons donc être très vigilants sur les charges », insiste Thierry Le Roux.

Ils ont commencé par trier les vaches pour réformer les moins bonnes. Mais très vite, ils ont pensé que cela ne suffirait pas, qu’il fallait travailler sur les produits à naître. À l’époque, ils gardaient toutes leurs génisses d’où un coût de renouvellement élevé. Chaque génisse revient à 1200 € et pèse sur la charge de travail.

C’était le début des semences sexées et du génotypage. Mais les stratégies d’utilisation de ces outils n’étaient pas encore bien calées. « Nous avons inséminé les génisses avec des doses sexées en 2011. Les résultats ont été bons et elles ont produit 50 génisses en un an », raconte Thierry.

De nets progrès sur les nouvelles générations

C’était trop par rapport aux besoins pour le renouvellement. Progressivement, les éleveurs ont affiné leurs pratiques. Ils ont génotypé les génisses afin de choisir les meilleures pour le renouvellement. Aujourd’hui, seules les vingt meilleures génisses sont inséminées avec des doses sexées, la moitié des vaches recevant du limousin, ce qui augmente la valorisation des veaux.

Les taureaux sont choisis pour maximiser le potentiel du produit à naître avec un objectif à au moins 170 d’Isu. Thierry considère qu’à ce niveau, il n’y a pas de gros défauts. Il regarde les plans d’accouplement de Prim’holstein France et d’Évolution et il fait ses propres choix.

Les progrès constatés sur les nouvelles générations sont nets et assez rapides (voir tableau). Tous les caractères fonctionnels s’améliorent, de même que la production, le TP, la mamelle et les membres. La taille suit, sans qu’il s’agisse d’un choix.

Et surtout, cette amélioration des index se voit sur les performances. Les pointages confirment les index morphologiques. Avant, l’élevage subissait, régulièrement des pénalités sur la qualité du lait, essentiellement pour les taux cellulaires, parfois à cause des butyriques. Il n’y en a plus. Les cellules étaient à 100 000 l’an dernier. Les mammites sont rares. Les génisses vêlent à 25 mois avec un taux de réussite en première insémination de 60 % (54 % pour les vaches)

À 40 € le génotypage, les éleveurs estiment que cette stratégie ne coûte pas cher par rapport aux résultats qu’elle donne. Ils regrettent de ne pas avoir commencé plus tôt, mais soulignent la qualité du partenariat avec les inséniteurs d’Évolution.

Seul petit bémol selon Thierry, la réussite à l’insémination est cruciale pour que l’ensemble fonctionne. Et les résultats sont plus faibles avec des doses sexées. De plus, l’indexation ne concerne pas encore tous les problèmes sanitaires, au-delà des mammites. Il faut donc prévoir un peu de marge. « La génétique a bien plus d’impacts sur nos résultats qu’on ne le pensait », conclut Sophie.

Pascale Le Cann

Une sélection visiblement efficace
LES VALEURS GÉNÉTIQUES PROGRESSENT RAPIDEMENTIndex moyens des génisses génotypées par année de naissance
Date de naissance Isu TP TB Lait STMA Repro. MO MA HS ME
2013 116,5 0,3 0,5 105,4 0,3 0,3 0,4 0,4 0,0 0,3
2014 122,3 0,2 0,5 150,9 0,4 0,6 0,7 0,6 0,3 0,2
2015 138,1 1,0 0,8 192,2 0,7 0,9 1,0 0,7 0,5 0,6
2016 135,6 0,4 - 0,1 238,6 0,8 0,7 1,1 1,1 0,7 0,5
2017 158,1 1,0 1,3 437,7 1,1 1,0 1,5 1,3 0,8 0,8
2018 170,1 1,2 0,6 538,1 1,4 1,1 2,1 1,9 1,1 1,0
Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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