Alimentation. L’EARL Lux profite des coproduits disponibles localement. Cela lui permet de produire 1,5 million de litres de lait, avec un troupeau à plus de 10 000 kilos de moyenne, sur seulement 51 ha de SAU et à un coût maîtrisé.
La recherche d’autonomie, souvent présentée comme l’alpha et l’oméga d’une plus grande résilience vis-à-vis de la volatilité des marchés, dépend dans les faits des contraintes propres à chacun.
À l’EARL Lux, en Alsace, elle se raisonne non pas à l’échelle de l’exploitation, mais du territoire. Dans un contexte de très forte pression foncière, les associés misent en effet sur des matières premières locales pour produire 1,5 million de litres avec une surface fourragère limitée, c’est-à-dire 27 500 litres par hectare !
Avec le départ d’un associé, suivi de la rupture du Gaec, Christine et Léonard ont perdu du foncier et dû rebâtir ex nihilo un nouveau site d’exploitation en 2009. Depuis, leur fils Laurent s’est installé et ensemble, ils ont développé la production laitière. « Notre objectif est de maintenir un haut niveau de production afin de dégager suffisamment de revenus pour trois, explique Laurent. Or, le foncier coûte cher, et surtout il n’y a pas de disponibilité. Nous achetons donc chaque année l’équivalent de 700 t de pulpe de betterave surpressée, 50 % de nos besoins en maïs, 100 balles de foins, autant de paille et 600 à 700 t de pollen. »
« Profiter des opportunités régionales et anticiper les achats »
En raison d’un parcellaire très morcelé, le troupeau est conduit en zéro pâturage avec une ration semi-complète qui intègre 13 kg bruts de pollen. Il s’agit d’un mélange de matières premières 100 % régionales (voir photo) réalisé à la ferme par un prestataire. La combinaison de coproduits humides et secs permet d’ensiler un aliment complet à 44 % de matière sèche avec des pertes quasi nulles, à condition comme ici de respecter un avancement du tas de 20 cm par jour et de 30 cm en été. « J’utilise les drèches depuis toujours, précise Léonard. L’intérêt est de profiter des opportunités régionales pour avoir un aliment à un prix intéressant qui répond à tous nos besoins. » La composition du mélange est en effet variable selon la qualité de la ration de base et le prix des différentes matières premières.
Cette année, le tarif rendu ferme s’élève à 117 €/ tonne de produit brut, dont 3 € de prestation pour la confection du mélange. Le pollen dose 31 % de MAT, 1,09 UFL, 200 g de PDIN, 162 g de PDIE et 114 g de PDIA. Il ne contient pas de soja, ni de colza jugés trop chers. Ils sont remplacés par du crack de soja et du gluten meal (germe de maïs apportant une protéine très protégée). « Les achats sont réalisés sur le marché à terme via un négociant. Nous faisons en sorte de suivre les cours et d’anticiper nos besoins. C’est aussi un moyen de rentabiliser le temps que nous ne consacrons pas à la conduite des cultures », déclare Léonard.
« Faire consommer du foin à l’auge »
Les achats de pulpes sont contractualisés à l’avance. Le maïs également, auprès d’un céréalier. « L’achat se fait au prix du maïs grain. » Dans ce secteur avec une forte densité de cultivateurs, les éleveurs ne semblent pas devoir dépendre d’un unique fournisseur.
Sur la ferme, les rendements du maïs ensilage sont en moyenne de 16 à 17 t de MS/ha. Les premières et deuxièmes coupes d’herbe sont réservées aux laitières et mises dans un silo sandwich avec le maïs et la pulpe surpressée. « Une première coupe d’herbe très précoce nous permet de faire une seconde coupe avant le coup de chaud de l’été qui intervient de plus en plus tôt », précise Laurent. Les éleveurs cultivent aussi des dérobées avant maïs. Elles constituent la ration hivernale des génisses, avec 4 à 5 kg de maïs, de la paille à volonté et un peu de pollen, s’il vient à manquer d’herbe ou si sa valeur est insuffisante.
À partir de ce système d’alimentation, le troupeau affiche une moyenne de 10 530 litres de lait par vache laitière, à 33 de TP et 36,6 de TB : « Techniquement, l’enjeu est de réussir à faire consommer du foin à l’auge. L’absence de tourteaux de soja cette année dans le pollen et peut-être un excès d’acide gras insaturé pourraient aussi expliquer le recul du TB », commente Stéphane Lartisant, ingénieur BTPL qui accompagne l’exploitation. Le niveau de production permet cependant de diluer le recours aux achats d’aliments et autorise un niveau d’EBE équivalent à la moyenne Ecolait des éleveurs polyculteurs du Grand Est : EBE/UMO = 62 968 € pour l’EARL, 61 672 € pour le groupe. « Les coproduits sont des aliments très appétents, facilement assimilables et lactogènes. Il est regrettable qu’ils soient insuffisamment valorisés en région et que de gros volumes partent vers la Belgique et la Hollande. »
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