Prioriser les investissements et les travaux pour limiter les tensions entre associés

Article réservé aux abonnés.

(©)

Par ISABELLE MAILLOU, consultante en relations humaines à CERFrance Orne

LA SITUATION

L’installation du fils, Clément, avec ses parents, Catherine et Thierry, en exploitation laitière, s’est accompagnée d’un investissement dans un méthaniseur. Le développement de l’atelier de jeunes bovins existant, déjà important, et la mise en état fonctionnel d’un bâtiment d’élevage acquis à l’installation de Clément étaient également envisagés. Mais la trésorerie tendue a différé ces deux derniers projets, tout comme celui d’un aplatisseur à céréales. Au quotidien, les trois associés sont en surcharge de travail.

LA PERSONNALITÉ DES ASSOCIÉS

Les trois associés sont en constante recherche de performances technico-économiques et ont besoin d’objectifs ambitieux. Cela n’empêche pas les parents d’être attentifs aux équilibres financiers, en particulier Catherine qui est responsable du suivi administratif du Gaec.

Autre trait de personnalité de Catherine : elle estime qu’un projet est finalisé lorsque tout, dans les moindres détails, est achevé. Elle a besoin d’échanger et veille à l’équilibre entre vie professionnelle et vie familiale des trois associés.

Face à la pression financière, Thierry, lui, estime qu’il faut être encore plus « au top » technico-économique. Rendre service à ses voisins est important aussi pour lui.

Quant à Clément, il aime échanger, mais ce qui prime est la concrétisation des projets le plus rapidement possible.

LES POINTS DE BLOCAGE

Le report du développement de l’activité taurillons et de l’achat d’un aplatisseur crée de la frustration chez Clément qui se sent freiné dans sa volonté d’aller de l’avant. De son côté, Catherine – qui a alerté le Gaec sur la trésorerie tendue — a le sentiment que son inquiétude n’est pas entendue, ce qui la stresse. Quant au père, il craint le risque de mauvaises performances technico-économiques. Il préfère ne pas participer à la réunion hebdomadaire d’organisation du Gaec, pour effectuer plutôt le travail de la ferme. Les trois associés n’arrivent pas à communiquer et échanger sereinement. Ils s’agacent, s’énervent et même crient. Pour ne pas en arriver là, ils évitent la réunion hebdomadaire.

DEUX SOLUTIONS TROUVÉES

Le bilan annuel que j’ai réalisé avec les trois associés en début d’année a permis à chacun d’exprimer calmement ses insatisfactions. Les règles de communication expérimentées lors de nos deux premières rencontres (par exemple, ne pas couper la parole à ses associés) facilitent les échanges, ma présence, en tant que tierce personne neutre, aussi.

LISTER LES TRAVAUX ET LES PRIORISER

Ils ont établi une liste de tout ce qui reste à réaliser, les tâches importantes comme les petits détails en se posant ces deux questions : « Qu’est-ce qui est le plus important et le plus urgent pour l’exploitation ? », « Qu’est-ce qui se passerait de grave si ce n’était pas fait ? »

Ils y répondent en gardant en tête l’intérêt de l’entreprise : maintenir une situation de trésorerie correcte. Le rappel de cet objectif commun permet de sortir de leur vision personnelle et de regarder le Gaec dans sa globalité. Cela n’empêche pas d’essayer de satisfaire les attentes de chacun. La hiérarchisation des travaux aboutit à cette liste de priorités.

Amélioration du bâtiment de taurillons existant pour en accueillir un peu plus. Seules les améliorations qui n’engendrent pas de grosses dépenses sont réalisées.

Aménagement intérieur du bureau du Gaec. Les réunions ne se dérouleront plus chez les parents. Catherine bénéficiera d’un espace administratif et Thierry et Clément d’un bureau. Parents et enfant professionnalisent ainsi leur relation.

Maçonnerie dans le bâtiment de stockage des aliments pour installer l’aplatisseur à céréales.

Pose d’une clôture autour du méthaniseur. Elle achèvera définitivement l’investissement.

ÉTABLIR UN PLAN D’ACTION

Si la liste de travaux ne se traduit pas par des concrétisations, elle ne sert à rien. La deuxième étape consiste donc à mettre en place un plan d’action en utilisant ces interrogatifs : quoi, qui, avec qui, pour quand, quand, combien. Ce plan figurera dans le compte rendu à l’issue de la réunion entre les associés.

Le Gaec a fixé au 30 juin l’achèvement de la mise en état du bâtiment d’élevage. Clément et Thierry ont remplacé des plaques de fibro-ciments, vérifié les abreuvoirs, réglé les barrières, etc.

Le calendrier pour le bureau est fixé, lui, à janvier 2022 : notre prochain bilan annuel s’y tiendra.

Les travaux de maçonnerie pour l’aplatisseur se sont achevés en juillet dernier. Le bâtiment de stockage des aliments sera prêt à l’accueillir lorsque le Gaec décidera de son achat.

La clôture, elle, sera posée durant une période creuse liée au mauvais temps par exemple, mais avant la fin 2021.

MES CONSEILS

La prévision crée de la cohésion au sein d’une entreprise. Cela limite les tensions et les conflits entre les associés, en particulier en période de surcharge de travail.

Faire un état des lieux des aménagements et des améliorations à apporter est indispensable. Estimer le juste temps nécessaire pour les réaliser l’est aussi. Cela permet d’organiser le chantier et d’aller jusqu’au bout des choses. Bien sûr, il y a toujours des imprévus qui l’interrompent mais ils ne sont pas une fatalité. Il est possible de les gérer en analysant l’urgence. Si à la question « qu’est-ce qui se passe si je n’agis pas maintenant ? » la réponse est « rien de grave », cela signifie que la résolution du problème peut être différée. Elle ne cassera pas le rythme en cours.

La priorisation des aménagements et améliorations aide également à gérer les imprévus. Je pense à Thierry qui aime rendre service à ses voisins. Si le Gaec a décidé que ce qui est en cours est urgent, il lui sera plus facile de répondre qu’il n’a pas le temps et offrira, par exemple, son coup de main la semaine suivante. De même, prioriser permet de définir les tâches moins importantes qui peuvent être effectuées par mauvais temps.

Planifier les travaux allège la charge mentale. Je constate qu’elle fatigue plus les éleveurs que la charge physique. Écrire sur un tableau ou un cahier la liste de ce qui est à faire puis rayer ce qui est achevé enlève de l’anxiété et soulage l’esprit.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
journée technique sur la tuberculose bovine

La tuberculose bovine fait frémir les éleveurs bas-normands

Maladies
Thomas Pitrel dans sa prairie de ray-grass

« La prairie multi-espèce a étouffé le ray-grass sauvage »

Herbe

Tapez un ou plusieurs mots-clés...