
Économies. En Haute-Saône, à la ferme bio de They, une exploitation diversifiée avec transformation et vente directe, la facture d’électricité a été réduite de moitié grâce à l’électricité photovoltaïque autoconsommée.
La consommation d’électricité a explosé au fil du développement de l’exploitation : la ferme laitière de 200 000 litres, à la salle de traite en épi 2 x 4 et son tank à lait de 500 litres en 1984, s’est transformée en une petite PME qui fait vivre aujourd’hui une douzaine de personnes, avec des ateliers très diversifiés et des productions transformées en partie à la ferme et valorisées en direct . « De 30 000 kWh par an, la consommation d’électricité est passée à 350 000 kWh, souligne Michel Devillairs, qui s’est installé il y a trente-six ans avec sa femme, Évelyne, en tant que HCF (hors cadre familial). Nos plus gros postes de consommation sont la méthanisation (les circulateurs sur échangeurs du réseau de chaleur), les deux robots de traite, le tank de 5 500 litres (équipé d’un récupérateur d’énergie), les trois moulins à farine et l’activité de transformation (chambres froides, congélateurs). Sans renouvelable, le coût serait abominable. »
Pour cet ancien conseiller de la chambre d’agriculture du Haut-Doubs, la recherche d’autonomie est un objectif prioritaire. « Pour maintenir et attirer des jeunes sur l’exploitation, il faut offrir de bonnes conditions de travail et pouvoir investir. Cela n’est possible qu’en baissant les charges. Le seul moyen d’y arriver, c’est d’être autonome vis-à-vis des terres, des animaux, de l’énergie et de l’eau. Nous avons notre propre captage. »
Revaloriser le toit d’un vieux bâtiment
C’est en 2004 que les agriculteurs se sont mis à l’électricité photovoltaïque. Des panneaux d’une puissance de 9 kWc ont été posés sur un premier écogîte. À une époque où les petites tuiles étaient hors de prix, c’était l’occasion de revaloriser le toit de ce vieux bâtiment à moindre coût, tout en produisant de l’énergie.
Par la suite, à chaque fois qu’un bâtiment a été agrandi ou qu’un toit a dû être refait, les exploitants ont investi dans du photovoltaïque. « Nous sommes toujours restés dans un raisonnement et une cohérence écologiques, expliquent-ils. À nos yeux, il est aberrant de dévêtir un toit en bon état, de construire un bâtiment spécifique ou de faire du photovoltaïque au sol. Pour chaque projet, nous faisons faire un business plan sur dix et vingt ans, en tenant compte de l’orientation des panneaux, de la puissance de l’installation en kWc, et de l’évolution des prix d’achat de l’électricité sur le réseau. »
La dernière installation a été montée en 2017 sur un bâtiment de 1 850 m2 construit pour abriter une porcherie (gestantes et porcs en sevrage sur paille avec accès extérieur) et stocker du matériel et du fourrage. 240 000 € ont été investis dans deux nouvelles centrales photovoltaïques : l’une de 100 kWc en autoconsommation totale, l’autre de 100 kWc, raccordée au réseau avec vente de surplus. À l’époque, la ferme venait d’augmenter la puissance de son méthaniseur de 120 kWc à 150 kWc. Il a fallu monter un nouveau transformateur plus puissant, pour un coût de 51 000 €. La ferme, très diversifiée, a beaucoup de déjections.
Elle valorise aussi les déchets verts des paysagistes locaux et du grand Besançon, ainsi que des issues de céréales. Après séparation de phases, la phase sèche du digestat est co-compostée avec des déchets ligneux broyés, ce qui permet d’entretenir le taux de la matière organique du sol à un très bon niveau (4,5 %).
Autonomie de mars à septembre
La production électrique varie selon les saisons : de 400 kWh par jour l’hiver à plus de 2 000 kWh l’été pour la plus grosse centrale de 200 kWc. Entre mars et septembre, l’exploitation est autonome. Les agriculteurs ont fait des simulations concernant le recours aux batteries pour stocker l’électricité produite en journée et l’utiliser le soir ou la nuit. Mais pour l’instant, cette solution a un coût prohibitif.
En 2019, avec des panneaux photovoltaïques d’une puissance totale de 254 kWc posés sur huit bâtiments différents, la production totale d’électricité s’est élevée à 292 100 kWh, pour une valeur de 54 500 € : 14 000 € ont été vendus, 23 000 € ont été autoconsommés, 12 000 € de surplus d’autoconsommation ont été commercialisés à EDF OA (EDF obligation d’achat) et 5 500 € ont été vendus aux deux écogîtes. Depuis trois ans et l’installation de la grosse centrale de 200 kWc, l’impact économique est réel. La production colle au prévisionnel.
« Écopart, notre maître d’œuvre local, a bien géré le dossier, se félicitent les associés. Avant 2017, notre facture annuelle d’électricité s’élevait à 45 000 € par an. Aujourd’hui, elle est de 22 000 €. L’intérêt économique est indéniable. Et cela va se renforcer : en 2019, notre prix d’achat (toutes taxes comprises) était de 15,70 centimes/kWh. Il était de 10 centimes dans les années 2000. La hausse va se poursuivre. »
La ferme bio de They ne compte pas s’arrêter là : ses responsables projettent de mettre des panneaux photovoltaïques sur un toit en Fibrociment fatigué et abîmé par les tempêtes. La production sera vendue. « Le prix de vente de l’électricité photovoltaïque a beaucoup baissé depuis 2004, note Michel Devillairs. Il était de 58 centimes/kWh à l’époque, mais le coût des panneaux a considérablement diminué. En 2004, ils étaient hors de prix : les 23 m2 posés sur notre premier écogîte (9 kWc) nous avaient coûté 29 000 € ! » Une étude de faisabilité sur la base d’une puissance de 35,7 kWc et d’un prix 12 c/kWh pendant vingt ans a été réalisée. Avec le réseau électrique en place, l’investissement serait de 40 000 € (panneaux et onduleurs), couvert par un prêt s’échelonnant jusqu’en 2028. Le revenu net s’établirait à 4 000 € par an.« Les énergies renouvelables nous réussissent bien. Les deux dernières années de sécheresse, alors que les vaches baissaient en lait, les panneaux produisaient plein pot. C’est un plus pour notre sérénité. Outre une capacité de production photovoltaïque de 254 kWc, la ferme dispose également de 30 m2 de capteurs thermiques pour l’eau chaude de la laiterie, de l’habitation et des deux écogîtes. Équipés d’une piscine chauffée à 34 °C par la chaleur du méthaniseur, ils sont loués toute l’année. » Pour pérenniser son développement, le Gaec recherche un associé et un salarié.
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