« Avec le système intensif sans pâturage : 100 €/1 000 l pour 100 q/VL  »

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Patrice, Évelyne et Gérard Soete, devant le silo de maïs avec Agathe Vandaele, conseillère à Avenir Conseil Élevage.
Patrice, Évelyne et Gérard Soete, devant le silo de maïs avec Agathe Vandaele, conseillère à Avenir Conseil Élevage. (©Dominique Grémy)

Dans les Flandres, le binôme éleveurs-conseiller s’investit sur un challenge ambitieux : davantage de lait et davantage de taux, sans dérapage sur le coût alimentaire. La recette commence toujours par la qualité des fourrages récoltés.

« Nous, les Flamands, aimons bien gagner de l’argent et je le revendique fièrement. Alors si je ne suis pas maître de mon prix de vente, j’ai la possibilité de baisser mon coût alimentaire et je ne vais pas m’en priver », m’annonce d’entrée Gérard Soete. Benoît Verriele, nutritionniste à Avenir Conseil Élevage, prend le relais. « Travailler le coût alimentaire, contrairement à ce que beaucoup pensent, ce n’est pas faire avec moins. C’est souvent plus de lait, plus de taux, donc dépenser un peu plus, s’il le faut, pour y parvenir. »

Le cadre est posé, nous sommes dans les Flandres françaises, terres fertiles où produire du lait est un choix raisonné, qui doit être rentable sur les hectares consacrés. Et certains éleveurs sont ambitieux. Ainsi, ces trois groupes de onze producteurs qui se sont fixé un objectif pouvant se résumer ainsi : « 100-100-100 et sans  », c’est-à-dire 100 quintaux de lait par vache, 100 € de coût alimentaire, 100 g de concentré, et cela sans aliment de production. Évelyne, Gérard et Patrice Soete font partie de cette aventure, mais le travail avec Agathe Vandaele, leur conseillère, a commencé bien en amont.

« Le maïs en plat unique était mal maîtrisé »

Premier challenge : en dix ans, le troupeau de vaches de l’exploitation est passé de 25 à 70 têtes. « J’ai toujours regardé la marge brute de mes ateliers. Et en lait, j’étais souvent dans la moyenne basse. Il fallait réagir. L’émulation du groupe et l’accompagnement d’Agathe ont porté leurs fruits », explique Gérard.

Le constat saute aux yeux : les taux s’étaient peu à peu dégradés. En 2010, le TB est à 36,4 et le TP à 31,1. En cause, une ration d’ensilage de maïs en plat unique mal maîtrisée et certainement acidogène. Les éleveurs décident alors d’introduire de la betterave et de l’herbe enrubannée. « Certes, la betterave a permis d’augmenter les taux en hiver, mais l’enrubannée ne fonctionnait pas. Sans doute trop tardive, elle était boudée par les vaches. Mon conseil a été de passer à l’ensilage d’herbe avec un premier résultat assez positif : 28,4 litres de lait, 38,7 de TB, 31,7 de TP pour 105 € de coût alimentaire, en dessous du niveau du groupe », explique Agathe. Mais pour parvenir à l’objectif ambitieux des « 100-100-100 et sans », il fallait aller plus loin. Éleveurs et conseiller s’entendent alors sur l’objectif suivant : 30 1/vache, 41 de TB, 33 de TP et 100 € de coût alimentaire. « La situation de départ est d’un bon niveau, mais elle cache d’excellents taux en hiver puis une dégradation en été. Nous avons donc décidé d’acheter de la pulpe surpressée pour l’été, distribuée à 12 kg bruts quand les betteraves disparaissent de la ration. Une autre action est mise en place en parallèle : avoir 4 kg d’ensilage d’herbe jeune toute l’année dans la ration. Cela favorise les taux et permet de réduire le concentré azoté. Pour maintenir le coût alimentaire proche de 100 €, nous travaillerons uniquement avec du tourteau de colza. Enfin, si la qualité des fourrages est suffisante pour atteindre une ration de base à plus de 0,95 UFL/kg de MS, l’aliment de production peut disparaître », dit Agathe.

« Pulpe surpressée et ensilage précoce de l’herbe »

Ces actions, validées par le binôme conseiller-éleveurs en juin 2016, donnent leurs premiers résultats, même si l’apport de pulpes surpressées n’arrivera que cet été. Sur les neuf mois allant de juillet à mars, le troupeau est à 28,1 litres, 40,5 de TB et 33,1 de TP pour un coût alimentaire de 100 €. En janvier, le TB est monté à 42,5, le TP à 33,5 et le lait à 30,9 pour un coût alimentaire à 91 €. « L’effet betterave est évident, celui de l’ensilage d’herbe aussi. Je l’ai ensilé une semaine plus tôt qu’à l’habitude pour 0,88 UFL et 14 % de MAT », précise Gérard qui hésite quand même à suivre le conseil d’Agathe pour un ensilage du ray-grass à deux nœuds, capable d’atteindre les 16 % de MAT. « Il faut quand même assurer le rendement », plaide Gérard. « Ce serait 1 kg de tourteau par vache en moins », lui rétorque Agathe. Affaire à suivre.

Le savoir-faire des éleveurs se retrouve sur d’autres plans. L’ensilage maïs, seule source d’amidon dans la ration, est récolté au stade optimum de 35 % de matière sèche pour 35 % d’amidon et haché à 15 mm. Les silos, voulus très longs, présentent un front d’attaque qui avance d’au moins 40 cm par jour, donc il n’y a jamais d’échauffement.

« Une ration mélangée au godet devant le silo de maïs »

La ration mélangée est réalisée à moindre coût : ensilage d’herbe, betterave et tourteaux sont amenés au pied du silo de maïs et mélangés à l’aide du godet. Tout est pesé et les fourrages analysés. « Il me faut une heure quinze pour nourrir ainsi les 250 animaux présents », estime Patrice. L’acétonémie est surveillée tous les mois (analyse sur échantillon de lait) et il y a très peu d’alertes. La gestion des taries y est pour quelque chose. Le pâturage des vaches est limité à 4 ha, donc quasi anecdotique dans la ration, ce qui est souvent le cas dans les Flandres.

« Nous tenons à ce que nos vaches sortent, pour leur bien-être et pour l’image de la production laitière », insistent les éleveurs. Mais  Benoît Verriele avertit : « Attention à l’adéquation entre le temps de pâturage et la quantité d’herbe à ingérer. Sinon, le pâturage peut avoir un effet négatif sur la production et les taux si les vaches sont dehors seulement pour se reposer, et non pour manger. Car l’ingestion sera pénalisée et la consommation de la ration trop irrégulière dans la journée. » Enfin, un travail a été entrepris sur l’élevage des jeunes génisses. Ici, la mortalité est inférieure à 5 %.

Dominique Grémy

© d. g. - La betterave, un fourrage appétent, ­lactogène (1,16 UFL) au rendement imbattable (100 t brutes/ha à 18 % de MS). Elle est distribuée entière. d. g.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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