« Le lait progresse, malgré l’arrêt du concentré de production »

Article réservé aux abonnés.

Annick et Gervais Deschodt, avec leur conseiller Benoît Verrièle.
Annick et Gervais Deschodt, avec leur conseiller Benoît Verrièle. (©j.pezon)

Le manque de disponibilité en herbe conduit Annick et Gervais Deschodt à opter pour des coproduits, tels que la pulpe et la pomme de terre, et pour la betterave afin de maintenir un haut niveau de densité énergétique de la ration, en complément du maïs.

La main-d’œuvre et la surface fourragère sont deux facteurs limitants de l’exploitation d’Annick et Gervais Deschodt. En effet, Annick a des problèmes de santé qui l’empêchent de participer aux travaux.

Difficile dans ces conditions de faire le pari de la culture de l’herbe, quand les 18 t de MS/ha du maïs autorisent un haut niveau d’intensification par hectare, en même temps qu’une simplification du travail. Il y a deux ans, la ration reposait donc sur le couple maïs-soja, avec un apport de fibres via l’achat de brins de luzerne. « Nous étions néanmoins confrontés à de la subacidose de façon chronique, pénalisante à la fois pour la reproduction et pour l’expression du potentiel du troupeau », explique Gervais Deschodt.

En effet, en 2016-2017, le rapport TB/TP de 1,11 (37,6/33,8) est révélateur d’un déséquilibre ruminal qui tend vers l’acidose. De plus, le coût alimentaire des vaches laitières est élevé : 135 €/1 000 l, contre 118 € pour le groupe. Un plan d’action est alors mis en œuvre dès janvier 2017 avec Benoît Verrièle, le nutritionniste d’Avenir Conseil Élevage : il vise à réduire la part d’amidon de la ration et à supprimer progressivement le concentré de production par le biais des fourrages, en visant 10 000 kg de lait/vache.

Jusqu’à 20 % d’amidon avec la pomme de terre

En l’absence d’ensilage d’herbe, la structure nécessaire à une bonne rumination est apportée par un prémix maison, soit l’équivalent de :

250 g de paille hachée

800 g de brins de luzerne

1,75 kg de colza

1,75 kg de soja/VL/jour

190 g de CMV (8/22/5). Le tout est mélangé pendant trente minutes et préparé tous les dix jours. Mais la paille et la luzerne sont des aliments peu digestes et encombrants, bref pas des matières premières pour fabriquer du TB. Pour maintenir l’objectif d’une ration de base dosant au moins 0,95 UFL, les éleveurs misent sur l’achat de pulpe de betterave surpressée (1,03 UFL/kg de MS, à 21 €/t) et sur l’implantation d’un booster de TB : la betterave fourragère (1,16 UFL), « imbattable en matière de production d’UF/ha ! » Semée et récoltée par une ETA, elle intègre la ration à hauteur de 1,5 kg de MS. En été, elle est remplacée par l’achat de pommes de terre (1,20 UFL). Ces dernières contiennent de l’amidon et présentent donc un risque acidogène plus élevé. Mais il s’agit d’un amidon cru très lent, ce qui permet de monter jusqu’à 20 % d’amidon total dans la ration.

Parallèlement, les éleveurs ont travaillé sur le maïs. « Je vise désormais un maïs plus mûr, plus riche en amidon, c’est-à-dire 34 à 35 % de MS, au lieu de 32 %. » Cette année, plusieurs variétés (indice 250) ont été implantées le 25 avril derrière un Cipan. « Nous ne récoltons pas de dérobées. Outre le manque de main-d’œuvre, je considère que la culture d’un ray-grass d’Italie est trop pénalisante pour le rendement du maïs. »

« Pas de baisse de taux pendant l’été »

Enfin, les éleveurs mettent tout en œuvre au quotidien pour maximiser l’ingestion d’animaux conduits en zéro pâturage (voir pages suivantes). Cela favorise la régularité de la production, même en été : la chute de TB à cette saison est souvent le signe de vaches qui, soumises au stress thermique, se nourrissent de façon erratique.

Ainsi, entre février 2017 et juillet 2018, le rapport TB/TP n’a jamais dévié d’un résultat compris entre 1,20 et 1,24, signe d’une grande stabilité ruminale. La production moyenne est de 32,8 litres/VL/jour, à 41,4 de TB et 33,7 de TP. Les vaches à moins de 100 jours de lactation affichent une moyenne de 43,1 l/j. Seuls ces animaux ont un complément de 500 g/j au maximum de tourteau tanné, au Dac, au-delà de 40 litres.

« 250 g d’urée dans le lait, au lieu de 350 g »

Au cours de cette période, le troupeau a produit 10 760 kg de lait à 7 %, contre 9700 kg il y a deux ans. La consommation de tourteau s’élève à 141 g/litre (au lieu de 215 g), soit un coût alimentaire de 110 €. « La ration de base très énergétique autorise l’impasse sur le concentré de production. Au départ, il y a une courte période de transition : la production individuelle se tasse un peu, avant de remonter, précise Gervais. Piloter le taux d’urée à 250 g/l, au lieu de 350 g, nous a aussi amenés à réduire les apports de soja et de colza de 2 à 1,75 kg/VL/jour, sans baisse des performances. Grâce à ce travail réalisé depuis deux ans, j’ai pu contractualiser avec mon OP Danone la livraison de 120 000 litres de lait supplémentaire vers la Belgique et rentabiliser le recrutement de notre salariée. Il est en revanche trop tôt pour conclure à une amélioration de la reproduction, même si nous constatons une meilleure expression des chaleurs. »

Ces résultats ont été obtenus sur la base d’un mois moyen de lactation de 6,2. C’est un nouvel axe de progrès pour l’exploitation : réduire le nombre de vaches à plus de 300 jours de lactation (23 %) dont la production s’élève à 21,4 litres.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo

Tapez un ou plusieurs mots-clés...