SEMIS DE MAÏS : LE STRIP TILL POUR CULTIVER AUTREMENT

Philippe Pastoureau, début mai, dans une parcelle semée mi-avril sur un seigle après un passage de Strip Till. Le seigle a été roulé, puis détruit au glyphosate (1 l/ha). Cette technique sert à doper la population de lombrics (jusqu'à 3 t/ha). Leurs milliers de galeries au mètre cube sont essentielles à la fertilité du sol. « Il faut trois ans pour remettre un sol en état. »
Philippe Pastoureau, début mai, dans une parcelle semée mi-avril sur un seigle après un passage de Strip Till. Le seigle a été roulé, puis détruit au glyphosate (1 l/ha). Cette technique sert à doper la population de lombrics (jusqu'à 3 t/ha). Leurs milliers de galeries au mètre cube sont essentielles à la fertilité du sol. « Il faut trois ans pour remettre un sol en état. » (©)

Au-delà du non-labour, l'outil s'adapte à l'agriculture de conservation qui cherche à préserver les sols, notamment en conservant les résidus de récolte en surface.

DANS LE SUD DE LA SARTHE, LA CUMA DE LA VALLÉE DES DEUX FONDS rassemble six éleveurs, dont Philippe Pastoureau. Ce petit groupe a décidé, en 1995, d'abandonner le labour. En cause : des terres de limons battants. « Notre premier souci était l'érosion. Nous avions aussi des problèmes de portance. Au-delà de ces contraintes agronomiques, il y avait la volonté de réduire le temps de travail et les charges de mécanisation », explique Philippe. Pendant cinq ans, les éleveurs ont opté pour des techniques culturales simplifiées dites intensives.

« Nous travaillions le sol sur 15 à 20 cm avec des outils à dents, avant le passage d'outils animés. L'objectif était toujours d'incorporer au mieux les résidus végétaux. Exemple : Combiplow et Rotalabour avant le semis de maïs. Tout allait bien au début, puis les soucis sont arrivés : limaces, salissement des parcelles, grosse consommation de fuel et trop d'usure mécanique. »

Le résultat agronomique est aussi décevant avec des sols qui se prennent en masse, et toujours plus de chimie pour désherber et lutter contre les limaces. À partir de 2003, le groupe s'oriente sur une agriculture dite de conservation. Elle repose sur trois piliers : la rotation des cultures, la couverture permanente du sol pour à la fois le protéger et alimenter l'activité biologique (dont les vers de terre), et la réduction du travail du sol. Ainsi l'activité biologique n'est pas perturbée, la consommation d'humus est réduite, l'eau et les minéraux sont mieux stockés. « L'idée maîtresse est de nourrir notre sol pour qu'il travaille pour nous. Les vers de terre sont pour le sol les bactéries de notre intestin. Pas de vers de terre, pas de digestion ! Il faut alors accepter de ne pas enfouir les résidus, car l'objectif est d'avoir 40 % de la surface du sol couverte au moment du semis. Reste à trouver les outils qui permettent de semer dans ces conditions. » Les éleveurs se sont fait la main avec les céréales d'automne. Elles sont désormais semées à la volée devant un Compil (succession de quatre trains de bêche, la trémie du semoir étant devant le tracteur). « Dans les repousses de colza ou sur un couvert, nous semons directement dans du vert. C'est très impressionnant, mais c'est le but recherché. En contact avec la terre fine, la graine est à l'abri, la couverture végétale protège le sol et occupe les limaces. Ensuite, le risque de repousse est géré par un passage léger de glyphosate avant la levée. » Les cultures de printemps, dont le maïs, font appel à un outil encore nouveau en France, mais promis à un bel avenir dans les exploitations d'élevage, où les récoltes et l'épandage des effluents compactent inévitablement les sols. Le Strip Till ne travaille que le rang du semis sur une largeur de 5 à 15 cm de façon à préserver au maximum la structure et la faune du sol. Son organe principal est une dent qui assure une fissuration sur 15 à 20 cm de profondeur. Devant, cela peut être deux disques à étoile chargés de chasser les débris végétaux dans l'interrang ou un simple coutre circulaire. Derrière, deux roues squelettes rappuient la ligne. « Pour les semis précoces, je préfère passer le Strip Till en solo une à deux semaines avant, pour que la terre se réchauffe. À partir de fin avril, le Strip Till est combiné au semoir », déclare Philippe.

SEMER DANS DU VERT

Là aussi, le semis du maïs dans la végétation impressionne. Le couvert (radis, phacélie, vesce, etc.) peut être mulchée dans l'hiver en période de gel ou lors d'apports d'effluents. Mieux encore, un seigle peut être simplement couché avec un rouleau devant le Strip Till, puis détruit au glyphosate. « Ces résidus végétaux empêchent les adventices de germer. Ils limitent l'évaporation et jouent un rôle d'effet de serre. Ils servent surtout de garde-manger aux lombrics nos principaux alliés. » Mais aussi aux limaces ? « Il faut que l'outil soit très bien réglé de façon à ce que la ligne de semis soit propre et bien refermée sur la graine. C'est indispensable. Ainsi les limaces restent sur l'interrang et ne descendent pas attaquer le germe du maïs. La technique peut faire peur, mais elle permet de réduire de 50 % le poste herbicides. » On peut faire de même pour un couvert de ray-grass italien dérobé ou un méteil. Il y aurait une quarantaine de Strip Till en France. Mais Philippe Pastoureau ne manque pas d'avertir les débutants impétueux. « Pour ne pas se tromper gravement, mieux vaut commencer dans les meilleures parcelles, de préférence avec un précédent prairie où la vie biologique est déjà riche. Si possible, louer un Strip Till pour se rendre compte et commencer le semis de maïs derrière un ensilage qui laisse moins de résidus. Et surtout aller voir ceux qui pratiquent depuis plusieurs années. »

DOMINIQUE GRÉMY

La même parcelle le 10 mai. Le maïs est parfaitement levé, l'interrang est propre, les limaces n'ont pas attaqué la plantule. Les adventices sont étouffées sous les résidus de seigle. L'éleveur estime la réduction du poste herbicides à 50 %.

Après le passage du combiné Strip Till semoir sur un ray-grass ensilé, il faut s'approcher très près pour s'assurer du semis. L'éleveur détruira les repousses de ray-grass au glyphosate. En sécurité, il sème des variétés résistantes à l'antigraminées Stratos. D'une manière générale, le couvert limite le développement des adventices, surtout dans l'interrang.

Détail du semoir : derrière la roue plombeuse du semoir, l'éleveur a monté une roue en fonte de 20 kg et une roue squelette qui referme la ligne de semis. La clé de la réussite de cette technique est d'avoir une graine entourée de terre fine, une ligne de semis fermée et peu de résidus sur le rang. Ainsi, la culture sera moins sensible aux limaces.

PHOTOS © D.G.

Combiné Strip Till semoir pour un semis de maïs derrière un ensilage de ray-grass. Pour un quatre rangs, il faut un tracteur de 120 ch. Le réglage de l'ensemble est précis et essentiel. Ici, des fientes de volaille ont été épandues avant.

Détail du Strip Till : un disque coutre, car ici il y a peu de résidus à écarter, suivi de la dent de décompaction. Elle est équipée d'ailettes assez en arrière pour ne pas lisser. Un tube place l'engrais azoté en localisé. Derrière, on trouve deux roues squelettes qui rappuient la ligne de semis.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Thomas Pitrel dans sa prairie de ray-grass

« La prairie multi-espèce a étouffé le ray-grass sauvage »

Herbe
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

Alsace Lait

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