
Rapport d’expertise. L’ingestion de débris métalliques par les bovins est une problématique bien réelle, cause de péritonites douloureuses et souvent fatales. Outre les mesures de prévention pour éviter la présence de ces débris, l’usage d’aimants introduits dans le rumen a montré son efficacité, selon l’Anses.
Saisie par l’association écologiste Robin des Bois, l’Anses (1) a évalué les risques pour la santé et le bien-être des animaux, ainsi que pour la santé publique, liés à l’ingestion de corps étrangers par les bovins, ainsi que l’administration d’aimants comme traitement préventif. Contrairement aux ovins et aux caprins, les bovins ont un comportement alimentaire qui les rend incapables de trier leur nourriture. Ils sont donc très exposés à l’ingestion de corps étrangers. Leur présence dans le réticulo-rumen peut avoir des conséquences très variables. Certains resteront libres, d’autres se fixeront à la paroi, pouvant aller jusqu’à la perforation, entraînant une péritonite aiguë qui peut être fatale. Pour cette évaluation, l’Anses s’est basée sur les données collectées dans les abattoirs, lors des autopsies et dans la bibliographie.
Les pneus sur le silo, première cause
Il en ressort que les corps étrangers retrouvés dans le rumen des bovins sont majoritairement des objets métalliques constitués principalement de fils de fer issus de pneus ou de clôture « pouvant mesurer entre 1 et 10 cm ». Plusieurs hypothèses sont émises sur leur origine. L’Anses pointe en premier lieu l’emploi de pneus pour couvrir les silos. En se décomposant, ils libèrent dans le fourrage des fils de métal fins et piquants. L’entretien des haies est aussi montré du doigt. Ainsi, l’usage de l’épareuse serait susceptible de déchiqueter et de disperser des morceaux de clôture ou des fils de fer oubliés. Les pertes de quincaillerie, après un chantier de construction, sont aussi mises en cause. Tout comme les éléments métalliques de petite taille qui peuvent se détacher du matériel de récolte ou de distribution des fourrages. Et contrairement à ce qu’évoquait l’association Robin des Bois, la pollution des prairies par des déchets, comme des canettes alimentaires, ne serait pas une cause de lésion chez les bovins.
Quant au niveau d’exposition, les experts de l’Anses estiment que « 7 à 20 % des bovins, en France, sont concernés par l’ingestion de corps étrangers ». Toujours est-il que 30 000 carcasses de bovins seraient saisies, de manière partielle ou totale, chaque année, pour des lésions potentiellement liées à la migration de corps étrangers. De plus, les données de l’équarrissage montrent, qu’annuellement, environ 29 000 bovins meurent à la ferme à la suite de lésions qui pourraient être provoquées par un corps étranger. Le rapport de l’Anses additionne ces deux données pour estimer à 59 000 le nombre de bovins victimes de ces corps étrangers ingérés. Ce chiffre représente 0,6 % de la population bovine de plus de 2 ans.
Les vaches laitières sont plus exposées
Si tous les types d’élevage sont concernés par cette exposition dangereuse, l’Anses note que la fréquence des lésions est plus élevée chez les bovins laitiers que chez les bovins allaitants. L’hypothèse est que les vaches qui restent plus longtemps dans le bâtiment sont davantage exposées aux morceaux de pièce métallique venant du silo ou des matériels de distribution.
« Ainsi l’exposition des bovins à des corps étrangers est une problématique d’élevage non négligeable », alerte l’Anses. « Cela ne conduit pas toujours à des réticulo-péritonites traumatiques, qui restent une affectionrare. Cependant, à l’échelle individuelle, l’impact est important car lors des formes sévères, l’issue est souvent fatale. L’impact sur la santé des individus, combiné à celui relatif au bien-être des animaux, nécessite qu’une action soit engagée vis-à-vis des bovins à risque », conclut l’Anses. Les premières recommandations de l’agence pour limiter l’exposition des bovins aux corps étrangers consistent à adopter une alternative aux pneus usagés pour le bâchage des silos et à équiper tous les matériels de distribution de la ration d’électro-aimants. L’Anses demande ensuite de sensibiliser les intervenants en élevage à l’application de bonnes pratiques en soignant particulièrement le nettoyage de fin de travaux lors des chantiers. Une attention particulière est aussi nécessaire lors de l’entretien des haies et des clôtures.
Les aimants sont sans aucun danger
La nature ferromagnétique de la majorité des corps étrangers permet d’utiliser des aimants, administrés par voie orale dans le rumen à l’aide d’un lance-aimant. « L’aimant peut capter et ainsi neutraliser à titre préventif l’élément métallique et/ou tenter de limiter son action vulnérante à titre curatif », précise l’Anses.
L’agence estime qu’environ 300 000 à 400 000 aimants sont commercialisés en France chaque année. Ramené à la population de génisses susceptibles d’en recevoir, 16 à 22 % des bovins seraient donc porteurs d’aimants. L’efficacité préventive et curative de l’aimant a été démontrée dans de nombreuses publications. Ainsi, l’analyse de la base de données canadienne montre que le risque d’une atteinte pathologique associée à un corps étranger est deux fois moins élevé chez un bovin ayant reçu un aimant. Mais l’Anses était aussi interrogée sur les conséquences possibles de l’utilisation de ces aimants sur la santé animale et humaine. Y aurait-il notamment un risque de dissolution ou d’abrasion de l’aimant à base de ferrite de strontium ? L’agence explique que « tous les arguments indiquent que cette dissolution est négligeable à l’échelle de la vie de l’animal et dans les conditions physiologiques ». Dans un scénario du pire, très improbable, où l’aimant se dégraderait en un an dans le rumen, la teneur des éléments chimiques le composant ne poserait aucun problème pour la santé publique et celle de l’animal.
Dès les premiers signes évocateurs
En conclusion de son rapport, l’Anses recommande la pose d’un aimant dès les premiers signes évocateurs d’une affection et avant le développement de formes graves. Lors d’une phase aiguë, le bovin présente de fortes douleurs abdominales, de la fièvre et des troubles de la digestion. En phase chronique, les signes sont plus frustes : amaigrissement et indigestion.
« Lorsque plusieurs bovins d’une exploitation sont atteints d’une affection liée à un corps étranger, il est recommandé d’administrer un aimant à chaque vache du troupeau. » Idem si l’exploitation se situe dans une zone à risque d’exposition. « Un retour vers l’éleveur, indiquant la saisie partielle ou totale d’un bovin pour lésion par un corps étranger, devrait conduire l’éleveur à une administration préventive d’aimants sur tout le troupeau », précise l’Anses.
(1) Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.
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