Ils ont décidé de rester petits et ne le regrettent pas

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Face à la baisse du prix du lait, des éleveurs choisissent de ne pas suivre la voie de l’agrandissement. La clé de leur réussite : maîtrise de l’endettement et pâturage.

L’agrandissement et la modernisation de son outil de travail dans un esprit d’entrepreneur sont à la fois une source de motivation et de satisfaction pour nombre d’éleveurs. C’est aussi un facteur de forte pression psychologique dans un contexte où le prix du lait fait le Yo-Yo. « Lorsque la taille du troupeau dépasse les capacités de travail humaines, les tâches sont confiées à des automates et le montant de l’argent investi donne parfois le vertige », souligne Pierre-Emmanuel Belot, animateur du groupe transversal Bovin lait, de l’Institut de l’élevage. L’aide au répit, le nouveau dispositif de la MSA, dénombre en seulement quatre mois 600 agriculteurs en situation de burn-out.

Maîtrise technique, transmission et « vivabilité »

Face à ce courant majoritaire d’agrandissement, des éleveurs explorent d’autres voies, fondées sur la maîtrise des charges et/ou sur la valeur ajoutée. Ils misent sur des systèmes herbagers économes, au travers et par l’augmentation du pâturage.

Ainsi, loin de l’image d’exploitations coupées du progrès, ils expérimentent de nouvelles pratiques, mais aussi des stratégies de financement innovantes. Entre 2007 et 2010, le Cedapas (Centre d’études pour le développement d’une agriculture plus autonome et solidaire du Nord-Pas-de-Calais) a mené une étude pour comprendre les motivations de ces producteurs. « Le souci de transmettre un outil fonctionnel est très présent, explique Audrey Grégoire, coordinatrice de l’association. Sur le plan technique, les producteurs évoquent leur volonté de conserver une structure à taille humaine pour garder la maîtrise de leur outil sans investir dans l’automatisation,même si certains aimeraient un peu plus de surfaces pour atteindre l’autonomie recherchée. La question du revenu est plus complexe. En effet, les éléments liés à la charge de travail apparaissent aussi comme des facteurs importants de vivabilité, donc de viabilité : le fait de se libérer du temps, par exemple, va favoriser l’équilibre personnel et familial, mais va aussi permettre une ouverture sociale et professionnelle. Enfin, l’autonomie, qu’elle soit technique ou financière, est mise en avant par les paysans comme facteur à prendre en compte quand on aborde le thème de la viabilité de leur ferme. »

Sur le plan économique, ce mode d’élevage offre une plus grande stabilité de revenu, tout en mobilisant moins de capital. Il s’agit d’accroître la productivité économique du travail, aux dépens de la productivité physique (lait/UTH).

Un minimum de 200 000 litres en lait standard

Une étude réalisée dans des exploitations du Réseau Agriculture Durable, publiée en juin 2016 (1), fait état d’un ratio charges opérationnelles/produit brut 40 % plus faible pour ces systèmes économes. Le taux d’EBE de 38,4 % traduit également une bonne efficacité. Néanmoins, malgré des charges très réduites, le prix du lait réclame un minimum de productivité. « Dans les exploitations conventionnelles spécialisées, compte tenu d’un prix du lait compris entre 300 et 330 €, un volume de lait livré de 200 000 litres par UTH apparaît comme le seuil minimum pour espérer dégager un Smic et demi », analyse Pierre-Emmanuel Belot. Dès lors, de plus en plus d’éleveurs se tournent vers la bio ou la transformation : en mai 2017, on compte 4 % d’éleveurs laitiers bio, soit 2 400 élevages, et en 2015, 2 542 producteurs ont déclaré une activité de vente directe auprès de FranceAgriMer. « Habituellement, nous suivons une vingtaine de projets par an. Mais au premier semestre, nous en sommes déjà à vingt-six, explique-t-on à l’Association des vendeurs directs des Hauts-de-France (ARVD). C’est une tendance observée un peu partout dans l’Hexagone, pour sécuriser le revenu dans une conjoncture difficile. » L’association évoque un volume moyen de 50 000 litres transformés par UTH, pour un retour de 20 000 € de revenu (variable selon le type de transformation). « C’est en tout cas l’objectif. Sur le terrain, on constate aujourd’hui des lancements de projets très réussis liés à une forte demande pour les produits locaux. » Même si elles ne sont pas toutes vertueuses, ces petites fermes sont assurément les mieux à même de répondre aux attentes sociétales.

Jérôme Pezon

(1) Les exploitations d’élevage herbivore économe. Rapport publié par le RAD, l’Idele et AgroParisTech.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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